Mes chères contrariées, mes chers contrariens
Avant de vous parler de choses sérieuses du type défaut de paiement généralisé ou au contraire remise en route de l’État fédéral américain après un nouveau psychodrame d’usage, je voulais partager avec vous cette petite blague qui en dit vraiment long, très long sur l’état déliquescent d’une finance qui a vraiment perdu toute rationalité, de traders devenus complètement fous, de banques qui ne contrôlent plus rien et d’investisseurs complètement crétinifiés !
Tweeter explose de 2 200 % à Wall Street, confondu avec Twitter
Eh oui mes chers contrariens, comme vous avez sans doute dû en entendre parler, Tweeter a été introduit en Bourse… et les investisseurs se sont rués sur les actions de Tweeter pour profiter de cette aubaine financière… Ils se sont juste trompés de Tweeter ces abrutis. Au lieu d’acheter des actions Twitter, ils ont investi massivement sur des actions Tweeter, ce qui prouve a minima qu’aucun de ces joyeux neuneus n’a ne serait-ce que pensé à se connecter sur le site Internet de l’entreprise dont ils voulaient acheter des actions pour regarder au moins ce qu’elle faisait comme métier par exemple.
Résultat : ces crétins ont acheté la mauvaise action ce qui, je trouve, est vraiment très cocasse.
D’après l’article qui ne manque pas de sel « les nouveaux actionnaires du jour de Tweeter Home Entertainment Group Inc. ne savent sans doute pas tous qu’il s’agit, non pas d’un réseau social à la croissance à trois chiffres, mais plutôt d’un obscur détaillant américain en électronique grand public basé à Canton, Massachusetts, dont la micro-capitalisation ne dépassait pas quelques centaines de milliers de dollars il y a encore quelques heures… »
Voilà donc de brillants « zinvestisseurs » dans leur œuvre et qui viennent très certainement de faire une bonne affaire et nous n’allons pas pleurer pour eux ! Je vous rappelle que dans l’imaginaire libéral, l’investisseur est la pierre angulaire de tout le système et permet d’exprimer l’intelligence collective… Nous repasserons !
Finalement, le plus drôle, c’est que l’agence de régulation américaine FINRA (dont on a dû réussir à trouver un fonctionnaire qui n’avait pas encore été viré en raison du shutdown) a tout de même suspendu l’action du détaillant en faillite avant la clôture… Oui parce que la société sur laquelle se sont précipités tous ces ânes bâtés pour gagner de l’argent est tout simplement en faillite ! Hahahahaha !
Lueur d’espoir sur le front du shutdown américain !
Officiellement, la paralysie financière qui touche le gouvernement fédéral US persiste, néanmoins plusieurs lueurs d’espoirs sont apparue ce week-end, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Le Pentagone réintègre la quasi-totalité de ses employés civils, soit environ 400 000 personnes, sans qu’il n’y ait vraiment d’accord formel de la part de la Chambre des représentants qui a approuvé à l’unanimité, par 407 pour et 0 contre, une mesure qui permettra aux 900 000 employés fédéraux en congé sans solde d’être payés rétroactivement pour tous les jours de travail perdus, lorsque la paralysie aura pris fin !
Une mesure évidemment populaire puisque cela est censé « sécuriser » la paie de centaines de milliers de fonctionnaires.
On peut donc se demander quel est l’intérêt de voter une loi impliquant que l’ensemble des fonctionnaires seront payés, mais dans le même temps continuer à bloquer un accord budgétaire, tout en maintenant les fonctionnaire chez eux… alors que l’on va les payer ?
Il s’agit donc dans les faits de la fin du shutdown dans la mesure où tout le monde étant payés rétroactivement, tous les fonctionnaires vont pouvoir retourner au travail dès lundi 7 octobre ou presque.
La fin du shutdown ou le début du défaut de paiement ?
La vision optimiste qui a priori semble la plus probable plaide pour une résolution la semaine prochaine des désaccords entre républicains et démocrates sur l’impasse budgétaire actuelle (80 % de chance).
