Imaginez un instant égarer un petit billet de vingt euros. Frustrant, n’est-ce pas ? Maintenant, imaginez que ce ne soit pas vingt euros, mais quarante milliards ! C’est précisément ce qui vient de se passer dans les couloirs de Bercy, où l’on vient de réaliser que les prévisions fiscales pourraient bien être comparées à des prédictions de cafédomancie.
Perdu 40 milliards d’euros, écrire au journal qui transmettra
Comment est-il possible que la Direction du Trésor ait tant surestimé les recettes fiscales ? Pour l'année 2024, la réalité des chiffres montre un déficit de plus de 40 milliards d'euros par rapport aux attentes initiales. L'Institut des politiques publiques (IPP) a étudié les défaillances dans les estimations gouvernementales des revenus provenant de l'impôt sur les sociétés.
Chronique d'un optimisme fiscal malavisé
D'une année sur l'autre, les prévisionnistes de notre ministère semblent jouer aux devins avec l'argent du contribuable, révisant leurs prédictions de l'impôt sur les sociétés (IS) toujours à la baisse, et ce, systématiquement chaque automne. Surprenant ? Peut-être pas tant que ça. Laurent Bach, économiste, a mis le doigt là où ça fait mal : ces erreurs ne sont pas des cas isolés mais une véritable tradition. « Sur cette même période, les recettes d'IS ont été supérieures aux prévisions plus d'une année sur trois », écrit-il dans des propos rapportés par Les Echos. En 2024, un tiers de l'erreur de prévision est attribuable à cet IS capricieux, qui ne représente pourtant que 5% des recettes.
Le deuxième coupable de ce drame financier serait le bénéfice fiscal des entreprises, qui semble avoir plus de hauts et bas qu'une série Netflix. Quand l'économie tousse, les comptes des entreprises ne se contentent pas de frissonner mais grelottent carrément. Laurent Bach note également un petit jeu de trésorerie où les entreprises, anticipant les mauvais jours, réduisent leurs acomptes. En 2024, ce manège financier a coûté 14,5 milliards d'euros de recettes en moins que prévu, une somme qui aurait permis de financer quelques lignes de métro supplémentaires, ou même de réparer quelques écoles.
Des améliorations possibles ?
Heureusement, tout n'est pas perdu. L'État pourrait limiter ces risques financiers en exigeant des paiements plus immédiats d'IS, notamment des entreprises qui n'ont pas de soucis de trésorerie. De plus, pourquoi ne pas utiliser davantage les données des relevés de TVA ou celles de la future facturation électronique pour affiner ces prévisions ? Il semble que même TotalEnergies avait donné un indice sur son bénéfice fiscal bien avant le chaos de fin d'année. Peut-être est-il temps pour Bercy de s'inspirer de ces méthodes plus proactives.
Il est difficile d'estimer l'impact de ces 40 milliards d'euros manquants. Cet argent, qui aurait pu servir à améliorer les infrastructures ou à soutenir des programmes sociaux vitaux, est désormais un trou noir dans les comptes publics. Le hic, c’est que ce manque à gagner a des répercussions directes sur la vie quotidienne des citoyens. Les budgets pour la santé, l’éducation ou encore le développement durable pourraient se retrouver sur le billot à cause de ces erreurs de calculs. Finalement, ce sont les contribuables qui en font les frais, subissant les conséquences de prévisions trop souvent peintes en rose par nos experts financiers.