Les aéroports français enregistrent une légère hausse du trafic en 2024, mais les chiffres restent en deçà du niveau pré-Covid. Derrière ces statistiques, une réalité plus préoccupante se dessine : le poids des taxes, la faiblesse du trafic intérieur et la montée en puissance des hubs étrangers menacent l’avenir du transport aérien en France.
Trafic aérien : la France décroche pendant que l’Europe accélère

Aérien : Un trafic en hausse, mais toujours en retard sur 2019
Le ciel français n’est toujours pas dégagé. En 2024, 205,7 millions de passagers ont transité par les aéroports de l’Hexagone, enregistrant une hausse de 3,6% par rapport à 2023. Pourtant, ces chiffres cachent une réalité moins réjouissante : ce volume reste inférieur de 4% à celui de 2019, dernière année de référence avant la crise sanitaire. « Ce n’est pas une bonne année, et c’est une année contrastée », admet Thomas Juin, président de l’Union des Aéroports Français (UAF) lors de la conférence de presse du secteur qui s’est tenue le 12 mars 2025.
Si certains aéroports tirent leur épingle du jeu, notamment grâce au dynamisme des compagnies à bas coût, d’autres peinent toujours à retrouver leur clientèle. Les infrastructures régionales souffrent particulièrement. Bordeaux affiche une baisse de 14,4% sur cinq ans, Lyon chute de 10,9%, et Toulouse-Blagnac s’enfonce avec un recul de 18,5.
Secteur aérien : une fiscalité qui pénalise la reprise
Alors que les aéroports tentent de retrouver leur attractivité, les taxes sur le transport aérien explosent. En 2024, la taxe de solidarité sur les billets d’avion a été relevée à 7,4 euros, contre 2,63 euros auparavant. Une hausse perçue comme un coup de massue pour les compagnies aériennes, qui dénoncent un frein à la compétitivité.
L’Union des Aéroports Français alerte sur un risque majeur de fuite des compagnies vers des destinations plus fiscalement attractives. Thomas Juin met en garde contre « un début de décrochage de la France par rapport aux pays concurrents », citant l’Espagne, le Portugal et l’Italie comme destinations bénéficiant d’un cadre plus favorable.
Le grand déclin du trafic intérieur
Autre facteur préoccupant : la chute du trafic domestique. Entre 2019 et 2024, les vols intérieurs ont enregistré une baisse vertigineuse de 24,8%, poursuivant leur recul avec -5% entre 2023 et 2024.
Pourquoi cette désaffection ?
- Effet télétravail et visioconférences : de nombreux déplacements professionnels ont été remplacés par des réunions virtuelles.
Montée en puissance du train : avec le développement du réseau à grande vitesse, de nombreux trajets aériens sont concurrencés par le ferroviaire.
Facteurs environnementaux : des incitations politiques et sociétales poussent les voyageurs à éviter l’avion sur les courtes distances, l’avion étant très largement plus polluant que les autres mode de transport, à commencer par le train.
Le gouvernement ne semble pas prêt à inverser la tendance. En 2026, la fiscalité aérienne pourrait encore s’alourdir, un coup dur potentiel pour les compagnies, déjà fragilisées par une offre en avions limités et des coûts d’exploitation en hausse.
Comparaison avec l’Europe : la France décroche
Pendant que les aéroports français peinent à décoller, leurs voisins européens affichent des progressions spectaculaires.
- Turquie : +23% par rapport à 2019
- Grèce : +22%
- Italie et Portugal : +17%
- Union Européenne : +1,6%
Autrement dit, alors que le reste du continent décolle vers de nouveaux records, la France stagne.
Parmi les rares gagnants, les aéroports spécialisés dans le low-cost, à commencer par Beauvais, qui enregistre une progression fulgurante de +64,6% depuis 2019. Mais ces plateformes restent marginales dans le paysage global, et le pays ne peut pas compter uniquement sur elles pour assurer son avenir aérien.
Le transport aérien français en danger ?
2024 devait être une année de consolidation pour le trafic aérien en France, mais la reprise semble à bout de souffle. Avec une fiscalité qui freine la compétitivité, un trafic intérieur en berne et une croissance mondiale dont la France ne profite pas, les aéroports français peinent à trouver un second souffle.