Les ministres des Finances de l’Union européenne se réunissaient mardi pour définir le cadre de la future union bancaire. Malgré l’optimisme et la satisfaction affichés, Pierre Moscovici déclarant même que « 95% du chemin » avait été fait, de nombreuses incertitudes planent toujours sur le projet. Et il faut bien le dire, les conditions posées par Berlin mettent clairement en danger l’union bancaire.
L’union bancaire constitue, en théorie, une étape déterminante pour l’Union européenne. Elle permettrait la mise en place d’un mécanisme unique de résolution lorsque des établissements financiers se retrouvent en difficulté sur le plan financier. Ce mécanisme reposant sur un fonds financé par les banques elles-mêmes, il éviterait aux citoyens de devoir payer pour les erreurs des banquiers.
Des avancées lors de la réunion des ministres des Finances
La réunion des ministres des Finances des pays membres de l’Union européenne, organisée mardi 10 décembre, a conduit à plusieurs avancées sur le projet. Alors que l’Allemagne s’y opposait jusque-là, il a été décidé qu’une autorité européenne, placée sous l’autorité de la Commission européenne, et chargée de statuer sur le sort des banques en difficulté, verra bien le jour.
Alors que Berlin refusait également toute mutualisation des efforts pour venir en aide aux systèmes bancaires nationaux, un accord autour de la création d’un fonds unique alimenté par les banques de la zone euro, a été trouvé.
De lourdes contreparties pour ces « concessions » allemandes
Le problème vient du fait qu’en échange de ces « concessions », Berlin a réussi à obtenir de très importantes contreparties. Si bien que même si un accord définitif est trouvé le 18 décembre, lors de la prochaine réunion des ministres des Finances européens, il est fort probable que l’Union bancaire constituée ne soit pas à la hauteur de l’enjeu qu’elle représente.
La volonté de Berlin de protéger à tout prix ces intérêts, pourrait finalement vider de toute substance le projet d’union bancaire. La mutualisation des effort ne pourrait être que théorique.
L’Allemagne pourrait bénéficier, de fait, d’un droit de veto
Même si pour Pierre Moscovici seuls des détails « techniques et juridiques sont à régler », le chemin est encore long avant que le projet, même imparfait, n’aboutisse. La question du mode de gouvernance se pose ainsi avec acuité.
Berlin souhaiterait que le Conseil des ministres ait le dernier mot sur la décision de sauver ou non une banque en cas de désaccord entre la Commission et l’autorité européenne de résolution. Les gouvernements garderaient donc une possibilité d’imposer leur choix sur le sort d’une banque.
De plus, L’Allemagne souhaite également que son poids au sein de l’autorité de résolution lui permette de s’opposer au sauvetage d’une banque si elle le désire.
Que fait-on avant que le fonds soit effectif ?
Le fonds unique créé sera alimenté par les banques. Mais il faudra attendre une dizaine d’années pour qu’il soit suffisamment abondé, et donc, en mesure d’être utilisé. La question de la période de transition se pose donc. Plusieurs pays, dont la France, souhaitent que le mécanisme européen de stabilité (MES) soit utilisé.
Côté allemand, on juge cette possibilité inacceptable. Le MES, alimenté par tous les pays européens, ne doit pas être détourné de sa fonction première, à savoir, aider les Etats en difficulté qui en feraient la demande (et devraient se plier à certaines conditions pour obtenir l’aide). Une autre façon d’éviter d’impliquer le contribuable allemand dans un effort mutualisé pour aider les banques.
Un système de « compartiments » pour éviter la mutualisation
Le mécanisme mis en place pourrait, dans les faits, être très éloigné de la mutualisation des risques attendue à l’origine. Le fonds devrait, en réalité, être compartimenté. Cela signifie que lorsqu’une banque devra être sauvée, le compartiment du pays concerné sera vidé avant que les compartiments des autres pays ne soient sollicités.
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