Retraites et développement : les enjeux de l’année 2023

Notre système de retraites a besoin d’être revu et corrigé en profondeur, mais ce n’est pas ce que veulent faire le Président et le Gouvernement.

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Par Jacques Bichot Publié le 29 mars 2023 à 5h38
Retraites Françaises
Retraites et développement : les enjeux de l’année 2023 - © Economie Matin
30%Les femmes touchent une retraite en moyenne près de 30% inférieure aux hommes.

La seule mesure importante qu’ils aient annoncée est en effet un simple ajustement paramétrique, dont voici l’essentiel : « L'âge légal à partir duquel il est possible de partir à la retraite sera progressivement relevé à compter du 1er septembre 2023, à raison de trois mois par année de naissance. Il sera ainsi fixé à 63 ans et 3 mois en 2027 à la fin du quinquennat, puis atteindra la cible de 64 ans en 2030. »

Il s’agit là d’une mesure nécessaire, et qui témoigne d’un certain courage, puisque les syndicats s’y opposent, mais ce relèvement de l’âge de départ à la retraite devrait être complété par une action vigoureuse en faveur de la natalité.

L’avenir des retraites repose sur la natalité

L’avenir à long terme des retraites par répartition dépend en effet de la mise au monde de bébés en nombre suffisant (facteur quantitatif) et de l’éducation qui est donnée à nos enfants et à nos jeunes (facteur qualitatif). Je ne développerai pas ici l’importance d’un système scolaire et universitaire de très bonne qualité, mais il est clair que nous devons y apporter une attention soutenue. Concentrons-nous sur la natalité, dont la vigueur fut un atout important pour notre pays jusqu’en 2010, année après laquelle les Français ont laissé décliner leur enthousiasme reproductif. De 802 000 en 2010, le nombre des naissances en France métropolitaine est tombé progressivement à moins de 700 000 (696 700 en 2020, 702 000 en 2021, et 687 000 en 2022).

L’avenir de l’Europe et des démocraties est en jeu

Cette dégringolade n’est pas propre à notre pays : pour l’Union européenne dans son ensemble, l’indice de fécondité avoisine 1,50, tandis que la France se situe à 1,83. Notre pays est donc dans la situation d’un borgne au pays des aveugles ! Et c’est pour l’Union européenne dans son ensemble que nous pouvons être inquiets : l’Europe doit assumer de lourdes responsabilités sur une planète où les pays démocratiques sont de plus en plus minoritaires en nombre de citoyens. Si le nombre des européens n’ayant pas atteint un âge canonique faiblit tandis qu’augmente celui des populations ayant d’autres origines, l’influence de nos façons de voir les choses au niveau mondial comptera de moins en moins, et cela d’autant plus sûrement que la partie disons « occidentalisée » de l’humanité comportera une forte proportion de personnes âgées et très âgées, certes hautement respectables, mais n’ayant plus le « punch » et la force vitale de la jeunesse.

Ne laissons pas passer la chance

Face à la situation mondiale, la civilisation occidentale représente, en dépit de ses nombreuses imperfections, une véritable chance. Pour la saisir, il serait bon de miser sur les points communs ou du moins compatibles qui existent entre les différentes cultures. Par exemple, la civilisation chinoise et ses « petites sœurs » orientales ont développé un sens de la famille qui résiste même au rouleau compresseur politique des régimes communistes. Nous ne devons pas laisser tomber ces hommes, ces femmes et leurs enfants !

Si nous ne le faisons pas par altruisme, faisons-le par intérêt bien compris : de l’Extrême-Orient, de l’Inde et de l’Afrique dépendent bien des choses qui nous concernent directement. L’avenir de la France et de l’Europe dépendra pour une part importante ce que feront ces « poids-lourds » démographiques. Si nous entretenons avec eux des rapports véritables, équitables, pas simplement des achats de produits bon marché face à des ventes de biens et services sophistiqués pratiquement réservées à des minorités occidentalisées, l’avenir sera meilleur pour tous.

L’Occident pourrait aider à ce que la modernisation des pays pauvres se réalise dans des conditions « humaines »

La modernisation est un processus de création/destruction : des manières de faire sont remplacées par d’autres, et ce n’est pas facile pour tout un chacun ! Les occidentaux, ou plus exactement les pays les plus développés, pourraient aider à réaliser ces changements de manière pas trop pénible pour les hommes et les femmes qui ont du mal à suivre. Probablement faudra-t-il « accompagner » certains changements : la concurrence a du bon, beaucoup de bon, mais elle a aussi des effets néfastes lorsqu’elle s’exerce au détriment d’une partie de la population qui est en retard. L’avance occidentale en matière d’efficacité productive pourrait être utilisée pour rendre moins pénible la transition du Tiers-monde vers la modernité. Au bénéfice de tous !

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Jacques Bichot est économiste, mathématicien de formation, professeur émérite à l'université Lyon 3. Il a surtout travaillé à renouveler la théorie monétaire et l'économie de la sécurité sociale, conçue comme un producteur de services. Il est l'auteur de "La mort de l'Etat providence ; vive les assurances sociales" avec Arnaud Robinet, de "Le Labyrinthe ; compliquer pour régner" aux Belles Lettres, de "La retraite en liberté" au Cherche Midi et de "Cure de jouvence pour la Sécu" aux éditions L'Harmattan.

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