Tensions commerciales : savoir ne pas aller trop loin

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Par Hervé Goulletquer Modifié le 26 juin 2018 à 11h41
Entrepot Douanes Barrieres Tensions Commerciales
@shutter - © Economie Matin
4 %Si on prend en compte toutes les menaces proférées, le renchérissement des droits de douane aux États-Unis se compteront à plus de 4 points de PIB.

Baisse des marchés boursiers (-2,1% pour l’Euro Stoxx 50 et -1,4% pour le S&P 500), hausse de la volatilité des indices actions (le VIX, côté américain, est passé de 13,8 à l’ouverture à 17,3 en clôture, après avoir atteint un double point haut à près de 19,5) : la séance d’hier a été plutôt mouvementée.

L’ouverture ce matin en Asie était de même acabit, avant qu’une certaine amélioration ne se mette en place. Du côté des changes, sans surprise, le JPY subit des pressions haussières. Pour ce qui est du dollar, il s’affaiblit un peu contre toutes devises ; mais pas contre le yuan chinois. Les autorités de Pékin sont-elles en train de remettre en cause la relation bien établie entre mouvements respectifs de l’USD-CNY et du taux de change effectif du dollar, les deux évoluant de concert ? Un signal de mécontentement face à la politique commerciale américaine ? Le point est à suivre de près. Remarquons aussi le relatif calme sur le marché des titres d’Etat, si ce n’est l’Italie où la belle performance de la Ligue au second tour des élections municipales interpelle un peu. Qu’est-ce que cela signifie en termes de degré de liberté dans la conduite des affaires du pays ?

Bien entendu, ce sont avant tout les mesures protectionnistes de l’Administration Trump qui inquiètent la communauté financière. Il s’agit sans doute moins de celles déjà prises que de celles à éventuellement venir. Pour le moment, le renchérissement des droits de douane aux Etats-Unis se comptent en quelques petits dixièmes de point de PIB. C’est-à-dire dire en-deçà de la marge d’erreur autour de cette mesure. Mais si on prend en compte toutes les menaces proférées, on arrive à plus de 4 points de PIB. Ce n’est plus la même histoire du tout. Et puis, c’est en fin de semaine que le Comité sur l’Investissement Étranger aux Etats-Unis, qui dépend du ministère des Finances, doit rendre public un rapport sur les restrictions à apporter aux investissements directs étrangers dans le secteur de la technologie. On comprend évidemment que les entreprises chinoises devraient être les premières concernées.

Dans le même temps, les premières anecdotal evidences de l’effet sur la croissance des mesures de restriction aux échanges commencent à se voir. Aux Etats-Unis, avec l’effet surtaxe sur les machines à laver et au final des achats d’électroménager qui se replient un peu.

Ailleurs, dans le monde, une confiance des ménages qui se replie au Canada, envoyant ainsi un message d’attention sur le profil demain de la croissance économique.

Sachant que l’exemple du Royaume-Uni, post-référendum sur la sortie de l’UE, montre que les incertitudes sur les futures relations commerciales avec des partenaires-clé finissent assez vite par peser sur la dynamique de l’activité.

Dans ces conditions, on comprend la volonté de calmer les choses apparues hier tant du côté américain que chinois. Aux Etats-Unis, le très déterminé Conseiller du Président pour les questions de commerce international, Peter Navarro, a affirmé que l’Administration n’avait aucune volonté d’imposer des restrictions aux investissements à tout le reste du monde. Il ne s’agit que de défendre la technologie américaine lorsque celle-ci est menacée par des comportements prédateurs. En Chine, des informations, certes davantage indirectes, montreraient que les autorités réalisent qu’une attitude agressive en matière de transfert de technologie n’est plus acceptée par le reste du monde. S’agit-il du côté américain d’un simple jeu tactique, visant à réduire les tensions du moment, de peur qu’une aggravation ne vienne gêner la poursuite du déploiement des mesures de restriction aux échanges ? On pourrait aussi considérer que les « faibles » signaux en provenance de Chine ne sont qu’un écran de fumée, dans l’attente d’une réponse plus construite et plus complète. A moins qu’il ne s’agisse d’une vraie prise de conscience qu’aller trop loin est dangereux.

Comment répondre ? On est forcé d’attendre les prochaines initiatives et voir dans quelle direction elles iront.

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Hervé Goulletquer est stratégiste de la Direction de la gestion de La Banque Postale Asset Management depuis 2014. Ses champs d’expertises couvrent l’économie mondiale, les marchés de capitaux et l’arbitrage entre classe d’actifs. Il produit une recherche quotidienne et hebdomadaire, et communique sur ces thèmes auprès des investisseurs français et internationaux. Après des débuts chez Framatome, il a effectué toute sa carrière dans le secteur financier. Il était en dernier poste responsable mondial de la recherche marchés du Crédit Agricole CIB, où il gérait et animait un réseau d’une trentaine d’économistes et de stratégistes situés à Londres, Paris, New York, Hong Kong et Tokyo. Il est titulaire d’une maîtrise d’économétrie, d’un DEA de conjoncture et politique économique et diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris.

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