Q1 : Si dimanche, Emmanuel Macron obtenait une très large majorité à l’Assemblée nationale, serait-ce, selon vous, une bonne ou mauvaise chose ?
- Sous total « bonne chose » : 49 %
- Sous total « mauvaise chose » : 50 %
- NSP : 1 %
50% des Français interrogés considèrent que le fait pour le Président de la République d’avoir une très large majorité dimanche prochain est une mauvaise chose (49%).
Alors que la France s’apprête à clore ce dimanche 18 juin 2017, par le scrutin du deuxième tour des élections législatives, un an de campagnes politiques et de sollicitations électorales diverses, il apparaissait particulièrement intéressant de saisir le point de vue des Français sur les résultats attendus des élections législatives.
Le premier tour fut un raz-de-marée inédit sous la Vème République. Les projections des instituts de sondages indiquent qu’il faut s’attendre à plus de 400 députés issus de la « République en Marche », le mouvement macroniste. Le PS serait réduit alors à peau de chagrin ; la seule opposition parlementaire crédible revenant au groupe LR.
Pourtant, les Français interrogés sont très partagés sur les conséquences d’une majorité pléthorique à l’Assemblée nationale. En effet, 50% d’entre eux considèrent que c’est une mauvaise chose que le président de la République dispose d’une très large majorité. Ils sont 49% à considérer que c’est une bonne chose (1% ne se prononcent pas).
Ce résultat confirme le fait que les Français sont décidément toujours partagés en deux parts égales en politique. Ils pensent que c’est une bonne chose et « en même temps », une mauvaise chose. En cela, ils adhèrent à la ligne de discours du président de la République !
Plus sérieusement, en communication, le résultat de ce sondage induit trois remarques :
- Classiquement pour un sondage qui traite d’un scrutin, il est toujours surprenant de voir des Français s’inquiéter d’un résultat et être moins de 50% à se rendre aux urnes ;
- L’abstention et les craintes des Français inspirées par les résultats de ce sondage devront être prises en compte par l’exécutif. Une majorité considérable ne sera pas pour autant un blanc-seing à la politique menée. C’est une mise en garde de la part de l’opinion publique et cette circonspection devra guider le Gouvernement dans ses premières vraies mesures ;
- Il existe en effet un vrai risque de voir l’opposition politique se déplacer de son milieu institutionnel naturel : les bancs du Parlement vers d’autres zones d’expression moins encadrées.
Quoi qu’il arrive, il conviendra d’attendre dimanche soir le résultat des élections pour savoir de quelle majorité (ou pas) disposera le Gouvernement. Ce résultat sera également un indicateur sur le traitement réservé à celui qui est déjà un trublion au sein du Gouvernement : François Bayrou.
Q2 : Au sein du gouvernement, selon vous, que faut-il privilégier ?
- La solidarité gouvernementale : 50 %
- La liberté de parole de chaque ministre : 49 %
- NSP : 1 %
50% des Français interrogés considèrent qu’il faut privilégier la solidarité gouvernementale à la liberté de parole de chaque ministre (49% considèrent le contraire, 1% ne se prononcent pas).
C’est après le différend qui a opposé par media interposés le Premier ministre et le Garde des Sceaux que cette question a été posée. Les Français interrogés sont encore une fois partagés sur le fait de savoir s’il convient de privilégier la solidarité gouvernementale ou bien de laisser la liberté de parole aux ministres.
Pour autant, c’est en termes de communication, qu’il convient d’étudier cette séquence. Elle donne trois indications sur le modus vivendi du pouvoir exécutif : Elle permet de voir que le Premier ministre se place en mode démineur des erreurs de communication des ministres, que le Garde des Sceaux souhaite occuper un statut particulier au sein de la galaxie macronienne et que le Président de la République applique à la lettre la stratégie « Jupiterrienne » du retrait et de la distance.
Si l’on va plus loin, il s’agit là de la première expression d’une tension au sein du gouvernement entre un Garde des Sceaux qui jouit d’un statut particulier auprès du président de la République et un Premier ministre qui doit asseoir son autorité sur un gouvernement composite. En effet, François Bayrou est considéré comme celui qui, par son ralliement en février 2017, a permis à Emmanuel Macron de crédibiliser sa place de favori et de prendre la tête des intentions de vote dans les sondages pour ne plus la quitter jusqu’au 7 mai. Il considère donc que son soutien lui confère une place privilégiée dans le dispositif gouvernemental.
Pourtant, à cause d’une « simple » maladresse de communication, il est passé en quelques jours du statut de « faiseur de roi » à celui de boulet, du statut de Deus ex machina politique à celui de machine à perdre des électeurs. François Bayrou en affirmant faire une différence entre son rôle de ministre, de chef de parti et de simple citoyen a commis une erreur de communication qui n’en aurait pas nécessairement été une en 1997, année où il a été ministre pour la dernière fois, avant de retrouver le chemin du gouvernement il y a un mois. Parler en son nom personnel à l’heure du quinquennat (où tout va plus vite) et des réseaux sociaux est anachronique. L’opinion publique ne fait pas de différence de fonctions et c’est là toujours la fonction la plus importante qui l’emporte : ici, celle de ministre.
De plus, ce type de position crée un hiatus de communication entre la volonté du président d’incarner la fonction qu’il occupe et son ministre qui n’occuperait la fonction que par intermittence. Pour tout cela, c’est bien à une erreur de communication que nous avons eue affaire et le Premier ministre l’a traitée comme telle en recadrant son ministre (ensuite le Garde des Sceaux en a fait une question d’ego, mais ça, c’est déjà une autre histoire).
Les résultats des élections législatives de dimanche pourraient d’ailleurs paradoxalement fragiliser la position particulière entretenue par Bayrou au sein du Gouvernement : le groupe parlementaire pléthorique de la République en Marche annoncé, pouvant probablement demeurer majoritaire sans le renfort des membres du MODEM qui seront élus sous les couleurs macroniennes. C’est peut-être pour cela que le président de la République ne s’est pas exprimé sur ce sujet. « Jupitérien », il attend dimanche soir 20h00 d’être certain d’avoir les coudées franches.