France Travail : un bond statistique programmé
Depuis le 1ᵉʳ janvier 2025, 1,2 million de nouvelles personnes sont automatiquement inscrites dans les registres de France Travail. Les allocataires du RSA, leurs conjoints, les jeunes en contrat d’engagement ou encore ceux en parcours contractualisé, se voient propulsés dans un nouveau cadre d’accompagnement. Sans aucune démarche à entreprendre, ces publics reçoivent directement leur confirmation d’inscription.
Cependant, cet afflux massif ne reflète pas uniquement un progrès administratif. Les chiffres du chômage, mécaniquement gonflés, risquent de susciter des interprétations biaisées et pourraient affecter le marché de l’emploi.
Au cœur du dispositif, le contrat d’engagement constitue un outil clé. Après un entretien de diagnostic, chaque nouvel inscrit se voit proposer un parcours personnalisé. Entre formations, stages d’immersion ou ateliers pratiques, les bénéficiaires sont accompagnés pour retrouver une activité professionnelle.
Mais ce contrat est assorti d’obligations strictes. Quinze heures hebdomadaires d’activités deviennent la norme. Pour les plus vulnérables, comme les parents isolés ou les personnes en situation de handicap, des ajustements sont prévus. Les activités incluent des formations, des découvertes de métiers, des démarches pour accéder à ses droits, des candidatures et des ateliers pour trouver un emploi.
Loi plein emploi : un levier d’insertion… ou une contrainte ?
La philosophie de la loi repose sur un postulat : l’activité, même partielle, est un levier d’insertion sociale et professionnelle. Mais pour certains, cette obligation heurte les principes fondamentaux. La Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) a exprimé ses réserves, estimant que le dispositif pourrait compromettre « le droit à des moyens convenables d’existence », inscrit dans le Préambule de la Constitution de 1946. Alors que 54 % des allocataires du RSA ayant testé le dispositif ont retrouvé un emploi en un an, à quel prix obtient-on ces résultats ?
Le gouvernement Borne, qui a fait passer la loi en 2023, affichait un objectif clair : ramener le taux de chômage à 5 % d’ici à 2027, pour la fin du second quinquennat d'Emmanuel Macron. Mais avec un chômage actuel de 7,4 %, soit 2,3 millions de personnes, l’arrivée massive de nouveaux inscrits complexifie les perspectives.
Dans les 49 départements où la réforme a été expérimentée, les résultats sont encourageants, mais pas exempts de critiques. Si l’efficacité de France Travail semble prouvée, des questions subsistent sur la pérennité de ces retours à l’emploi et leur réelle qualité.