Jusqu’à quand les titres-restaurant continueront-ils de susciter autant de controverses ? Alors que le Parlement français a voté leur prolongation pour les courses alimentaires jusqu’en 2026, les restaurateurs, menés par l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (UMIH), dénoncent un détournement de leur vocation initiale. Une critique régulière depuis que le gouvernement a permis l’achat de denrées alimentaires grâce aux titres-restaurant pour soulager le budget des ménages et répondre, en partie, à la crise sanitaire de la Covid-19.
Titres-restaurant : les restaurateurs en colère dénoncent un « titre-caddie »
Le 14 janvier 2025, le Parlement français a adopté une mesure prolongeant l’usage des titres-restaurant pour les achats alimentaires en supermarché jusqu’à fin 2026. Cet usage, initié durant la pandémie pour soutenir le pouvoir d’achat des travailleurs, continue de diviser. Les restaurateurs, représentés par l’UMIH, y voient un danger pour leur secteur et rappellent que les titres-restaurant, au départ, ça servait bien pour « aller au restaurant », et notamment payer une partie de la pause déjeuner des salariés.
Titres-restaurant pour les courses : un « détournement » dénoncé par l’UMIH
Selon l’UMIH, l’élargissement de l’usage des titres-restaurant aux grandes surfaces est un véritable « détournement » de leur objectif initial. « Le Sénat vient de voter la prolongation de l'utilisation du titre-restaurant en supermarché jusqu'en 2026...et a ainsi validé le détournement du titre-restaurant en titre-caddie », explique Franck Chaumès, président de l’UMIH Restauration.
Cette mesure temporaire, instaurée en 2020, permet aux consommateurs d’acheter des produits variés en supermarché, qu’ils soient directement consommables (fruits, plats préparés) ou non (riz, pâtes, viande non transformée). L’Umih rappelle que cet usage a retiré en 2024 près de 600 millions d’euros de chiffre d’affaires aux restaurateurs français qui continuent d’avoir du mal à rester à flot après la crise sanitaire.
Produits éligibles aux titres-restaurant en 2025 :
Produits autorisés | Produits interdits |
---|---|
Pâtes, riz, légumes, fruits | Boissons alcoolisées |
Plats préparés, snacks, poissons, viandes | Produits pour animaux |
Desserts et viennoiseries (hors produits laitiers) | Confiseries |
Ce tableau illustre l’élargissement de la liste des produits accessibles, une évolution qui inquiète les restaurateurs. « Ces titres ne profitent plus à ceux pour qui ils étaient destinés, mais à la grande distribution », déplore l’UMIH.
La restauration en France, un secteur en détresse économique
Les restaurateurs subissent de plein fouet les conséquences de cette décision. « Aujourd’hui à l’heure où on se parle, c’est une vingtaine de restaurants qui ferment tous les jours pour faillite. Donc on peut dire que le Parlement est complice de la grande distribution pour faire les poches des restaurateurs. Oui, on comprend les problèmes des Français. Mais une fois de plus, ce gouvernement est comme le précédent il n’y a pas de dialogue », affirme Franck Delvaux, président de l’UMIH Île-de-France au micro de RMC le 15 janvier 2025. L’UMIH accuse le gouvernement et le Parlement de céder aux pressions des grandes surfaces, qu’elle considère comme les grandes gagnantes de cette mesure.
Malgré l’impact économique sur les restaurateurs, les défenseurs de cette prolongation mettent en avant l’amélioration du pouvoir d’achat des travailleurs. La Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD) applaudit la décision, la qualifiant de « soutien indispensable aux ménages en période d’inflation ».
Titres-restaurant : une réforme indispensable selon l’UMIH
Face à cette situation, l’UMIH appelle à une réforme complète du dispositif. Parmi leurs propositions figurent :
- Une digitalisation intégrale des titres-restaurant pour limiter les abus et faciliter leur traçabilité.
- Une révision des commissions imposées aux restaurateurs, jugées excessives.
- La création d’un titre alimentaire distinct, réservé aux courses alimentaires, pour recentrer les titres-restaurant sur leur vocation initiale : soutenir la consommation dans les restaurants.
Cependant, ces propositions peinent à trouver un écho favorable auprès des décideurs. Franck Chaumès dénonce un manque de courage politique : « Nous avons le sentiment d’être entendus, mais jamais réellement écoutés. »
L’avenir des titres-restaurant : un débat politique animé
La prolongation de cette mesure a été marquée par des tensions au Parlement. Alors que le Sénat plaidait initialement pour une réforme rapide d’ici 2025, il a finalement accepté la prolongation jusqu’en 2026 afin d’éviter des navettes législatives. « Si on ne s’aligne pas, rien n’avance », a déclaré la sénatrice centriste Nadia Sollogoub.
Pour l’instant, la ministre déléguée aux petites et moyennes entreprises, Véronique Louwagie, a promis d’ouvrir un chantier de modernisation du dispositif. Toutefois, aucune échéance précise n’a été annoncée, renforçant les frustrations des restaurateurs.