Pourquoi Virgin, et demain la FNAC, vont forcément fermer #BESTOF

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Par Jean-Yves Archer Publié le 9 août 2013 à 4h21

Les brillants fondateurs des groupes Carrefour (Marcel Fournier) et Edouard Leclerc (Leclerc) avaient pour devise : "tout sous un même toit". Autrement dit, l'hypermarché a été innovant par son volume et par la profondeur des gammes d'articles proposés. Nous pouvons, depuis le début des années 60, y acheter un pamplemousse rose aussi bien qu'un tube de cirage bleu ou qu'un paquet de lessive. Plus récemment, nous pouvons y trouver des rayons dédiés aux micro-ordinateurs, écrans plats, etc.

Le "tout sous un même toit" est à l'origine de la Fnac fondée notamment par André Essel et Max Théret qui ont su mettre à disposition de leurs clients des produits : appareils photo, lecteurs de cassettes – à l'époque -, et des disques et autres supports culturels tels que le livre.

Ce "tout sous un même toit" des produits culturels a rencontré un succès remarquable. La Fnac Saint Lazare était, il y a quinze ans, un des magasins les plus fréquentés de Paris. Dans le sillage du succès de "l'agitateur culturel", le groupe Virgin a implanté plusieurs magasins en France dont le Virgin Mégastore de l'emblématique avenue des Champs-Elysées, véritable temple de la consommation de produits culturels.

Avec bien entendu des recettes marketing sérieuses et éprouvées : nouveautés clairement mises en avant, produits d'appel à prix cassés selon la devise de Bernardo Trujillo qui définissait la grande distribution comme "un îlot de pertes dans un océan de profits". Et visite de célébrités en vue de séances de dédicaces, etc.

Ce business-model a été très rentable mais désormais une tenaille impitoyable s'est refermée sur ce type de magasins. D'un côté les hypermarchés ont développé des rayons culturels conséquents qui leur permettent une puissance de négociation avec les fournisseurs et donc une politique de prix agressive. D'un autre côté, la révolution du numérique a fait son œuvre. Là où nous achetions un CD sous cellophane chez Virgin, désormais nous le téléchargeons légalement via iTunes ou parfois via des sites non respectueux du droit d'auteur. La "conveniance", c'est à dire la facilité liée à l'achat est entrée dans nos domiciles et nous dispensent de trainer dans les rayons, de gérer l'attente aux caisses, etc. L'achat culturel s'est sédentarisé.

Autrement dit, la révolution du numérique a fait que le chiffre d'affaires d'enseignes comme Surcouf (placée en liquidation) Fnac (actuellement en vente) Virgin (en projet officiel de cessation des paiements) s'est inscrit en recul d'au moins 25% et parfois jusqu'à 40% dans certains magasins.

Face à l'évaporation de clientèle qui a changé de mode de consommation, le meilleur des gestionnaires est forcément dépourvu d'arguments.

Au plan social, le cas de Virgin va impliquer un peu plus de 1000 emplois qui sont clairement menacés par la décision de l'actionnaire de référence : le fonds Butler Capital Partners. En effet, il n'est pas neutre de relever que le fougueux et talentueux Richard Branson (Groupe Virgin) s'est désengagé – il y a quelques années – de ces sites de distribution.

Parallèlement, nous observons la montée en puissance d'Amazon.com qui vient de lancer la construction en Saône et Loire d'un nouveau centre logistique qui devrait employer à terme plus de 2000 personnes.

Comme Schumpeter l'a écrit, la croissance est bien un phénomène de "destruction créatrice" et la distribution spécialisée s'efface progressivement devant le e-commerce. Pour autant, tout n'est peut-être pas définitivement tranché : souvenons-nous de ceux qui annonçaient la mort certaine des grands magasins du boulevard Haussmann. En montant en gamme et en attirant une clientèle étrangère, ils ont su rebondir et trouver un nouveau business model très rentable.

Pour l'heure les salariés de Virgin sont hélas dans l'épreuve tandis qu'il se murmure que Volkswagen serait intéressé par le magnifique emplacement des Champs-Elysées...

A l'occasion de la période estivale, economiematin.fr vous propose les meilleurs articles de 2012 et 2013.
Article initialement publié le 05/01/2013

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Jean-Yves Archer est énarque ( promotion Léonard de Vinci ), économiste et fondateur de Archer 58 Research : société de recherches économiques et sociales. Depuis octobre 2011, il est membre de l’Institut Français des Administrateurs (IFA).  

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