Va-t-on réussir à tuer l’hydre chômage ?

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Par Jean-Paul Gomez Publié le 10 mars 2014 à 5h30

Le chômage n’est pas une fatalité ; c’est un élément de la vie économique impondérable que l’on peut nommer l’inactivité. Si on écoutait les hommes politiques ou les responsables économiques des entreprises, en particulier ceux qui ne sont aux manettes, avec leurs « yaka, fauke, les otres sontnuls et moijecécekilfofère », on aurait du tordre le cou à ce maudit chômage d’un coup de baguette magique depuis longtemps. Mais la bête est récalcitrante, et ce depuis des années, malgré les milliards dépensés.

La commission Européenne nous promet encore des jours difficiles. Pourtant si l’on devait comparer les effets de la crise économique en terme de chômage chez nos voisins espagnols ou Italiens, on pourrait se dire que notre foutu système hors de prix a joué son rôle d’amortisseur. Mais les derniers résultats sont effectivement inquiétants. Le chômage devient-il dangereux pour notre société ? Oui, car il aboutit à un appauvrissement de la population, une perte de la dignité des hommes et des femmes concernés, un ralentissement de l’économie. C’est un élément de risque de crise importante de la société.Nous avons beaucoup de chômeurs depuis des années.[1]

Le chômage ne cesse d’augmenter depuis les années 70 et s’est stabilisé en France autour de 8-10 % depuis 1985. Une légère baisse a eu lieu au début des années 2000 puis suite à la crise économique qui a lieu depuis fin 2007 et qui s’éternise, le chômage est reparti à la hausse. Il est à noter que les deux phases de décroissance du chômage ont correspondu à des phases de développement de nouvelles technologies. Le compromis jusqu’à aujourd’hui était, droite et gauche confondu depuis 30 ans, d’accepter un chômage important en contrepartie d’une gestion rigoureuse des couts de production ; cela permettait de garder de la compétitivité.

Premier élément à mettre en avant : Une croissance forte permet de créer des emplois. La croissance vient des innovations.

Deuxième élément : les effets délétères de la mondialisation sur la protection sociale dans tous les pays ayant adopté ce système, ont entrainé une baisse des couts de production plus importante qu’en France et donc, la France se retrouve aujourd’hui dans une tenaille : baisse de son attractivité de cout production du fait de la charge liée à son système de protection sociale et augmentation du nombre de chômeurs et de retraités à payer.

Il est donc nécessaire de trouver des facteurs de croissance en France car le reste du monde en a trouvé et est en train d’accélérer. Le rapport d’Anne Lauvergeon a expliqué récemment les axes futurs de développement que la France pourrait prendre et il faudrait essayer de suivre ses conseils. Il faut également modifier notre rapport à notre pacte social.

Le fantasme collectif colporté par différents catastrophistes est de devoir d’ici peu de temps devoir tendre une sébile à l’endroit du monde pour obtenir un peu d’argent et réaliser les indispensables investissements. Mais nous n’en sommes pas tout à fait là. Si l’on doit nous comparer à ceux qui étaient nommés les PIGS, notre situation est globalement moins mauvaise que la leur. Ils ont faits des réformes de structure importantes qu’ils affineront en fonction de l’évolution de la situation et la dessus, nous devons rattraper notre retard. Nous en sommes à l’heure de devoir réformer notre système de travail.


Oui, la commission européenne a raison d’indiquer qu’elle pense que notre système ne peut perdurer et de forcer le trait sur notre incapacité à respecter nos obligations à l’endroit de nos partenaires européens. Oui, nous devons accepter de changer notre système de protection sociale, notre système économique et notre relation au travail. Mais, la réforme est dure en France ; témoin la façon dont est traité le pacte de responsabilité par les différents partenaires sociaux qui ne cherchent qu’à défendre des intérêts particuliers, qui rendent déjà quasi impossible toute négociation.

Et puis il est totalement inacceptable de voir les membres de l’ancienne majorité qui sont grandement responsables de la situation présente se répandre en permanence dans les médias pour dire que nous sommes au bord du gouffre et agiter les drapeaux du catastrophisme. De plus, ils sont grandement responsables de notre situation. Que n’ont-ils fait les réformes dont ils ne cessent de nous dire que cela devrait déjà être en place alors qu’ils ont eu plus de 10 ans les responsabilités et les charges de ces choix qu’ils n’ont pas faits ?

Le pacte de responsabilité veut essayer de résoudre cette équation en en laissant la responsabilité aux partenaires sociaux. Que les politiques du gouvernement actuel tentent de laisser les partenaires sociaux négocier les termes du pacte peut sembler normal. Qu’il ne leur indique pas clairement qu’ils ont l’obligation de trouver un accord équilibré de long terme sans quoi, c’est le gouvernement qui légiférera, par contre, est anormal. Lionel Jospin avait su le faire pour imposer les 35 heures, pourquoi ce gouvernement ne pourrait-il le faire également alors que les enjeux sont autrement plus importants ?

Les termes de l’accord final doivent définir :

- Qui finance les nouveaux axes stratégiques de développement sur la base des éléments définis dans le rapport Lauvergeon, quelle organisation juridique et quelles avantages pour les entreprises innovantes dans ces secteurs.

- Qui finance et forme les salariés devant développer ces nouvelles filières

- Redéfinition du temps de travail, de sa modularité et de l’amélioration des conditions de travail en cas d’extrême écart de temps entre deux phases de travail dans une journée ou une semaine (il est anormal de voir des salariés de certaines entreprises être en surcharge de travail pendant 3 heures dans leur journée, puis être inactifs pendant les 4,5 heures restantes)

- Engagement de l’état de repenser la répartition de la fiscalisation des entreprises (il est anormal que les entreprises du CAC 40 payent si peu d’impôts)

- Redéfinition des conditions d’octroi des allocations chômage et de leur maintien

- Repenser la répartition des retraites

- Repenser la représentativité des salariés dans le cadre du pacte social

Voilà les conditions de sortie de notre crise franco-française économique et les conditions de la fin de l’augmentation du chômage: Résolution de nos axes stratégiques de développement économiques, résolution de notre problème de relation au travail et résolution de la problématique du cout du travail.

Donc, il faut espérer un bon Pacte de responsabilité. Et qu’il ne soit torpillé par personne…


[1] Source Wikipédia

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Jean-Paul Gomez est économiste. Il est également auteur de nombreux articles parus dans la presse.

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