Unesco : les Etats-Unis pourraient remettre la main à la poche

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Par Christophe Auperin Modifié le 24 février 2014 à 10h37

A l’image des Nations Unies, l’Unesco comprend plus de 190 Etats membres représentants une mosaïque de peuples rassemblés dans cette enceinte où les outils d’échanges culturels participent à la paix à travers le monde. Un espace pacificateur donc, mais qui n’est malheureusement pas à l’abri de soubresauts où financements et politiques s’emmêlent. Après avoir déploré le retrait des Etats-Unis en 2011 à la suite de l’adhésion de la Palestine, la directrice générale de l’Unesco, Irina Bokova, pourrait finalement vaincre les incompréhensions et tourner la page de ce bien mauvais chapitre.

Le financement de l’Unesco mis à mal par les Etats-Unis

Admise à l’Unesco en tant qu’Etat membre fin 2011, la Palestine a accompli un pas de géant à l’échelle diplomatique. Reconnue par ses pairs, la Palestine parle d’égale à égale au sein de l’institution qui cherche à « construire la paix dans l’esprit des hommes et des femmes ». Si cette adhésion a été saluée par une large majorité, elle s’est traduite par des lendemains très difficiles pour l’Unesco qui s’est vue privée des financements américains et israéliens. Courroucés par cette évolution, les deux pays ont décidé de ne plus financer une institution dont le budget reposait sur eux à hauteur de 22 %.

Ainsi, du jour au lendemain l’Unesco s’est vue amputée de 65 millions de dollars et ce sont les programmes financés par l’institution qui en ont pâti. L’institution a connu des mois difficiles et seuls un activisme de tous les instants et la volonté inébranlable de faire vivre la paix ont permis de se sortir de cette mauvaise passe. Un fonds d’urgence a été mis en place et des pays comme la Turquie et le Qatar ont permis de colmater les brèches. L’émirat a donné pas moins de 26,3 millions de dollars rien que pour l’exercice 2012.

Si l’attitude d’Israël et des Etats-Unis est contestable, Washington a mis en avant sa législation qui lui interdit de financer une agence de l’ONU qui admet en son sein des organisations ou des groupes qui ne disposent pas de « tous les attributs internationalement reconnus d’un Etat ».

La fin de la politique de la chaise vide ?

Désengagés financièrement depuis 2011, les Etats-Unis et Israël s’interrogent sur la pertinence de leur politique. S’il est vrai qu’un revirement israélien est aujourd’hui très peu probable, le discours commence à changer à Washington, car en ne finançant plus l’agence onusienne, les Etats-Unis viennent de perdre leur droit de vote. Un coup dur pour un pays qui tire une partie de sa puissance de son soft power. L’URSS avait pratiqué une politique assez semblable au début des années 1950 à l’ONU avant de se rendre compte que dans toute organisation internationale, il est toujours plus constructif de participer que de s’exclure.

L’ambassadrice des Etats-Unis auprès des Nations Unies s’est d’ailleurs exprimée publiquement via les réseaux sociaux pour regretter que son pays ne dispose plus de droit de vote à l’Unesco. La diplomate en appelle au Congrès pour changer la loi et permettre aux Etats-Unis de retrouver son rang au sein de l’institution. Un appel entendu par Irina Bokova qui a tenu à souligner que dans toute cette histoire « Il ne s’agit pas simplement de financement, il s’agit de valeurs ».

La polémique d’arrière-garde lancée par BHL

Des valeurs pas toujours comprises par certains qui se plaisent à mettre de l’huile sur le feu. En effet, si l’année 2013 s’est achevée sur des signes d’espoir pour un retour à la normale, l’année 2014 débute par une polémique fabriquée par Bernard Henri-Levy. Ce dernier, en se répandant dans la presse pour dénoncer l’annulation de l’exposition « Les gens, le Livre, la Terre : la relation de 3 500 ans du peuple juif avec la Terre sainte » jette un froid et ravive inutilement des tensions qui allaient en diminuant. Tout d’abord,l’exposition n’a pas été annulée, mais reprogrammée au moins de juin comme l’a indiqué à plusieurs reprises la directrice générale de l’Unesco. De plus, à sous-entendre qu’une telle décision est placée sous le signe de l’antisémitisme et du négationnisme, Bernard Henri-Levy se discrédite (une fois encore). Crier au loup à tort et à travers ne peut rien apporter de bon, bien au contraire.

Si BHL avait suivi la vie de l’Unesco depuis 2011, peut-être aurait-il vu que certains programmes ont dû être annulés, d’autres suspendus ou reprogrammés. Tout cela à cause d’une décision politique bien mal venue. Malheureusement l’exposition sur le peuple juif n’est pas la première à subir les affronts d’un financement devenu difficile et s’il faut s’enflammer sur quelque chose, c’est bien sur la position américaine qui met à mal une agence onusienne dont le travail est remarquable depuis de longues années. La situation a des chances de s’améliorer et personne n’a besoin d’un intellectuel qui vienne souffler sur les braises de la discorde. Israël et la Palestine méritent mieux, tout comme le monde et la grande institution qu’est l’Unesco.

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Conseiller en fusion-acquisition dans un cabinet d'accompagnement personnalisé dans la cession d'entreprises, Christophe Auperin s'intéresse de près aux mouvements des marchés, dont il aime, en bon sismologue de la finance, pressentir les oscillations à venir. 

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