Le pari était loin d'être gagné, mais finalement l'obstination de la France a payé : les contrôles sur le travail détaché vont se renforcer.
Un dumping social qui ne dit pas son nom
C'est au terme d'une réunion des 28 ministres du Travail de l'Union que Michel Sapin et la délégation française ont arraché le feu vert tant espéré à leurs partenaires européens.
Les différentes inspections du travail auront la possibilité de réclamer plus de documents aux entreprises employant des employeurs détachés.
Ces derniers, souvent originaire d'Europe de l'Est et du Sud, perçoivent des salaires similaires aux salariés du pays d'accueil, mais coutent moins cher à leur employeur qui paient les cotisations sociales du pays d'origine.
Sauf que bien souvent, faute de contrôles accrus, certains employeurs en profitent pour les embaucher au noir et/ou leur verser un salaire inférieur au salaire minimum en vigueur dans le pays d'emploi. C'est contre ces fraudes que la France veut lutter.
Autre accord obtenu par Paris : une responsabilité « conjointe et solidaire » est aussi mise en place entre les sous-traitants et les entreprises employeuses. C'est un succès pour Paris, même si cette responsabilité ne concernera que le secteur du BTP (où sont tout de même constatées la moitié des infractions en la matière en France).
La Pologne dans le camp français
Dans ces discussions, la France a reçu le soutien de la Pologne, qui a brisé le front du refus (et la minorité de blocage) constitué de la République Tchèque, de la Hongrie et du Royaume-Uni. Il n'est cependant pas question de remiser au placard la directive de 1996 qui consacre la libre circulation des travailleurs dans l'Union.
Ces dispositions obtenues par la France surviennent dans le cadre d'une réforme prochaine du statut des travailleurs détachés. Il est en effet question de clarifier leurs conditions d'emploi, de mieux les informer et de les protéger davantage. En somme, de leur octroyer de nouveaux droits et ce faisant, d'encourager à terme leur venue.
Or le nombre de travailleurs détachés au sein de l'UE atteindrait déjà 1,5 million aujourd'hui. Rien qu'en France, jusqu'à 350.000 personnes seraient concernées (210 000 « seulement » sont officiellement déclarés) selon des chiffres du ministère français du Travail.