Trump dégaine encore ses taxes : les voitures étrangères dans le viseur

Le marché automobile mondial entre en turbulence. Washington frappe fort, et le consommateur américain risque bien d’en faire les frais. Quels effets en cascade attendre d’une telle secousse fiscale ?

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Publié le 27 mars 2025 à 7h00
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trump-taxe-douane-europe-menace-commerce - © Economie Matin
15%Trump ne veut pas taxer les multinationales à 15%.

Le 26 mars 2025, Donald Trump a annoncé l’application d’une taxe douanière de 25 % sur toutes les voitures importées aux États-Unis. Cette décision, justifiée par la protection de l’industrie nationale, suscite une onde de choc bien au-delà des frontières américaines. L’impact économique, les réactions diplomatiques et les conséquences pour les consommateurs s’annoncent redoutables.

Une taxe pour protéger l’industrie automobile ou pour punir les voisins ?

Derrière le discours de façade — relocalisation, sécurité nationale, réduction du déficit commercial — se cache une politique de confrontation tous azimuts. En annonçant l’entrée en vigueur de cette nouvelle taxe à partir du 3 avril 2025, Donald Trump assume : « C’est permanent », a-t-il martelé selon Associated Press.

Le spectre de cette mesure est large : voitures particulières, utilitaires légers, pièces détachées, composants de transmission et éléments électriques sont dans le collimateur. Rien n’échappe. Même les marques américaines comme Chevrolet ou Jeep sont concernées dès lors que leur production est localisée à l’étranger. La surtaxe frappe le produit, pas l’étiquette.

Et pour justifier une telle décision ? Le président évoque le caractère “stratégique” de l’industrie automobile, tout en dénonçant une chaîne d’approvisionnement qu’il juge « ridicule », relaye Reuters. Il précise aussi : « Cela va continuer à stimuler la croissance. Nous allons effectivement imposer une taxe de 25 %. »

Le prix d’un patriotisme fiscal : jusqu’à 12 500 dollars de plus pour les achats automobiles

Le consommateur américain risque de se réveiller avec une sévère gueule de bois. Le cabinet Anderson Economic Group estime que le surcoût pourrait atteindre entre 3 500 et 12 500 dollars par véhicule, soit environ 3 250 à 11 600 euros.

Mary Lovely, économiste au Peterson Institute for International Economics, prévient dans AP News : « Nous allons faire face à des prix de véhicules beaucoup plus élevés. Nous verrons moins de choix... Ce genre de taxe pèse davantage sur les classes moyennes et populaires. » En clair : moins de choix, plus de dépenses, et des voitures inaccessibles pour nombre de foyers.

À cela s’ajoute l’effet domino. Les prix de l’assurance auto sont en train de grimper, tout comme ceux du marché de l’occasion, pris d’assaut par des acheteurs déboussolés. Cox Automotive estime que 30 % de la production nord-américaine (soit environ 20 000 véhicules par jour) serait directement affectée. Shelby Rothman, analyste de Enjoy Financial, enfonce le clou dans Fox 11 Los Angeles : « Une réduction de la demande entraînera un ralentissement de la production, avec une perte potentielle de 20 000 véhicules par semaine. »

Douane contre douane : vers un bras de fer commercial mondial

Les partenaires historiques des États-Unis sont furieux. Le Canada, premier touché, dénonce un coup de poignard. Le Premier ministre Mark Carney fustige une « attaque très directe » contre les travailleurs canadiens, selon ABC News. L’Union européenne n’est pas en reste : Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, avertit : « Les droits de douane sont des taxes – mauvaises pour les entreprises, pires encore pour les consommateurs, autant aux États-Unis que dans l’Union européenne. »

Du côté de l’Asie, l'inquiétude grimpe aussi. Le Premier ministre japonais Shigeru Ishiba supplie : « Nous demandons instamment que des mesures tarifaires ne soient pas appliquées au Japon. » Résultat : le Nikkei 225 a chuté de 1 %, le Kospi coréen de 1,2 %, et les constructeurs asiatiques ont vu leurs actions s’effondrer — Mazda (-6,5 %), Hyundai (-4,3 %), Toyota (-3,2 %).

Et les États-Unis ? Le S&P 500 a reculé de 1,1 %, le Nasdaq de 2 %, et General Motors a plongé de 3 %, tout comme Stellantis.

Trump promet des usines, mais livre des taxes

Pour justifier cette déflagration commerciale, l'administration Trump prédit des recettes fiscales de 100 milliards de dollars par an. Mais à quel prix ? Pour faire passer la pilule, le président propose une déduction fiscale sur les intérêts des prêts automobiles... à condition d’acheter une voiture fabriquée aux États-Unis.

Or, selon le Bureau of Labor Statistics, plus de 320 000 emplois industriels dans l’automobile ont disparu depuis l’an 2000, et les plans de relocalisation mettent des années à voir le jour. La preuve ? Hyundai, cité par AP News, n’ouvrira pas son usine d’acier en Louisiane avant 2027.

Industrie automobile : une taxe, beaucoup de doutes, peu de moteurs

En déclenchant cette offensive douanière, Donald Trump relance une guerre économique à l’échelle mondiale, où le premier impacté risque bien d’être le consommateur américain lui-même. Entre inflation, contraction de la demande et tensions diplomatiques, l’industrie automobile entre dans une zone de turbulences à haute intensité — et personne n’est assuré d’en sortir indemne.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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