La mission d’information sur le marché de l’art de l’Assemblée nationale vient de rendre public son rapport qui préconise l’adoption de vingt-huit mesures pour soutenir l’activité artistique française et son marché.
Le constat est accablant : en cinquante ans, la France a perdu sa place de leader sur la scène artistique internationale, au point de ne plus représenter que 6 % du chiffre d’affaires mondial des ventes aux enchères, en 4e position après les États-Unis, la Chine et la Grande-Bretagne. Forte de ce constat, la commission culture de l’Assemblée a constitué cette mission d’information dont le président est le député Les Républicains Michel Herbillon et le rapporteur le député PS Stéphane Travert afin de trouver des mesures propres à enrayer ce déclin inexorable.
Après avoir auditionné près d’une centaine de professionnels du marché de l’art et visité en France et à l’étranger des lieux emblématiques du monde de l’art, la mission d’information a pu se faire une idée précise des difficultés et des freins que connaît ce marché et proposer des remèdes. Le résultat est à la hauteur des enjeux et incontestablement son rapport fera date. Tout d’abord, la mission propose un ensemble de huit mesures fiscales salutaires.
La mission conforte la nécessité de maintenir l’exonération des œuvres d’art à l’ISF et propose une mesure séduisante qui consiste à exonérer de cet impôt le produit de la vente d’une œuvre d’art vendue en France pendant deux ans après la vente et sous réserve de réinvestissement. Afin de lutter contre l’exportation massive, il est proposé un taux de taxe différencié selon que le vendeur cède son bien hors ou dans l’Union européenne, cela pour maintenir les transactions en France. Ainsi le vendeur qui favorisera la vente en France sera moins taxé que celui qui exporte aux États-Unis.
Les députés veulent également favoriser l’achat d’art contemporain par des entreprises, des membres des professions libérales ou des particuliers. À cet égard le dispositif actuel d’achat d’artistes vivants favorise les très grandes entreprises et n’est pas accessible aux membres des professions libérales. La mission propose de l’étendre à ces derniers et d’augmenter les seuils pour les TPE et PME tout en étendant ce dispositif aux particuliers. Afin de réguler et de favoriser le dispositif, ces mesures seront valables à la condition que l’artiste ainsi acheté soit membre de la maison des artistes, ce qui permet en sus de mieux réguler la profession d’artiste.
Par ailleurs, la mission préconise d’intégrer les œuvres d’art dans les fonds communs de placement dans l’innovation. C’est là une proposition très intéressante. On se souvient en effet que les sofica (mécanisme identique dans le cinéma) avaient permis de soutenir le cinéma en France. Le rapporteur précise qu’une telle mesure présente l’avantage et « l’intérêt d’assimiler la création artistique contemporaine à de l’innovation ». Si les œuvres d’art contemporain peuvent être intégrées dans des FCPI, il est incontestable qu’un nombre important d’investisseurs choisiront ce mécanisme pour soutenir la création tout en bénéficiant d’un avantage fiscal incitatif avec une réduction d’impôt de 18% de leur investissement.
Par ailleurs, en plus de ces mesures d’incitation fiscale, la mission préconise une véritable modernisation du marché des ventes aux enchères en France : développement de la formation commerciale et marketing des commissaires-priseurs, incitation à la concentration des maisons de ventes, encouragement de l’exploitation des nouvelles technologies et diversification des membres du Conseil des ventes aux enchères.
Enfin, le rapport mentionne également la nécessité de soutenir la création artistique française par le biais des institutions et par des aides financières aux acteurs qui diffusent l’art français à l’étranger. Il rappelle également la nécessité de mettre en valeur le travail des collectionneurs tout en créant un climat de confiance et de travail commun par la mise en place d’une structure de dialogue au sein du ministère de la Culture qui regrouperait l’ensemble des acteurs du marché et du monde de l’art.
Ces vingt-huit propositions constituent à n’en pas douter un progrès majeur et leur adoption créerait un vrai climat de confiance par un changement des mentalités au sein des institutions publiques. Par des partenariats privé-public pragmatiques, la mission encourage l’ensemble des acteurs à se retrousser les manches pour soutenir la création artistique française. En somme une véritable révolution culturelle !