Chômage : la fausse baisse qui cache une situation de l’emploi sinistrée en France

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Par Jean-Baptiste Giraud Publié le 29 novembre 2013 à 15h02

Les chiffres du chômage publiés jeudi 28 novembre ne sont pas bons. Ils sont bien au contraire catastrophiques, révélant la profondeur de la dégradation du marché du travail. Même Libé renonce à son rôle de petit télégraphiste de l'Elysée pour dénoncer "une baisse en trompe-l'oeil".

Reprenons : les chiffres de la DARES, qui dépend du ministère du Travail mais revendique cependant son indépendance, annoncent une baisse de 0,6 % du nombre de chômeurs, soit 20 500 demandeurs d'emploi en moins. Ce sont ces chiffres qui ont permis tant au président de la République qu'à son ministre du Travail de s'autocongratuler hier, et d'annoncer la réussite de la politique de l'emploi du gouvernement.

Seulement ces chiffres sont faux, ou plus exactement, parcelaires, donc, reflet d'une certaine réalité. Oui, le nombre de chômeurs qui ne travaillent pas du tout a baissé de 20 500 au mois d'octobre dernier. Ce sont les chômeurs classés en catégorie A, ceux comptabilisés dans les études internationales pour comparer les pays entre eux. Mais le problème, c'est que les autres chômeurs, des catégories B, C, D et E, existent bien aussi. Et ces catégories explosent.

La catégorie B regroupe ceux qui ont travaillé moins de 78 heures au cours du dernier mois, et qui continuent à percevoir une indemnité (réduite) de Pôle Emploi. Leur nombre a augmenté de 3,7 % en octobre. Ce qui confirme l'augmentation de l'emploi précaire, de courte durée et/ou à temps partiel. La catégorie C, elle, rassemble ceux qui ont travaillé plus de 78 heures, mais n'ont pas repris une activité à temps plein pour autant. Ils restent donc inscrits à Pôle Emploi car ils n'ont pas trouvé le job qu'ils recherchent, et "bricolent" en attendant. Ils sont 4 % de plus en octobre.

Les chiffres du chômage ne sont pas le reflet de la réalité

Quid des catégories D et E ? Ce sont les chômeurs venant des catégories A, B ou C, qui sont en formation ou en arrêt maladie (D), ou qui cherchent toujours un emploi, mais en attendant bénéficient d'un contrat aidé (E). Si en octobre, la catégorie A a maigri de 20 500 chômeurs, ils sont 55 900 de plus en B, C, D et E.

Pire encore : si vous ajoutez à ces chiffres, le nombre de chômeurs radiés de Pôle Emploi, en augmentation de plus 33 % sur un an, et plus particuliérement de 26 % au cours du mois d'octobre (soit 10 000 radiés de plus qu'en temps normal), on ne peut que s'inquiéter de l'objectivité des données compilées par la DARES. Saupoudrez le tout de quelques milliers de contrats aidés pour la jeunesse (80 000 depuis le début de l'année, les fameux emplois d'avenir), et l'on comprend aisément que le chômage, loin de baisser, continue à augmenter. Ce sont les chômeurs comptabilisés qui disparaissent, pas les personnes en recherche d'emploi.

Un signe qui ne trompe pas : l'effondrement du volument d'heures déclarées dans le secteur des services à la personne : - 8 % depuis le début de l'année, sur un volume de 1,7 milliard d'heures travaillées par an. Autant dire que des dizaines de millions d'heures de travail au noir remplacent tous les mois des dizaines de millions d'heures de travail déclaré.

L'emploi saisonnier en forte hausse en octobre 2013 à cause des... vendanges

Pour terminer de plomber la fête des chiffres du chômage, rappelons que le mois d'octobre, comme le mois de septembre (dont les chiffres ont été faussés par un bug informatique...) est réguliérement baissier en raison des emplois saisonniers que créent les vendanges. Dans les régions viticoles - La France est deuxième producteur mondial de vin cette année, derrière l'Italie), le chômage baisse de plusieurs points : En Côte d'Or par exemple, ou se récoltent les grands Bourgogne, le chômage est en baisse de 8, 6 %. Sauf que les vendangeurs, déclarés pour l'occasion, vont retourner dans les statistiques du chômage dès le mois prochain.

Au total, en France, en novembre 2013, dom-tom compris, Le nombre de chômeurs atteint 5 946 600, toutes catégories confondues.

Les vrais chiffres du chômage en France en 2013 :

A : 3 275 200 -0,6 % (+ 6 % sur 1 an)
B : 651 200 +3,7 % (+ 8,7 % sur 1 an) moins de 78 heures déclarées par mois indemnisé

C : 946 600 +4 % (+ 8,5 % sur 1 an) plus de 78 heures déclarées, non indemnisé

D : 279 200 +3,1 % (+ 7,9 % sur 1 an) arrêt maladie, formation

E : 366 700 +2,2% (+ 2,8 % sur 1 an) contrats aidés.

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Photo Jean Baptiste Giraud

Jean-Baptiste Giraud est le fondateur et directeur de la rédaction d'Economie Matin.  Jean-Baptiste Giraud a commencé sa carrière comme journaliste reporter à Radio France, puis a passé neuf ans à BFM comme reporter, matinalier, chroniqueur et intervieweur. En parallèle, il était également journaliste pour TF1, où il réalisait des reportages et des programmes courts diffusés en prime-time.  En 2004, il fonde Economie Matin, qui devient le premier hebdomadaire économique français. Celui-ci atteint une diffusion de 600.000 exemplaires (OJD) en juin 2006. Un fonds economique espagnol prendra le contrôle de l'hebdomadaire en 2007. Après avoir créé dans la foulée plusieurs entreprises (Versailles Events, Versailles+, Les Editions Digitales), Jean-Baptiste Giraud a participé en 2010/2011 au lancement du pure player Atlantico, dont il est resté rédacteur en chef pendant un an. En 2012, soliicité par un investisseur pour créer un pure-player économique,  il décide de relancer EconomieMatin sur Internet  avec les investisseurs historiques du premier tour de Economie Matin, version papier.  Éditorialiste économique sur Sud Radio de 2016 à 2018, Il a également présenté le « Mag de l’Eco » sur RTL de 2016 à 2019, et « Questions au saut du lit » toujours sur RTL, jusqu’en septembre 2021.  Jean-Baptiste Giraud est également l'auteur de nombreux ouvrages, dont « Dernière crise avant l’Apocalypse », paru chez Ring en 2021, mais aussi de "Combien ça coute, combien ça rapporte" (Eyrolles), "Les grands esprits ont toujours tort", "Pourquoi les rayures ont-elles des zèbres", "Pourquoi les bois ont-ils des cerfs", "Histoires bêtes" (Editions du Moment) ou encore du " Guide des bécébranchés" (L'Archipel).

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