Télémédecine : en finir avec les idées reçues sur la consultation en ligne

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Par Mathilde Le Rouzic Modifié le 8 août 2017 à 17h17
Medecine Numerique Sante Internet Evolution
@shutter - © Economie Matin
84 %84 % des médecins utilisent un smartphone ou une tablette au quotidien.

La téléconsultation est-elle victime de ses idées reçues ? Déjà (très) développée en Europe, notamment dans les pays Baltes, aux Etats-Unis et dans les pays asiatiques, la télémédecine a du mal à se frayer un chemin en France. Pourtant, grâce à l’innovation, elle peut désormais répondre aux problèmes qui agitent à la fois le parcours de santé, le corps médical et sa patientèle.

Le virtuel va remplacer les médecins de ville : Faux

La télémédecine facilite l’accès au diagnostic médical. Elle s’affranchit de la barrière géographique, elle vient en support de la médecine traditionnelle et elle s’adapte aux nouvelles habitudes sociétales par la digitalisation. Si la télémédecine s’inscrit dans un rapport à la santé plutôt novateur, elle n’a pas vocation à remplacer les médecins. Elle répond au besoin de mamans débordées, de personnes âgées ou de jeunes filles qui, culturellement, ont du mal à faire un pas vers un médecin ou à se dénuder devant eux, en facilitant le premier contact grâce à la téléconsultation. Étape préalable à l’établissement d’un diagnostic, la téléconsultation permet d’abord de rassurer le patient, puis de le rediriger vers le bon médecin pour son cas précis. Ainsi, elle favorise le désengorgement des cabinets médicaux et des services d'urgences, et peut éviter le recours systématique aux médicaments que le patient a déjà en sa possession, et qui peut s’avérer dangereux.

La télémédecine comble les déserts médicaux. La télémédecine apporte une réponse rapide et efficace au problème de l’accès au soin…qui ne se trouve pas forcément là où l’on pense. Là où la médecine traditionnelle se confronte à une démographie médicale lacunaire dans certaines régions où les rendez-vous sont pris entre 3 et 6 mois à l’avance, Paris et sa périphérie demeurent le premier désert médical de France. En s’attaquant à cette question, la télémédecine devient un outil complémentaire de la médecine telle qu’on la connaît aujourd’hui. La variation du numerus clausus avait déjà tenté d’y répondre, mais c’est la possibilité de consulter depuis n’importe quel lieu qui séduit davantage les jeunes médecins. Ainsi, la télémédecine offre une alternative aux patients dont les déplacements peuvent être complexes. Elle permet aussi aux médecins de mettre leur temps à contribution et pallie les désistements de patients.

Les médecins sont défavorables à la télémédecine : Faux

La patientèle a amorcé l’évolution digitale vers la télémédecine. Il y a une forte demande des patients : c’est d’eux que vient la mutation d’une médecine traditionnelle vers une médecine de plus en plus connectée. Ils envoient des mails à leurs médecins, leur demandent des précisions par téléphone. S’ils n’ont pas de réponse directe du médecin, ils vont chercher l’information sur internet. Ce sont eux qui ont amorcé le changement, qui exigent des réponses rapides, fiables, rassurantes. Un modèle de l’instantané né avec le web, qui s’invite dans chaque recoin de la société, jusqu’au secteur médical.

Les médecins sont de plus en plus connectés dans leur pratique. 84% des médecins utilisent un smartphone ou une tablette dans leur pratique quotidienne : ils sont bien plus connectés qu’on ne le pense. S’ils sont favorables à une accélération de la transformation numérique de la santé, ils restent vigilants sur les risques que cela pourrait impliquer, notamment pour la fiabilité des outils mis à disposition et la sécurité des données de santé. Ce n’est pas une nouvelle problématique : elle a déjà été évoquée dans le cadre du débat sur le Dossier Médical Personnel, une initiative publique freinée par le fait que les données médicales, hébergées en ligne, pourraient être piratées. Pourtant la France est un des pays qui a le mieux encadré l’hébergement des données de santé, en nous dotant d’un cadre juridique extrêmement protecteur.

La télémédecine, c’est l’ubérisation de la santé : Faux

C’est l’une des craintes principales des médecins : privatiser le marché pourrait entraver l’indépendance des médecins et amener à une logique de rendement plutôt que de qualité des soins. L’arrivée d’opérateurs privés, qui se traduit par des plateformes de télé-conseil, est perçue comme un risque pour les médecins et certains patients. Mais la médecine n’est pas un secteur commercial. Les technologies de l’information et de la communication vont certes faciliter la mise en relation entre patients et médecins, mais on ne verra pas des non-professionnels s’improviser médecins : on ne peut remplacer le médecin ni dans ses compétences, ni dans sa relation humaine.

La consultation en ligne n’est pas remboursée : Vrai

En l’absence de prise en charge par la sécurité sociale, le coût des consultations pèse sur les patients et/ou leur complémentaire santé. Le problème ne se trouve pas du côté de ces opérateurs ou des mutuelles, mais plutôt des institutionnels, qui freinent un service pourtant en phase avec la transformation digitale, et fortement plébiscité. La télémédecine doit trouver son modèle de financement : si nous voulons réellement la démocratiser, une prise en charge de ses actes doit être envisagée.

À l’inverse des préjugés, la télémédecine ne déshumanise pas le rapport entre le patient et son médecin : elle les rapproche ! Elle permet aux patients de gagner en qualité au niveau des soins, et aux professionnels de santé d’accompagner leurs patients dans la durée, avec plus de flexibilité. Les prémices d’un projet ambitieux qui promet de belles avancées, dans un secteur difficile à faire bouger. Le changement rapide n’est pas inscrit dans l’ADN de la santé française – dommage, car la télémédecine apporte avec elle des solutions uniques, politiques et économiques.

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Mathilde Le Rouzic, co-fondatrice de Hellocare

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