Tsipras a rétabli les exonérations fiscales en faveur de l’Église grecque

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Par Eric Verhaeghe Publié le 24 août 2017 à 9h39
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cc/pixabay - © Economie Matin
177%Fin 2014 la dette de la Grèce atteignait 177% du PIB du pays.

Tsipras est-il vraiment, comme beaucoup se forcent à le croire en France, un chantre de la modernité grecque? ou est-il systématiquement revenu aux pratiques les plus rétrogrades de la classe politique locale, empilant privilèges et népotisme? Sa mansuétude vis-à-vis des privilèges de l’église grecque est pour le moins étonnante… Dernier épisode de l’interview de Georges Papakonstantinou.

Le prêt-à-bien-penser français a rapidement paré Alexis Tsipras de nombreuses vertus, parfois contradictoires. Entre résistance à l’Allemagne, posture morale et redistribution à la Robin des Bois, Tsipras et Varoufakis, durant leurs premiers mois au pouvoir, se sont forgé une légende de sauveurs de gauche.

Les réalités sombres de Tsipras

L’examen pragmatique de la légende ne résiste pas aux faits.

Le retournement de Tsipras, à l’été 2015, en faveur d’un maintien dans la zone euro, et donc d’un accord sur les mesures d’austérité exigées par les créanciers de la Grèce, a montré de quoi le personnage était capable. Alors même qu’un référendum initié par ses soins lui donnait une majorité pour sortir de l’eurozone, Tsipras recule et accepte tout ce contre quoi il s’était battu.

Ce coup fumant illustre bien la distance qui sépare la politique de Tsipras de l’apparence qu’il a voulu se donner et que beaucoup de bien-pensants français ont retenu. Mais sur la question des libertés publiques, l’attitude de Tsipras pose des questions plus inquiétantes.

Les nominations politiques se sont multipliées, et l’intervention directe de l’exécutif dans les affaires judiciaires, avec l’obsession de désigner des boucs-émissaires à la crise constitue une grave dérive sur laquelle la gauche française devrait ouvrir les yeux. En particulier, les accusations montées de toutes pièces contre ceux qui ont voulu moderniser l’État grec (notamment le responsable des statistiques) montrent que, derrière les paravents égalitaires de Tsipras, se cache une logique liberticide dont les Européens devraient se méfier.

Tsipras, ennemi de la modernité

En réalité, le mouvement Syriza, comme les Insoumis en France, est d’abord et avant tout un mouvement de résistance à la modernité. C’est la lutte pour un retour aux grands discours des années 80 que Tsipras mène en Grèce, et en faveur d’un « système » de connivence où tout se confond.

Par exemple, il faut continuer à faire vivre le mythe selon lequel un système de retraites permettant de partir à 60 ans, voire avant, peut durer alors même que l’espérance de vie s’allonge et que le croît démographique naturel diminue. Cette croissance démagogique prévaut aussi en France.

Par exemple, il vaut mieux restaurer les privilèges de l’église grecque, ce qu’a fait Tsipras, plutôt que de les combattre.

La bien-pensance à front renversé

D’où cet exercice de bien-pensance à front renversé auquel nous assistons aujourd’hui. Ceux qui, comme Georges Papakonstantinou, ont remis en cause les privilèges fiscaux de l’Église ou des armateurs sont combattus par la gauche française parce qu’ils seraient des suppôts d’un libéralisme éhonté. Ceux qui, comme Tsipras, rétablissent les privilèges de l’Église, sont accueillis comme des héros.

En réalité, l’État grec a besoin d’être modernisé, et c’est ici que passe la ligne de fracture: entre ceux qui soutiennent ce mouvement et ceux qui le combattent en faisant vivre l’illusion qu’il n’est pas inéluctable. Là encore, la situation grecque est, à bien des égards, illustrative de la situation française.

« Tsipras fucked us »

En France, Tsipras continue à bénéficier d’une certaine aura, même si l’étoile de Varoufakis a moins pâli que celle de son éphémère Premier Ministre. En Grèce, la situation est différente et les Grecs s’entendent pour ne pas donner, à terme, de majorité à leur Premier Ministre. Les élections de 2019 devraient se solder par la défaite de Syriza.

Une expression revient dans la bouche des Grecs lorsqu’ils parlent de leur Premier Ministre: « He fucked us ». Le revirement du pouvoir au lendemain du referendum de 2015 a du mal à passer, semble-t-il.

Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog

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Né en 1968, énarque, Eric Verhaeghe est le fondateur du cabinet d'innovation sociale Parménide. Il tient le blog "Jusqu'ici, tout va bien..." Il est de plus fondateur de Tripalio, le premier site en ligne d'information sociale. Il est également  l'auteur d'ouvrages dont " Jusqu'ici tout va bien ". Il a récemment publié: " Faut-il quitter la France ? "

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