L’usage des titres-restaurant dans les grandes surfaces est une mesure qui pourrait être prolongée en 2025, suscitant une vive opposition du secteur de la restauration. Les professionnels craignent une perte de clientèle et un affaiblissement du fait-maison.
Les restaurateurs s’insurgent contre la prolongation des titres-restaurant à la grande distribution
Depuis 2022, les titres-restaurant peuvent être utilisés dans les grandes surfaces pour l'achat de produits non directement consommables. Cette extension temporaire, mise en place pour soutenir le pouvoir d'achat des consommateurs, pourrait être prolongée en 2025, voire pérennisée. Une perspective qui inquiète profondément les restaurateurs, représentés notamment par l'Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie (Umih) et le Groupement des Hôtelleries et Restaurations (GHR), dirigés respectivement par Thierry Marx et Catherine Quérard.
Une concurrence déloyale pour les restaurateurs
L’annonce d’une décision imminente par le gouvernement a fait réagir vivement les restaurateurs, qui dénoncent une concurrence accrue avec la grande distribution. En effet, l’élargissement des titres-restaurant aux produits alimentaires vendus en supermarché a, selon eux, des conséquences directes sur leur chiffre d’affaires.
Thierry Marx, président de l’Umih, a exprimé son mécontentement : « 600 millions d'euros vont vers la grande distribution, qui n'a pas besoin de notre travail pour faire des marges », a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. Selon les chiffres avancés par les professionnels du secteur, la part de marché des grandes surfaces a progressé de 8,4 points, tandis que celle des restaurateurs a reculé de 6,4 points depuis cette extension.
Face à cette situation, Edenred, principal émetteur des titres-restaurant, a affirmé qu'il n'était pas favorable à une pérennisation de cette mesure. Le groupe propose plutôt de limiter l'utilisation des titres à un double plafond : 30 euros au restaurant et 25 euros dans les grandes surfaces, afin de préserver leur usage principal, à savoir « bien s'alimenter pendant la journée de travail ».
Vers une industrialisation de la restauration ?
Les restaurateurs ne cachent pas leur inquiétude quant à l’avenir de leur métier. Selon Thierry Marx, une généralisation de l'utilisation des titres-restaurant en grande distribution mènerait à une « industrialisation » de la restauration, menaçant directement les établissements de petite taille. « Les restaurants menacés seront remplacés par moins de fait-maison », a-t-il prévenu. Une perte de qualité qui préoccupe également les artisans des métiers de bouche, comme les boulangers et les bouchers, représentés par la Confédération Générale de l'Alimentation en Détail (CGAD).
Cette question s'inscrit dans un contexte plus large de discussions sur la valorisation du fait-maison. En début d’année, les organisations professionnelles avaient déjà exprimé leur opposition à une proposition de loi qui visait à signaler les plats « non faits maison » dans les restaurants. Selon eux, une telle mesure serait contre-productive et stigmatisante. « Pointer du doigt, ça n'a pas de sens », a affirmé Thierry Marx, qui milite pour une loi-cadre sur le sujet.
Les restaurateurs espèrent désormais obtenir un arbitrage favorable dans les prochains jours. Mais la situation reste tendue, d’autant plus que l’ancien député Christopher Weissberg, rapporteur de la proposition de loi sur le fait-maison, vient d’être nommé à un poste influent au sein du groupe Bertrand.