L’usine Smart de Hambach en Moselle, filiale du Groupe Daimler (Mercédès), vient « enfin » d’accepter de travailler 39 heures par semaine, à une large majorité, puisque 93% des 800 salariés ont voté pour.
Contrairement au référendum consultatif de Septembre, c’est par le biais d’avenant individuel à leur contrat de travail que ce résultat a été obtenu. La Direction a fait savoir que toutes les mesures incluses dans le « Pacte 2020 » seront mises en application dès le début de l’année prochaine. Elle a aussi précisé vu que le très fort taux de retour, les emplois seraient garantis jusqu’à fin 2020 sur le site. Annette Winckler, responsable de la division Smart au sein du groupe Daimler est très fière et se réjouit de ce très fort taux d’adhésion, qui démontre toute la volonté et l’engagement des salariés du site. Cette mesure va fortement améliorer la productivité et la compétitivité de ce site de production.
Et pourtant lors du référendum du 11 Septembre dernier, ils n’étaient que 56,1% à voter pour le Pacte 2020 prévoyant une augmentation de 12% de la durée du travail, en compensation d’une augmentation que de 6% du salaire. Et également en contrepartie, le maintien de l’emploi jusqu’en 2020. Sur les quelque 800 votants, les cadres, les employés, techniciens et agents de maîtrise avaient voté à 74 % pour, alors que les ouvriers étaient à 39 %, taux révélant des dissensions. Dommage pour les salariés, le Pacte de Septembre 2020 qui avait été signé par la CDE-CGC et la CFTC était plus intéressant que celui qui vient de l’être par avenant. La CGT et CFGT l’ayant refusé à ce moment là, en portent les conséquences. Ces derniers viennent donc de faire perdre une prime de 15€ les samedis travaillés, une augmentation générale de 0,25%, ainsi qu’une promesse de création de 50 emplois en CDI.
Rappelons les faits
Juste avant l’été, lors des NAO, (Négociations Annuelles Obligatoires), la direction, pour préserver le site d’Hambach et ses emplois, propose aux salariés de réduire le coût du travail. Il leur était demandé de passer de 35 à 39 heures pendant déjà 3 ans, payées 37 heures (37 heures en 2016, 39 heures en 2017/2018/2019 et 37 heures en 2020). En y adjoignant toutefois une compensation salariale de 120€/mois et deux primes de 500€ en 2016, et en 2017, ainsi que les conditions perdues, désignées ci-dessus.
Pour les deux organisations syndicales CGT et CFDT, la remise en cause des 35 heures, un avantage acquis, a été de suite désignée comme ultra sensible. Elles font d’ailleurs aussitôt connaître leur opposition et la joueront jusqu’au bout. Après quatre mois de discussions, le 28 octobre, un nouveau plan est présenté aux quatre organisations syndicales. Il sera seulement signé par la CFE-CGC et la CFTC qui représentent respectivement 20 et 26%. Un mois se passe avant que la direction notifie l’accord le 27 novembre. Trois jours plus tard, les organisations non signataires : CGT et CFDT représentant plus de 50%, le dénonce. Ce qui le rend non applicable. Cependant la direction ne lâche pas prise, elle reprend son projet minimisé, en soumettant un avenant individuel à chaque salarié avec une date butoir du 18 décembre. Elle s’était engagée à mettre en œuvre ce nouveau pacte 2020, à condition qu’il soit signé à plus de 75%.
Il faut rappeler que cette unité produit la Smart Fortwo thermique et électrique à deux places en liaison avec Renault. Elle est également produite depuis cet automne aux Etats-Unis et en Chine. Ce site se trouvant fortement concurrencé question coût, par le site Slovène Renault de Novo Mesto qui assemble déjà la version quatre places. Les deux centrales syndicales ont sous-estimé la volonté de leur base, de préserver les emplois mais aussi la détermination de la direction, notamment d’Annette Winkler, responsable de la marque Smart désigné par le Groupe, pour réussir cet accord.
Répercussions d’un tel accord sur l’économie locale et sur les finances publiques
Travailler plus pour les salariés base 35 heures appelés employés modulants, procure une hausse non négligeable du salaire, même si elle a été minimisée. Si l’on évalue pour les modulants, les deux heures de plus, payées avec l’incidence des heures supplémentaires et de la prime de 120 euros mensuelle, nous arrivons à 234 euros brut de plus par mois pour un salaire brut moyen de 1600 euros. Les non modulants percevant uniquement la prime mensuelle de 120 euros. Ce qui représente par mois, pour environ 400 salariés modulants et 400 non modulants, une somme brute de 142.000 euros, soit près de 108.000 euros net. Sur une année, c’est tout de même près de 1.3 million d’euros injecté en partie, en plus par mois, dans l’économie locale. Une bouée de sauvetage pour certains commerces. Mais ce n’est pas tout ! C’est aussi des charges sociales en plus pour les caisses de retraites, de Sécurité Sociale, d’Assedic, etc…
L’ensemble des charges sociales salariées employées sont en moyenne de 82% sur le net, ou de 74,3% si l’entreprise a bénéficié totalement du CICE. Prenons simplement 75% du net ; sur une année, ce sera 975.000 euros de rentrées de charges pour les caisses. (à légèrement amplifier en raison des charges plus élevées en raison du statut spécial de l’Alsace-Moselle) Mais il ne faut pas oublier les répercussions sur les impôts payés. En estimant que plus de la moitié ne paye pas d’impôts, si nous comptions simplement 15%, ce qui est une estimation basse, cela rapporterait près de 100.000 euros dans les finances publiques. Et ce n’est pas tout, il faut penser à la TVA sur les achats. Celle-ci va de 20 à 2,5%, soit une moyenne de 10,80%. Si tous les achats étaient effectués en France, l’état aurait une rentrée supplémentaire d’environ 140.000 euros. Il pourrait même être envisagé en répercussion, une hausse de l’emploi local avec toutes les conséquences induites. Il ne faut pas oublier une notion comptable simple : Plus une entreprise fait d’heures productives plus son coût horaire diminue. C’est encore plus vrai pour les entreprises industrielles ou ayant de gros investissements.
En expliquant ces résultats bénéfiques, les avis du village et des employés seront peut-être un peu moins « coupés en deux » ! Est-ce le début pour les entreprises françaises d’une première étape pour se rapprocher progressivement des 40 heures, pour retrouver ainsi de l’attractivité et surtout une meilleure productivité et compétitivité. L’avenir nous le dira !