Faut-il taxer le diesel ?

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Par Jean-Luc Ginder Modifié le 3 juin 2013 à 11h07

75% des voitures neuves vendues en France roulent au diesel. Conséquence : la demande de gasoil est très forte. La commission européenne avait signalé cette tension sur les prix du raffinage du gasoil dès 2004.

Depuis 1994, la demande française en diesel ne cesse de croître, alors que celle de supercarburants connaît une forte diminution. En effet, on a recours de plus en plus au transport routier et les véhicules du parc automobile français fonctionnent au diesel.

Conséquence : la France est obligée d'importer massivement du gazole pour répondre à la demande nationale. A l'inverse, la production de supercarburants étant excédentaire, la France exporte son essence. La consommation de GPL reste marginale : elle représente moins de 1% des volumes de carburants consommés en France.

« Rééquilibrer les prix des carburants entre le gazole et l'essence*» est l'argument officiel qui excuse un impact social dramatique pour 8 millions de Français. Cet ajustement cache un effet économiquement sans grand effet, et est un argument économique injustement légitime.... surtout avant un été de transhumance diesel vers des vacances si attendues.

C'est une hausse à impact social injuste, immédiat et à haut risque économique qui touchera les banlieues lointaines, les zones pavillonnaires à forte consommation de diesel à l'écart des transports en commun. Pour la partie de la classe moyenne dépendante du transport automobile, l'addition sera très lourde. Plus bas sur l'échelle sociale, on observe une bulle de précarité énergétique de 3.8 millions de ménages modestes qui représente 8 millions de personnes soit 10% de la population française.

Les plus injustement touchés par cette hausse sont bien ces familles identifiées comme devant consacrer plus de 10% de leurs ressources au coût du transport par énergie diesel. On trouve également les petites entreprises et les professionnels du transport en fonction de leur taux de dépendance au diesel. Ils souffriront de la même manière et la conséquence sera la précarité des emplois qu'ils proposent.

Estimons maintenant cette mesure en terme de prix. Si le prix du litre de diesel à la pompe est à 1.32 euros, la répartition se fait de la façon suivante : le litre de brand est à 0.54 euros, le coût de raffinage à 0.09 euros, le coût de transport à la pompe 0.06 euros. Le prix total du litre de diesel, hors taxes est à 0.69 euros. Ajoutons maintenant les taxes françaises : la taxe sur les produits énergétique à 0.421euros puis la TVA (19.6%) à 0.21 euros. Si on ajoute alors les 20 centimes, cette nouvelle mesure va surenchérir le litre de diesel de 15%.

Considérant, selon les estimations du Comité professionnel du pétrole que la France consomme 10 litres de gazole par seconde, soit 32,9 millions de tonnes de gazole ou 38 milliards de litres par an elle paiera environ 7 milliards en plus. Le nouveau coût diesel annuel post mesure sera pour le consommateur taxes incluse de 577.76 milliards d'euros.

Ces 7 nouveaux milliards représentent en fait 0.38 % du stock de la dette publique française (1818.1 milliards) ou 63 jours du montant des intérêts de la dette que la France paie par an.

En réalité, l'impact économique est très faible au regard des effets négatifs en termes d'appauvrissement de la classe moyenne active (sans parler de l'explosion de la précarité énergétique) et du risque réel du ralentissement général de l'activité marchande de par l'impact final. et des coûts du transport sur le produit. Le bilan économique reste très discutable voire clairement irresponsable dans un avenir proche sachant qu'il y aura des hausses inévitable du brand à moyenne échéance.

Et pour mémoire, en août 2012 c'est bien un gel du prix du diesel que nous proposait Bercy....
Enfin, quel serait l'impact écologique ? Inexistant car on constate depuis des années que l'augmentation des prix du carburant n'a eu que des effets marginaux sur la consommation. Et si, comme annoncé, cette hausse de 20 centimes était un acte fort dans la volonté de réduire les émissions de particules issus des moteurs diesels on nous trompe.

Et on entretient une idée bien plus proche d'un coup de communication que d'une réalité qui elle, rend bien compte de l'incontournable besoin vital de mobilité des inconditionnels de l'essence diesel.

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Jean-Luc Ginder est économiste et essayiste spécialiste de la macro économie ainsi que de l'économie de l'Energie. Il est l'auteur du livre « Phobiamanagement » mettant en avant les effets de la peur en économie et du livre « Réflexions Economiques » (Éditions Corps et Ame, février 2018).

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