Mais où est donc la Silicon Valley Européenne ? (6/6)

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Par Alexandre Kolow Publié le 11 septembre 2017 à 6h39
Silicon Valley Innovation Processus Developpement
cc/pixabay - © Economie Matin
100 MILLIARDS $Les entreprises de la Silicon Valley engrangent un chiffre d'affaires avoisinant les 100 milliards de dollars.

Beaucoup de villes ou de régions en Europe aiment se comparer à la célèbre Silicon Valley, cette vallée (qui n’en n’est pas vraiment une d’ailleurs) qui s’étend de la baie de San Francisco jusqu’à San José. On dit que c’est la Mecque du Hi Tech et qu’à un moment donné toute startup qui souhaite devenir un leader mondial dans son secteur n’a pas d’autre choix que d’y ouvrir au moins un bureau.

En Europe, on entend parfois dire que cette Silicon Valley existe aussi ici et que c’est tantôt Berlin, Barcelone, Paris, Londres, la vallée du Grésivaudan, la Roumanie ou la Bulgarie. Cependant je pense qu’aucun lieu en Europe ne peut aujourd’hui rivaliser avec la puissance de la Silicon Valley.

Et je pense que le problème et bien plus profond qu’il n’y parait car s’il suffisait de réunir dans un seul et même endroit beaucoup d’argent et d’ingénieurs talentueux pour dupliquer la Silicon Valley, cela aurait déjà été fait. La bonne nouvelle c’est que le « problème » ne vient pas des gens mais bien du lieu. En effet, on pourrait être tenté de croire que les Américains sont tout simplement bien plus doués que les autres pour créer des startups à succès. Sans vouloir être taxé de chauvinisme ce n’est pourtant pas le cas. Bien qu’il y ait beaucoup d’Américains dans la Silicon Valley, on y retrouve aussi énormément d’Européens ou d’Asiatiques. Certaines des plus grandes entreprises à succès de la vallée comptent même dans leur comité exécutif ou leurs co-fondateurs de nombreux Européens.

L’avantage comparatif vient donc bien du lieu lui-même. Il faut s’avoir qu’à San Francisco résident près de un million d’habitants et que lorsqu’on pousse jusqu’à San José, on s’approche très vite des 9 millions d’habitants. Tout le monde y parle anglais et la mentalité y est très tournée sur les nouvelles technologies. L’information y circule très vite et tout le monde connait quelqu’un qui connait quelqu’un. Or, lorsqu’un entrepreneur lance une startup il a besoin de très vite faire une « proof of concept » (comprenez « preuve de concept ») sur un échantillon réduit et il est donc préférable de développer ce produit dans un endroit où la densité de la population est forte afin de maximiser les chances de convaincre un maximum de personnes sur un rayon géographique le plus réduit possible afin de limiter les coûts marketing. Mais il est également préférable de la faire dans un endroit où l’information circule vite et où vous pouvez rapidement rencontrer les personnes qui vont vous aider à évoluer. C’est exactement ce que la baie de San Francisco apporte. Mais, me direz-vous, Paris, Londres ou Berlin, elles aussi connaissent une très forte densité de population permettant de faire rapidement une proof of concept afin de lever des fonds ! Oui, mais que se passe-t-il après cette levée de fonds ? Il faut rapidement « scaler » (comprenez, faire à grande échelle que ce vous avez fait à petite échelle) et c’est là où les Etats-Unis disposent d’un avantage comparatif par rapport à l’Europe. Tout le monde parle la même langue et a la même culture. Ce que vous avez donc fait à San Francisco, peut donc très vite être répliqué et à des coûts très limités à New York, Los Angeles, Dallas, Chicago etc.

En Europe, nous parlons des langues différentes et avons des cultures différentes. Répliquer à Budapest, Milan ou Madrid un modèle économique qui a fonctionné à Berlin, Paris ou Londres sera beaucoup moins aisé. Et je ne parle même pas ici de la législation qui peut varier d’un pays à un autre. La rampe de lancement est donc beaucoup plus petite en Europe qu’elle ne l’est aux Etats-Unis car elle se limite bien souvent au pays d’origine de la startup. Si nous parlons de la France, nous parlons donc d’une rampe de lancement de 65 millions de personnes versus 325 millions aux Etats-Unis. Et je ne parle donc même pas de pays comme la Belgique ou la Slovaquie… Il est donc très rare de voir des startups européennes connaître un succès mondial. Il en existe bien heureusement mais on les compte sur les doigts des deux mains.

Construire un grand espace fédéral où tous les citoyens parleront la même langue officielle commune, dans lequel une véritable solidarité sociale fiscale et budgétaire existera et dans lequel la mobilité des talents sera totale est donc selon moi la seule façon de libérer les potentiels.

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Alexandre Kolow est co-fondateur de la plateforme de recrutement koalajob.com. Un site de recrutement qui met l'accent sur l’évolution de carrière et sur la mobilité européenne des talents. Il donne également des cours d'économie internationale en France et en Europe.

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