Taxe sur les superprofits : les pétroliers l’ont esquivée

La taxe sur les superprofits a été introduite pour tenter de récupérer une partie des gains des énergéticiens, et notamment des géants du pétrole comme TotalEnergies, alors que les prix explosaient et que les ménages payaient de plus en plus cher carburant, électricité et gaz.

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Publié le 30 mai 2024 à 9h04
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3 MILLIARDS €La taxe sur les superprofits devait rapporter 3 milliards d'euros.

Initialement envisagée comme une solution pour capter une partie des bénéfices exceptionnels générés par certaines entreprises, notamment dans les secteurs de l'énergie et du raffinage, les résultats se sont avérés bien en deçà des attentes.

Moins de 100 millions d’euros pour la taxe sur les superprofits

L'Institut des Politiques Publiques (IPP) avait initialement estimé que la taxe sur les superprofits des groupes pétroliers pourrait générer jusqu'à 3 milliards d'euros de recettes pour l'État. Cependant, les résultats réels ont été beaucoup plus modestes, avec seulement 69 millions d'euros collectés en 2023.

L'une des principales raisons de ce faible rendement réside dans les exclusions appliquées par le fisc. De nombreuses entreprises ont été exclues du périmètre de la taxe en raison de la structure de leurs opérations. Par exemple, si une entreprise achète du pétrole brut et revend du pétrole raffiné, mais sous-traite l'activité de raffinage, ses marges ne sont pas considérées comme des superprofits. Environ 72 % des superprofits initialement ciblés ont été soustraits à la taxe en raison de ces exclusions, bien que ces entreprises aient bénéficié de la même croissance exceptionnelle du chiffre d'affaires que celles soumises à la taxe. « Le « superprofit » est en effet la partie du bénéfice taxable à l’IS en 2022 supérieure de 20% à la moyenne du bénéfice taxable des quatre années précédentes », rappelle l’IPP dans sa note publiée le 29 mai 2024.

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Les groupes pétroliers ont réussi à masquer leurs superprofits

Une autre explication réside dans la possibilité pour les groupes pétroliers de reporter leurs pertes des exercices précédents pour réduire l'assiette des superprofits soumis à taxation. Ce dispositif, bien que courant en matière d'impôt sur les sociétés, a considérablement réduit l'assiette taxable. Les entreprises ont pu utiliser leurs pertes antérieures pour réduire leur bénéfice taxable, diminuant ainsi les recettes de la taxe de 20%.

«  Autrement dit, les raffineurs ont utilisé plus largement que prévu un puissant et habituel dispositif de réduction de l’IS pour cette fois-ci fortement réduire l’assiette assujettie à la taxe sur les superprofits. Et c’est ainsi que par rapport à notre estimation de rendement la plus haute, à 3 milliards d’euros et qui faisait l’hypothèse d’une absence d’imputation significative de pertes antérieures, l’imputation des pertes effectivement réalisées par les contribuables réduit le rendement de la CES d’environ un cinquième, soit 2,4 milliards d’euros », explique l’IPP.

L’optimisation fiscale de TotalEnergies et compagnie a une nouvelle fois réduit l’impôt

En outre, les stratégies comptables et fiscales des multinationales ont joué un rôle significatif. Les marges des groupes pétroliers en France sont restées faibles malgré la hausse des prix du pétrole, en partie à cause de la répartition des profits au sein des multinationales comme TotalEnergies et ExxonMobil. La France représente une part importante des revenus de TotalEnergies en Europe, mais seulement 4% de ses impôts.

Face à ces défis, une coordination à l'échelle européenne pourrait être nécessaire. L'IPP suggère de répartir les profits des groupes pétroliers en fonction de leur activité dans chaque pays de l'UE, similaire à l'impôt minimum mondial sur les sociétés. Cette approche aurait pu rapporter 2,2 milliards d'euros à la France en 2022 au titre de la taxe sur les superprofits.

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Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint Après son Master de Philosophie, s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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