ZFE : la ministre de la Transition écologique pense que les pauvres n’ont pas de voiture

Alors que les Zones à Faibles Émissions (ZFE) cristallisent les tensions, une déclaration de la ministre de la Transition écologique a ravivé les critiques.

Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 9 avril 2025 9h06
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74%74% des Français prennent la voiture pour aller travailler.

Le mardi 8 avril 2025, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, a provoqué une onde de choc en défendant les Zones à Faibles Émissions (ZFE) sur le plateau de BFM TV. Dans un contexte de remise en cause parlementaire de ce dispositif, elle a affirmé : « Les moins riches, ils n’ont pas de voiture ». Une phrase lancée en plein débat, qui soulève depuis un torrent de réactions et révèle une fracture entre discours politique et vie concrète.

ZFE : un dispositif qui divise, un propos qui électrise

Si l’objectif des ZFE paraît limpide : réduire la pollution atmosphérique en interdisant les véhicules les plus polluants dans les centres urbains, leur mise en œuvre est loin de faire consensus. Depuis leur création, ces zones restreignent l’accès aux véhicules classés Crit'Air 3, 4 et 5 dans près d’une quarantaine d’agglomérations françaises, avec des effets immédiats sur les populations modestes.

Face aux critiques, Agnès Pannier-Runacher s’est défendue en précisant sa pensée : « Les moins riches, ils n’ont pas de voitures, ce sont ceux qui sont le moins équipés ». Le message est clair : une partie des ménages pauvres, faute de moyens, ne serait tout simplement pas concernée par les restrictions. Sauf que ce raisonnement, s’il se veut logique, paraît brutalement déconnecté des réalités territoriales.

La voiture des « moins riches » : rare ou vieille, donc ciblée

Le raisonnement de la ministre trouve un écho dans certaines statistiques. Selon le Service des données et des études statistiques (SDES), « les 10 % de ménages les plus modestes ne détiennent que 5 % du parc automobile », contre plus du double pour les 10 % les plus riches. Dans cette optique, ceux qui ne possèdent pas de véhicule ne sont pas directement impactés.

Mais ceux qui en ont, roulent avec les voitures les plus anciennes, donc les plus polluantes. Dans le premier décile de revenu, l’âge moyen d’un véhicule est de treize ans, contre neuf pour les plus aisés. Résultat : ce sont ces voitures-là qui se retrouvent en première ligne des interdictions imposées par les ZFE.

Alors, moins touchés ? Ou plus vulnérables encore, parce que forcés de conserver des véhicules ciblés par les nouvelles normes ? Sur ce point, le discours gouvernemental laisse planer une confusion stratégique.

L’aide aux plus modestes : quelles solutions concrètes après les ZFE ?

Interpellée à l’Assemblée nationale par le député Bartolomé Lenoir (UDR), qui lui reproche de proférer « un mépris macroniste », la ministre tente de rectifier le tir. Elle rappelle sur X que « 4,3 millions de Français n’ont accès à aucun moyen de transport, qu’il soit individuel ou collectif » et affirme que « le nier, c’est invisibiliser les plus précaires ».

Des propos qui visent à replacer le débat sur le terrain de la santé publique. « C’est un sujet de santé publique majeur », a-t-elle affirmé à plusieurs reprises, évoquant les 48 000 décès prématurés liés chaque année à la pollution atmosphérique.

Mais à aucun moment la ministre ne détaille de plan d'accompagnement clair pour ces millions de Français. Elle évoque des pistes comme le leasing social pour voitures électriques, dispositif lancé en septembre, mais les contours restent flous. Aucun calendrier, aucun budget annoncé. Sur ce terrain, la réponse semble aussi fragile que l’intention.

Entre perception d’arrogance et colère politique

La réaction ne s’est pas fait attendre. Marine Le Pen dénonce « un besoin irrépressible de [la ministre] d’insulter les automobilistes ». Nicolas Dupont-Aignan réclame la suppression pure et simple des ZFE, fustigeant une « insupportable méconnaissance de la vie de millions de Français obligés de prendre leur voiture pour aller travailler ».

Même des voix inattendues s’élèvent. L’animateur Mac Lesggy ironise sur X : « Quand tu n’as pas traversé le périph' depuis longtemps… comment peut-on penser une chose pareille ? ».

Alors que le gouvernement défend les ZFE comme une obligation imposée par l’Union européenne dans les agglomérations qui dépassent les seuils de pollution pendant trois des cinq dernières années, la bataille politique s’intensifie. Les Républicains et le Rassemblement national réclament leur abolition dans le cadre du projet de loi sur la simplification, débattu cette semaine à l’Assemblée.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

1 comment on «ZFE : la ministre de la Transition écologique pense que les pauvres n’ont pas de voiture»

  • Raymond

    Cette ministre ne sait pas ce qu’est la vie des Français. Elle vit dans sa cage dorée sans se soucier du mal qu’elle fait aux Français concernés. Ça me dégoûte.

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