TPE/PME : comment financer le nouveau pacte de la vie au travail ?

Selon les dernières estimations d’Allianz Trade, sur le nombre de faillites d’entreprises, 59 000 entreprises pourraient se retrouver en situation d’insolvabilité et de liquidation en 2023, en France. Cela correspond à une augmentation de 41 % par rapport à 2022, touchant en priorité les petites entreprises.

Neila Choukri (1)
Par Neila Choukri Publié le 3 juin 2023 à 10h30
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TPE/PME : comment financer le nouveau pacte de la vie au travail ? - © Economie Matin
99%Les TPE-PME représentent 99% des entreprises de l'Union européenne.

Dans un contexte économique et social complexe, le « quoi qu’il en coûte » de l’ancien monde s’avère finalement être une manœuvre onéreuse qui pèse aujourd’hui lourd dans les portefeuilles des TPE/PME. Inflation, remboursements de prêts, hausse des coûts de l’énergie et des matières premières, difficultés de recrutement : prises entre le marteau et l’enclume, les entreprises, et en particulier les plus petites, suffoquent.

Tenir ses promesses dans un contexte incertain

En 2020, le président Emmanuel Macron promettait au peuple français de ne pas « ajouter aux difficultés sanitaires la peur de la faillite pour les entrepreneurs, l'angoisse du chômage et des fins de mois pour les salariés. » Trois ans après le début de la pandémie, force est de constater que certaines promesses ne peuvent pas être tenues, que ce soit en raison d’un contexte géopolitique incertain, ou d’un climat politique et social tendu. Si la crise actuelle n’épargne personne, les TPE/PME se retrouvent en ligne de front malgré elles. Or, si Albert Einstein estimait que chaque crise représentait également de nouvelles opportunités, il n’en reste pas moins nécessaire de trouver des solutions pour résoudre la précarité, présente depuis trop longtemps, dans ces organisations.

Le pacte de la survie des emplois des petites structures

Le président de la République et son gouvernement réfléchissent actuellement à un nouveau pacte de la vie au travail concentré sur quatre axes : le changement des rapports au travail, l’organisation et l’équilibre vie professionnelle / vie personnelle, le compte-épargne temps universel et la santé au travail. Autant de sujets qui se sont amplifiés depuis le début de la pandémie, pour se placer au cœur des débats, mais dont l’impact sur les dirigeants de petites structures est, quant à lui, sans appel. En effet, la qualité de vie au travail a un coût. En d’autres termes, le dirigeant doit pouvoir investir dans le bien-être de ses employés et pour ce faire, il doit disposer d’un pouvoir d’achat suffisant afin de supporter ces aspirations, les cotisations patronales, les taxes, les salaires, et les diverses échéances qui lui incombent.

Ainsi, l’un des enjeux majeurs qui devraient en premier lieu émerger de ces discussions est le pouvoir d’achat qui rend possible ces ajustements à « l’entreprise de demain ». En réalité, le gouvernement, dans les 100 jours de réflexion, doit surtout tenir compte du fait que le pouvoir d’achat des TPE/PME est amoindri. Or, les premières pistes évoquées dans le rapport remis lundi 24 avril dernier au ministre du travail, Olivier Dussopt, n’en fait pas mention.

En effet, des décisions telles que l’augmentation des salaires, quand ces entreprises ont du mal à boucler les fins de mois, pourraient précipiter leur faillite et impacter les 7 millions d’emplois qu’elles pourvoient aujourd’hui – annihilant de facto l’intention du pacte pour ces cibles spécifiques.

Dans ce contexte, un nouveau pacte de la survie des emplois de nos TPE/PME serait plus adapté afin de permettre de financer le « travailler mieux » et alléger la charge qui pèse sur les entrepreneurs : une charge financière, sociale mais également mentale. Plus que jamais, les dirigeants ont besoin de solutions concrètes pour payer leurs loyers, leurs factures, leurs employés et continuer de se développer. C’est un cercle vertueux qui doit être mis en place.

Soutenir les dirigeants

Il est plus que jamais essentiel d’apporter un soutien aux directeurs de petites et moyennes structures afin de les aider dans cette période complexe. En effet, si l’intention est vertueuse, les diverses décisions et annonces du gouvernement peuvent conduire à une forme de « pollution » de laquelle il est difficile d’extraire des informations claires. Par conséquent, il devient aisé de passer à côté d’annonces clés, d’aides, et de manquer des échéances importantes.

A l’heure de la mondialisation, le savoir-faire local et l’entrepreneuriat doivent constituer les fondations de la France de demain ; une France postpandémique, digitalisée et dans laquelle le monde moderne évolue à grande vitesse. Il incombe au gouvernement en place d’aider les entrepreneurs à prospérer pour inverser la courbe des faillites et les encourager à entreprendre toujours plus, pour ne surtout pas tomber dans « un monde moderne [dans lequel] la machine gouvernementale [est] si énorme qu'on passe souvent plus de temps à la faire marcher qu'à en définir le rôle. » comme l’a décrit Kissinger.

Dans les faits, le gouvernement est tourné vers cet objectif et met en place de nombreuses mesures pour aider les entreprises, mais il manque d’experts de « terrain » qui voient le quotidien des entrepreneurs tels qu’il est vraiment, Sans tirer des conclusions basées uniquement sur des statistiques ou des projections financières, qui ne reflètent ni le besoin ni la réalité opérationnelle de la mise en exercice de certaines aides qui ne sont pas en adéquation avec le réel. Et c’est ce que ce pacte de la survie devrait contenir de différent. En d’autres termes, les entreprises ont besoin de propositions adaptées à chaque profil : un boulanger n’a pas les mêmes besoins qu’un ébéniste, un restaurateur, un commerçant, un notaire, une entreprise technologique ou un horloger. Les besoins matériels, la consommation d’énergie, les loyers, sont autant de charges qui diffèrent entre chaque métier et constituent le quotidien de ces entrepreneurs, bien souvent de passion. Or, pour diriger sereinement et sans crainte du lendemain, ils doivent se sentir épaulés, et non esseulés. C’est pourquoi un programme destiné à les aider, en parallèle des initiatives en discussion en faveur des employés, rendrait de la sérénité et contribuerait de surcroît au bien-être de leurs propres employés.

Pour Ernest Hemingway, « la première panacée pour une nation mal dirigée est l’inflation monétaire, la seconde est la guerre. Les deux apportent prospérité temporaire et destruction indélébile. Les deux sont le refuge des opportunistes économiques et politiques. » Le président de la République saura-t-il éviter cette prophétie que bon nombre de citoyens envisagent et saisira-t-il l’opportunité de redresser la barre qui se présente à lui dans ces 100 jours de ce second mandat ? Le défi n’est pas simple, mais s’il a pu tenir 47 des 100 promesses de 2017, parmi lesquelles le droit à l’assurance-chômage, l’extension de la PMA à toutes les femmes, ou encore la suppression de la taxe d’habitation, il n’est pas impossible que figurent parmi les objectifs de 2023 la promesse d’un meilleur avenir pour les TPE et PME françaises.

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Neila Choukri (1)

Fondatrice et CEO de Kolecto.

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