Nucléaire : entre deux feux, la France est face à un choix

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Par Pascal de Lima Modifié le 29 novembre 2022 à 10h09

Fukushima a été un choc pour le monde notamment parce cet événement a démontré qu'une telle catastrophe, et peut-être plus grave encore, peut se produire dans un pays extrêmement développé et maître de sa technologie comme le Japon, et pas seulement dans un empire soviétique vivant ses dernières heures comme avec la catastrophe nucléaire de Tchernobyl.

Or, ces nouvelles venues du Pays du Soleil Levant ont percuté de plein fouet notre modèle de production d'énergie basé à près de 75% sur le nucléaire.

Le nucléaire a été, et est toujours aujourd'hui, un point clé de l'économie française (ainsi d'ailleurs que de sa politique d'indépendance). Pourtant, un constat s'impose à nous en 2014, parmi nos 58 centrales nucléaires françaises, la plupart sont en fonctionnement depuis plus de 30 ans. L'outil de notre production d'énergie à bas coût et « décarbonnée » vieillit, si bien qu'il apparaisse aujourd'hui que le prix de l'électricité ne pourra que monter à l'avenir et que ce mouvement est inexorable, peu importe de ce point de vue que nous abandonnions le nucléaire ou non.

Si nous le conservons, et si nous voulons maintenir un haut degré de sécurité dans nos installations qui souffrent du temps, EDF prévoyant de prolonger leur fonctionnement au-delà des 40 ans initialement envisagés, il faudra investir dans la rénovation des réacteurs anciens. En mai dernier, la Cour des comptes estimait qu'entre 2010 et 2013, le coût de production de l'énergie nucléaire gonflerait de plus de 20%, tandis qu'elle prédisait en parallèle un investissement de 90 milliards d'euros d'ici à 2033 pour garantir une sécurité optimale de nos installations.

Si nous ne le conservons pas, le prix de l'énergie augmentera également. L'Allemagne qui a fait le choix de l'abandon du nucléaire constitue un précédent très intéressant à observer. La transition énergique que souhaite accomplir l'Allemagne a fait bondir le coût de son électricité qui est maintenant 46% plus chère que la moyenne européenne. D'autant que d'un point de vue écologique, tant que la transition énergétique vers les énergies renouvelables n'aura pas été réussie dans les faits, l'Allemagne vit un drame permanent. En effet, le pays est aujourd'hui le plus gros pollueur de l'Union européenne, notamment du fait de l'émission, en 2013, de 760 millions (pour 346 millions en France) de tonnes de dioxyde de carbone produit par la combustion d'énergies fossiles dont le charbon qui a pris en partie le relais du nucléaire. Pire encore, ces émissions s'accroissent de 2% en un an.

Au drame écologique s'ajouterait le drame humain. Par exemple, l'Insee Alsace a publié le 1er juillet dernier une étude affirmant que la fermeture de la seule centrale de Fessenheim affecterait l'économie locale de manière importante car elle détruirait directement 1910 emplois (composés selon l'Insee entre 2011 et 2012 de 850 salariés d'EDF, 510 travailleurs au sein d'entreprises sous-traitantes d'EDF et 550 emplois maintenus grâce à la consommation des travailleurs déjà cités) et ferait pâtir les revenus de plusieurs milliers d'autres Alsaciens qui avaient pour clients ces 1910 travailleurs devenus chômeurs.

Reste à savoir, enfin, si le pari des énergies renouvelables est gagnant sur le plus long terme, en termes de production énergétique, de coût et d'emplois. Mais sur ce point, bien qu'il soit difficile de prévoir avec assurance l'avenir, on peut rester optimiste. D'une part, ces dernières années les coûts de production des énergies solaire et éolienne ont beaucoup baissé du fait de l'innovation constante dans ces domaines, mais en plus, le territoire français (disposant tout de même du deuxième espace maritime mondial) présente des atouts uniques dont nous pourrions profiter par exemple en misant sur l'énergie marémotrice (c'est-à-dire produite par les marrées) qui est une énergie continue (au contraire des énergies éoliennes et solaires), inépuisable et prédictibles. Si cette dernière solution n'en est pas encore une du fait des coûts importants et d'une technologie encore balbutiante, gageons que la technique progressera vite et qu'elle permettra, dans les décennies à venir, de contribuer à faire de la France la championne mondiale des énergies renouvelables.

Avec Gwenaël le Sausse

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Chef économiste, Economiste de l'innovation, knowledge manager des cabinets de conseil en management (20 ans). Essayiste et conférencier français spécialiste de prospective économique, mon travail, fondé sur une veille et une réflexion prospective, porte notamment sur l'exploration des innovations, sur leurs impacts en termes sociétaux, environnementaux et socio-économiques. Responsable de l'offre "FUTURA : Impacts des innovations sur les métiers de demain". Vision, Leadership, Remote of Work, Digital as Platforms...secteurs Banque Finance Assurance, PME TPE, Industrie et Sport du Futur. Après 14 années dans les milieux du conseil en management et systèmes d’information (Consultant et Knowledge manager auprès de Ernst & Young, Cap Gemini, Chef Economiste-KM auprès d'Altran - dont un an auprès d'Arthur D. Little...), je fonde Economic Cell en 2013, laboratoire d’observation des innovations et des marchés. En 2017, je deviens en parallèle Chef Economiste d'Harwell Management. En 2022, je deviens Chef économiste de CGI et Directeur de CGI Business Consulting. Intervenant en économie de l'innovation à Aivancity, Sciences po Paris, ESSEC, HEC, UP13, Telecom-Paris... et Conférenciers dans le secteur privé, DRH, Directions Métiers... J'ai publié plus de 300 tribunes économiques dans toute la presse nationale, 8 livres, 6 articles scientifiques dans des revues classées CNRS et j'interviens régulièrement dans les médias français et internationaux. Publication récente aux éditions FORBES de « Capitalisme et Technologie : les liaisons dangereuses – Vers les métiers de demain ». Livre en cours : "La fin du travail" Site personnel : www.pascal-de-lima.com

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