La promesse d’une transition énergétique accessible se fissure, entre ambitions écologiques et calculs budgétaires. Derrière le vernis des aides à l’autoconsommation, un nouvel arrêté vient rebattre les cartes du soutien au photovoltaïque résidentiel. Qui y gagne ? Qui y perd ? Suivez les rayons… ou leur disparition.
Panneaux photovoltaïques : autoconsommer l’électricité oui, la revendre c’est terminé !

La descente aux enfers des aides au photovoltaïque pour les particuliers
Le vendredi 28 mars 2025, un arrêté ministériel surnommé « S21 » entre officiellement en vigueur. Publié au Journal officiel ce 27 mars 2025, ce texte modifie radicalement les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations solaires implantées sur des bâtiments d’une puissance inférieure ou égale à 500 kilowatts-crête (kWc). Objectif affiché : recentrer les aides publiques sur l’autoconsommation et réduire l’impact budgétaire pour l’État. En ligne de mire ? Les particuliers et leurs petites installations de moins de 9 kWc.
La prime à l’investissement chute donc brutalement à 0,08 euro par watt-crête pour les foyers en vente avec injection du surplus. Quant au tarif de rachat du surplus, il tombe à 4,0 centimes d’euro par kilowattheure, contre environ 13 centimes auparavant. En parallèle, la TVA réduite à 5,5 %, censée compenser partiellement cette ponction, n’entrera en vigueur que le 1er octobre 2025. Résultat : sept mois de vide, sans amortisseur.
« Le segment résidentiel subira une division par trois des primes et tarifs le concernant », déplorent d’une même voix Enerplan et le Syndicat des énergies renouvelables (SER) dans une déclaration relayée par France Info le 27 mars 2025.
Les panneaux photovoltaïques, nouvelle victime collatérale de Bercy ?
Pour le gouvernement, il ne s’agit pas d’une régression, mais d’un ajustement. Selon Bercy, les mesures visent à réorienter les aides vers l’autoconsommation, plus vertueuse et moins coûteuse. Mais cette rhétorique peine à masquer les effets immédiats sur le terrain. Des milliers de projets chez les particuliers pourraient être gelés, repoussés ou tout simplement abandonnés.
« Il est incompréhensible que le gouvernement n’ait pas attendu l’entrée en vigueur du taux de TVA réduit afin de compenser partiellement les coupes infligées à l’autoconsommation », s’insurge Jules Nyssen, président du SER, cité par France Info le 27 mars 2025.
Ce manque de synchronisation entre les nouvelles contraintes et les allègements fiscaux jette le flou sur les intentions réelles du dispositif. D’autant que les petits installateurs, moteurs du maillage territorial, risquent une série noire de mois sans chantiers, sans visibilité, sans garanties.
Photovoltaïque résidentiel : un retour sur investissement amputé
L’argument de rentabilité des panneaux photovoltaïques, jadis martelé par les entreprises du secteur et relayé dans les campagnes de sensibilisation, s’effondre à la lumière des nouveaux chiffres. Avec une baisse combinée des primes et des tarifs de rachat, l’investissement initial devient difficilement amortissable à court ou moyen terme. Pour un foyer moyen installant 3 kWc, l’aide totale fond de plus de 1.000 euros sans compensation immédiate.
Et ce n’est pas tout : le flou persiste sur les conditions d’accès à la TVA réduite. En parallèle, le critère de « résilience industrielle » imposé à partir de juillet 2026 pour certains composants photovoltaïques ajoutera une couche supplémentaire de complexité, risquant de restreindre l’accès à des équipements importés, donc plus accessibles.
Les collectivités locales sont elles aussi concernées : les projets entre 100 et 500 kWc devront désormais fournir une caution bancaire de 10.000 euros, sauf si une délibération municipale est votée. Une barrière de plus, même si le tarif de 95 euros par mégawattheure est maintenu temporairement jusqu’au 1er juillet 2025.
L’autoconsommation, seul survivant du plan gouvernemental
Dans ce grand ménage réglementaire, seul le modèle de l’autoconsommation avec injection partielle semble tirer son épingle du jeu. C’est sur ce levier que le ministère de l’Économie fonde sa stratégie de recentrage. Mais cela suppose que les ménages soient capables d’adapter leurs usages en temps réel, d’optimiser leurs équipements et d’assumer l’investissement initial sans garantie de retour rapide.
Quant au mécanisme de l’appel d’offres simplifié annoncé pour le deuxième semestre 2025, il reste entouré d’incertitudes. « Il est impératif que le mécanisme d’appel d’offres simplifié puisse venir prendre le relais de cet arrêté tarifaire dès juillet prochain, sans quoi nous n’aurons fait que repousser cet 'effet falaise' de quelques mois », prévient Jules Nyssen, toujours dans France Info.
Panneaux photovoltaïques : rentabilité compromise, confiance brisée
Derrière les tableaux Excel des cabinets ministériels, la réalité s’impose : installer des panneaux photovoltaïques n’est plus, en l’état, une démarche rentable pour la grande majorité des particuliers. Le choc est d’autant plus rude qu’il intervient sans période de transition claire, et dans un contexte où la confiance envers les dispositifs d’aide publique s’érode.
Le secteur avait besoin de clarté, il reçoit de l’opacité. Il espérait de la stabilité, il récolte l’instabilité réglementaire. Un virage trop brusque, trop technique, trop risqué, au détriment de ceux qui croyaient, encore hier, qu’investir dans l’énergie solaire était un pari gagnant.