La capitale tchèque interdit les virées nocturnes organisées pour attirer des visiteurs plus raffinés et cultivés, au grand dam des amateurs de fêtes.
Prague met fin aux tournées des bars pour attirer des touristes plus cultivés
Prague, connue pour ses prix attractifs en matière d'alcool et ses soirées festives, veut désormais changer de cap. Le conseil municipal a voté, le 14 octobre, l’interdiction des tournées de bars organisées la nuit dans la capitale. Ces « pub crawls », particulièrement prisés des touristes étrangers, notamment britanniques, ne seront plus permis entre 22 heures et 6 heures du matin.
À Prague, moins d'alcool et plus de patrimoine
Cette décision marque un tournant dans la stratégie touristique de Prague, une ville où la bière est souvent moins chère que l’eau. Selon Jiri Pospisil, conseiller municipal, la ville est « à la recherche d’un touriste plus cultivé, plus riche […] et non pas d’un touriste qui vient pour une courte période uniquement pour s’enivrer ». Les habitants de la capitale, exaspérés par les comportements bruyants et les débordements nocturnes, espèrent que cette mesure redonnera du calme à la ville.
Si la mesure a été bien accueillie par les acteurs locaux du secteur hôtelier, tels que Vaclav Starek, directeur de l’association des hôtels et restaurants, certains restent sceptiques quant à son efficacité. Ce dernier a confié à l’AFP : « Personne ne se verra interdire d’aller dans un pub, mais ces tournées organisées tous les soirs ne sont pas nécessaires. Cela devenait surtout un problème pour la population locale et pour les autres touristes. » Il souligne toutefois que cette interdiction ne devrait pas avoir d'impact négatif sur les ventes d'alcool.
D’autres experts du tourisme, comme Jean-Pierre Mas, président des entreprises de voyage, se montrent plus critiques. Pour lui, cette décision relève davantage d’un coup marketing que d’une véritable transformation du paysage touristique de Prague. Il souligne que « chasser les tournées de bars » ne suffira pas à attirer davantage de visiteurs dans les musées et autres attractions culturelles de la ville. « Beaucoup de touristes faisaient probablement les deux - visiter le jour et faire la fête la nuit », rappelle-t-il à 20 Minutes.
Une tendance européenne à plus long terme
Prague n'est pas la seule ville européenne à tenter de réorienter son tourisme. D'autres capitales, telles que Cracovie ou Barcelone, luttent contre les nuisances liées à un tourisme de masse alimenté par les vols à bas prix. Ces villes cherchent à attirer une clientèle plus aisée, moins nombreuse mais offrant des retombées économiques similaires.
Le phénomène est en progression depuis quelques années. Les grandes villes européennes veulent « monter en gamme » dans leur clientèle touristique. Les politiques tarifaires, comme des hausses de prix sur les locations ou l’accès à certaines infrastructures, sont souvent mises en place pour réguler le flux de visiteurs.
Mais changer l'image d'une ville demande du temps. La réputation d'une destination ne s’efface pas facilement. Pour Prague, comme pour d'autres villes cherchant à faire évoluer leur modèle touristique, le défi sera de transformer durablement l'image de capitale festive en celle de centre culturel prisé, tout en préservant l'essence même de ce qui a fait son succès.
Avec cette mesure, Prague envoie un message clair : l’époque des fêtes effrénées pourrait bien toucher à sa fin. Mais le pari est risqué : la capitale saura-t-elle séduire un nouveau type de visiteur, plus raffiné, sans pour autant perdre son attrait auprès des amateurs de bière ?