Nul n’est là pour contester la nécessité de porter secours à des personnes, des familles et des enfants fuyant leur ville, leur village et leur pays sous la pression de la guerre, de la barbarie, du terrorisme ou par maltraitance permanente ou contraints à l’exil par la sécheresse et par des catastrophes naturelles.
L’année 2015 dépasse le million de « migrants », principalement des « réfugiés », l’amplification du mouvement n’est pas à contester. Ceci étant dit. L’Union européenne est loin de s’accorder sur la ligne de conduite à suivre. Personne n’est prêt…
En ce qui concerne la Syrie, le Liban, la Jordanie et la Turquie accueillent au total plus de 4 millions de réfugiés. En plus, 8 millions de syriens sont « déplacés » sur leur propre territoire. A ce jour, s’ajoutent d’autres « migrants » d’Irak, d’Afghanistan, du Pakistan. Un demi-million de « migrants » en provenance d’Afrique centrale et de l’Ouest via la Lybie, comme de la Somalie, du Soudan ou de l’Erythrée complète le tableau.
Cette année pour 1 million de « migrants » ou de « réfugiés », on peut estimer le coût de ces transits à plus de 5 milliards d’euros ! Quant au nombre de victimes, il dépasse déjà les 3000.
Le jeu des mots et des qualificatifs
Devant l’afflux croissant de populations fuyant leurs pays, les politiques européens cherchent à se sortir d’une situation critique sans idée stratégique « affichée » pour traiter le problème à son origine ! En ont-ils une ou pas, nous ne le saurons pas. Au début, il y a quelques mois, traversant la Méditerranée à partir de la Lybie, les « passants » étaient appelés des « immigrés ». Avec leur nombre croissant, on les a qualifiés de « migrants ». Arrivant, sains et saufs, par dizaines de milliers cet été dans l’espace Schengen, par l’Italie et surtout la Grèce, via la Turquie, les rescapés vont être qualifiés soit de « réfugiés », soit de « migrants ».
Maintenant, on parle, d’une part de « réfugiés de pays en guerre » ou de « réfugiés déplacés, contraints au départ » qui pourront faire des demandes de droit d’asile, d’autre part de « migrants économiques » qui devront être identifiés, puis reconduits en grande partie dans leur pays d’origine. Un autre qualificatif celui de « réfugiés de guerre » est évoqué ! Sans parler des centaines de milliers de demandeurs d’asile qui n’auront pas obtenu satisfaction et qui risquent de rester clandestinement sur les territoires, dans l’espace Schengen.
A chacun son initiative, dans une Union européenne qui s’ignore
Jean-Claude Juncker, président de la Commission de Bruxelles, propose des « quotas », tout en parlant de « répartition » et définit les règles avec un total de 160.000 réfugiés. La chancelière Angela Merkel propose que l’Allemagne prenne le leadership de cette opération. Elle se veut un modèle. C’est un « appel d’air aux réfugiés ». Le président François Hollande engage la France avec un chiffre de 24.000 accueils sur 2 ans. L’Italie et la Grèce sont déjà au labeur. L’Espagne accepte son « quota » tout comme l’Irlande. Le Royaume-Uni et le Danemark disposent d’un droit de retrait des politiques européennes et ne sont pas concernés par ces « quotas ».
La Suède est ouverte avec nuances. L’Autriche est réticente. La Hongrie, la Pologne, la République Tchèque, la Slovaquie et la Roumanie, pour ne citer qu’eux, sont hostiles. Les pays de l’Est jouent un rôle de transit. Ne posons pas la question à l’Estonie et à la Lettonie ? Pour information, la Norvège et la Suisse, associés à l’UE, y sont favorables. A noter les 20.000 syriens « réfugiés » acceptés en dernière minute, d’ici septembre 2016, par le président Barack Obama aux Etats-Unis sur un total de 100.000 « réfugiés » annuels.
Le cas particulier de l’Allemagne, déjà débordée…
L’Allemagne a pris l’initiative et annoncé l’accueil potentiel de 800.000 « migrants » en 2015, dont une grande partie de « réfugiés ». Plus de 460.000 sont déjà en Allemagne depuis le début janvier. Au-delà de l’opération humanitaire, pour les spécialistes économiques, l’attitude de l’Allemagne n’est pas surprenante. Avec un taux de fécondité de 1,4 (à comparer au 2,01 de la France), elle s’inscrit dans le développement d’une politique d’immigration poussée, composée entre autres d’Espagnols, d’Italiens, de Grecs et de Turcs, depuis des années, associée à l’utilisation de travailleurs détachés et à la création de mini-jobs. Le besoin de main d’œuvre est affiché. La situation politique et économique en Allemagne ne peut pas servir de référence pour l’ensemble des pays de l’Union et surtout de la zone euro.
Comparaison n’est pas raison
Mais très vite le réel reprend le dessus. L’Allemagne se trouve débordée, ce qui était prévisible. Elle décide dans l’urgence de rétablir les contrôles à sa frontière avec l’Autriche et interrompt aussi provisoirement le trafic ferroviaire. La République tchèque fait de même. Très vite la politique du « comparatif » est à nouveau à l’ordre du jour. Devant l’ampleur des arrivées, l’Allemagne dépassée accuse maintenant ses partenaires de ne pas faire assez d’efforts et veut proposer à la Commission européenne des sanctions financières pour les réticents. Non seulement, l’Allemagne prend ses décisions seules, sans consultation de ses partenaires avant de se servir, mais veut imposer sa politique sans reconnaître ses excès !
Dans l’immédiat et dans la pratique, l’UE qui cautionne la solidarité du « chacun pour soi » n’est pas prête à répondre à cette forte montée continue d’arrivée de « migrants » qu’elle se propose de « trier » et de « qualifier » avant de se décider à les renvoyer dans leur pays d’origine !