Union bancaire : non à la supervision des banques par la BCE

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Par Jézabel Couppey-Soubeyran Modifié le 5 novembre 2012 à 9h43

L’Europe a besoin d’une Union bancaire et plus précisément d’un système européen de superviseurs, de même qu’il existe depuis 1999 un système européen de banques centrales.

C’est d’ailleurs au même moment qu’auraient dû être mis en place les deux dispositifs indispensables à la stabilité monétaire et financière de la zone euro. Mieux vaut tard que jamais ! La crise financière doublée d’une crise de la dette et des institutions de la zone euro pousse à l’Union bancaire. Ce projet devrait débuter en 2013 par la mise en place d’un superviseur commun aux 6000 banques de la zone euro.

Sont ensuite prévus une garantie européenne des dépôts et un dispositif commun de résolution des faillites. C’est à la BCE que la Commission européenne entend confier la mission de supervision. Il est bien que la BCE s’implique davantage dans la stabilité financière qui n’entrait pas dans ses missions avant la crise. Comme d’autres, la BCE estimait qu’il suffisait de contrôler l’inflation pour obtenir la stabilité financière. Cela n’a pas été le cas: l’inflation était certes maitrisée mais les bas taux d’intérêt que cela autorisait ont favorisé la prise de risque des établissements bancaires et la hausse des prix d’actifs.

Ni les banques centrales, ni les autorités de surveillance, n’ont pris la mesure du danger, s’estimant sans doute capables d’éteindre l’incendie après coup. La crise a fait réaliser aux banques centrales que leur plus vieille mission, celle qui a présidé à leur création, ne pouvait plus être ainsi reléguée au second plan. Mais quelle mission faut-il confier à la BCE en matière de stabilité financière ? Par nature, une banque centrale n’est pas un bon micro-superviseur.

La culture que lui confère la conduite de la politique monétaire est bien plus "macro" que "micro". Certains pays ont certes fait le choix de confier la supervision bancaire à leur banque centrale. Mais en général, il s’agit soit de vieux modèles de supervision qui ne se sont pas adaptés aux évolutions de la sphère financière (pays d’Europe du Sud), soit de pays en développement pas assez dotés en capital humain pour faire fonctionner une autorité de supervision indépendante de la banque centrale.

De plus, là où la banque centrale supervise, elle se limite souvent aux banques. D’autres instances se chargent alors de surveiller les assurances, les fonds d’investissements, les bourses. Quid en Europe de la surveillance commune des assurances, des fonds d’investissement, des bourses ? Il serait peu logique de confier cette supervision à l’EIOPA et à l’ESMA alors que l’EBA, créée au même moment en 2011, n’est soit disant pas faite pour superviser mais pour réglementer.

Certes, en l’état actuel des institutions européennes, seule la BCE a la crédibilité nécessaire pour assumer cette mission de supervision. Mais en lui confiant cette mission microprudentielle, il deviendra plus difficile, au risque de concentrer en son sein trop de pouvoirs qui pèseront sur sa légitimité démocratique, de lui confier une mission macroprudentielle de surveillance globale (du cycle du crédit, des prix d’actifs, …) bien plus en phase avec sa culture macro.

Pourtant, comme la crise l’a démontré, la vigie qui garantira la stabilité financière devra marcher sur deux jambes : l’une microprudentielle pour prévenir les risques individuels, l’autre macroprudentielle pour prévenir le risque systémique. L’Europe risque donc de boiter encore longtemps !

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Jézabel Couppey-Soubeyran est maître de conférences à Paris I Panthéon-Sorbonne. Elle enseigne notamment les théories et mécanismes monétaires en deuxième année de Licence, les systèmes financiers en Master 2 Recherche et la supervision prudentielle en Master 2 Professionnel. Elle est l'auteur de "Monnaie, banques, finances" aux Editions Licence PUF.

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