La « normalisation » de la politique monétaire ouvre une période cruciale et rien n’assure qu’elle se déroulera sans accroc pour les banques et donc la sécurité de vos dépôts.
Comme il vaut mieux prévenir que guérir, je vous propose de débuter par un tour d’horizon de ce qui se profile au niveau communautaire en matière de protection des dépôts et de l’épargne.
De la planche à billets au gel du système ?
Dans son livre En marche vers la faillite, Jim Rickards explique qu' « en gros, les responsables politiques peuvent réagir de deux façons lorsque tout le monde veut récupérer son argent. La première consiste à faire en sorte que l’argent soit facilement disponible, en actionnant la planche à billets autant que nécessaire pour satisfaire la demande. […] La seconde approche consiste à déclarer que l’on ferme ou gèle le système. Une fermeture totale consiste à fermer les banques, les places boursières, et à ordonner aux gestionnaires d’actifs de ne pas vendre. » Alors qu’en 2008, les autorités ont réagi en inondant les marchés de liquidités, « il semblerait que les Etats anticipent la prochaine crise en mettant au point la seconde approche », estime Jim Rickards.
Pour l’Union européenne, le gel des dépôts n’est plus un tabou
La nouvelle a fait grand bruit cet été : Reuters a révélé le 28 juillet que la présidence estonienne du Conseil de l’Union européenne (UE) planche sur un projet de mécanisme permettant de geler les comptes bancaires pour prévenir une panique, un bank run. Bien sûr, dans les discours officiels, il s’agit simplement d’augmenter la résistance d’un secteur bancaire sous contrôle et en aucun cas d’avoir un interrupteur on/off à portée de main en cas de panique. Dans un document daté du 10 juillet, la présidence envisage un blocage des dépôts d’une durée de cinq jours ouvrés reconductible mais limitée à 20 jours « en cas de circonstances exceptionnelles » (était-il vraiment nécessaire de faire un distinguo ?).
Rassurez-vous, comme la présidence ne voudrait pas priver les citoyens européens que vous êtes des joies des files d’attentes dignes des pays en faillite, elle recommande de leur réserver la possibilité de retirer une somme minimale pour couvrir leurs besoins les plus pressants. Il y a néanmoins peu de chances que cette idée revienne sur le devant de la scène avant le 31 décembre, date à laquelle l’Estonie passera la présidence à la Bulgarie.
Tout d’abord, l’Association des marchés financiers européens (AFME) elle-même s’est prononcée en défaveur de cette idée dans un rapport publié au mois de juin. L’AFME craint en effet que l’instauration d’un tel mécanisme n’aboutisse à l’exact inverse de l’effet recherché, à savoir à des retraits encore plus précoces. En somme, on aimerait beaucoup disposer d’un cadre légal pour vous spolier tranquillement, mais cela serait tout de même plus pratique si vous jouiez le jeu. Voilà de quoi motiver les épargnants à la recherche de moyens de paiement débancarisés… Par ailleurs, la Commission européenne a présenté le 11 octobre sa nouvelle proposition pour avancer en direction d’une union bancaire européenne.
Vers une garantie européenne des dépôts a minima en cas de faillite ?
Le projet d’union bancaire européenne est dans l’impasse depuis fin 2015. Face au stock de créances douteuses détenues en particulier par les banques du sud de l’Europe, l’Allemagne s’oppose catégoriquement à une mutualisation du système. Compte tenu des réticences allemandes, la Commission a revu sa copie et a présenté le 11 octobre un nouveau projet de Système européen de garantie des dépôts (SEGD). Exit le fonds européen de garantie des dépôts qui devait voir le jour en 2024, comme le voulait la version initiale du projet présentée le 24 novembre 2015. Désormais, en cas de faillite bancaire, l’UE interviendrait au travers d’un fonds européen qui ferait partiellement crédit au fonds de garantie national si celui-ci devait se révéler insuffisant.
On est bien sur une union bancaire a minima, puisque les pertes ne seraient plus mutualisées à l’échelle de l’UE. En effet, seule la liquidité serait assurée au niveau communautaire, et ce de manière temporaire et sous forme de prêt, les banques détenant le plus de créances douteuses devant nettoyer leur bilan avant 2021 pour rester éligibles à ce dispositif.
Berlin toujours intraitable face aux concessions de Bruxelles
Ce nouveau projet est-il suffisamment expurgé de solidarité pour le gouvernement allemand ? Nein ! « Les propositions de la Commission ne suffisent jusqu’ici absolument pas », a déclaré à l’AFP un porte-parole du ministère allemand des Finances.
Faudra-t-il qu’Emmanuel Macron propose de « transférer à des organismes européens non élus la souveraineté militaire française contre une promesse par l’Allemagne de financer nos déficits budgétaires et notre système social », tel que le craint Charles Gave ? Nul doute que Bruxelles validerait ce STO nouvelle facture si c’était le moyen de créer un super ministère des Finances, un budget, voire un Parlement propre à l’Eurozone, dont l’union bancaire n’est qu’un préalable…
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