L’optimiste dira sans doute à raison, regardez, en réalité, comme tout le monde sera payé, il n’y a plus de fermeture de l’État fédéral dans les faits, c’est juste une question de temps pour que tout rentre dans l’ordre, mais l’État n’est plus paralysé, il fonctionne, tout va donc très bien.
Le contrarien va vous dire, effectivement mais gardez tout de même à l’esprit l’autre vision, à savoir, qu’en réalité avec cet accord, oui les fonctionnaires peuvent retourner au travail… mais ils ne sont pas payés. Ils seront payés plus tard. Un jour. Quand ? Aucune idée, mais un jour. Ce qui peut sembler être une excellente nouvelle peut également parfaitement être interprété comme un véritable défaut de paiement des États-Unis d’Amérique qui, à l’heure où nous parlons, ont officiellement annoncé qu’ils paieraient leurs fonctionnaires… un jour prochain, sans avoir annoncé pour autant la date de ce jour prochain.
Un État en faillite ne paie pas ses fonctionnaires mais essaie quand même de les faire travailler.
Je dirais que ce scénario, que j’ai appelé celui du « défaut ordonné américain » et donc au bout du compte du défaut ordonné mondial ou en tout cas occidental, a environ 20 % de chance de se produire lors de cette crise budgétaire.
Les prochains jours seront cruciaux. En réalité, la semaine prochaine va être cruciale.
Nous avons presque la certitude que l’ensemble des fonctionnaires retournera au travail entre lundi et mardi 7 et 8 octobre. Nous avons aussi la certitude qu’ils travailleront jusqu’à nouvel ordre sans être payé mais qu’ils le seront éventuellement un jour. En ayant accepté cela, les républicains ont politiquement montré leur bonne volonté et prouvé qu’ils ne voulaient pas bloquer bêtement l’État fédéral. Pour autant, sur le fond, ils ne semblent pas vouloir céder.
À ce jour donc, l’impasse demeure.
Pour autant, je pense que la véritable question est de savoir si la classe politique américaine dans son ensemble a intérêt à organiser l’insolvabilité américaine cette année ou si l’économie américaine peut attendre l’année prochaine.
L’idée encore une fois c’est de choisir entre un défaut lié à une panique et à une perte de confiance généralisée qui se fera forcément dans la panique la plus totale, et un défaut partiel, progressif et ordonné qui se fera par définition dans l’ordre et la « bonne humeur » avec une gestion de la communication au cordeau par les autorités américaines.
Un tél défaut ordonné commencera évidemment par un blocage budgétaire, avec maintien de la plus grande normalité possible, un suspense hollywoodien, avec des hauts et des bas, des lueurs d’espoirs finalement déçues. Nous pouvons même imaginer, comme cela a été envisagé par les banques américaines, que ces dernières versent des avances aux fonctionnaires sous forme de prêts bonifiés payés en réalité par les liquidités avancées par la FED.
Au même moment, nous avons appris par un article du Financial Times que les banques américaines faisaient massivement le plein de leurs distributeurs de billets en mettant 30 % de plus d’espèces que d’habitude afin de faire face à une ruée sur les retraits en cas de désaccords sur le relèvement du plafond de la dette.
L’art de la communication dans un défaut ordonné !
Si la voie d’un défaut ordonné a été choisie par les autorités politiques et économiques américaines, ne vous attendez pas à en avoir la certitude car tout sera fait, en terme de communication, pour brouiller les pistes. Dans les faits, nous serons en défaut, mais dans les mots on vous expliquera en permanence que tout va rentrer dans l’ordre, qu’il s’agit de blocage politique, que tout cela est temporaire, etc.
Il y aurait deux objectifs à cela. Maintenir une normalité apparente le plus longtemps possible afin d’éviter toute panique et créer ce que l’on nomme « l’habituation ». Il faut que les masses soient habituées progressivement à un nouvel état de fait, à de nouveaux fonctionnements, avec idéalement une absence de moment de rupture, car c’est le moment de rupture, le moment du choc violent et inattendu qui est générateur de stress et donc de panique.
Pour le moment, nous ne savons pas si ce à quoi nous assistons est cette politique de communication brillante visant à camoufler sous un brouillard épais le début du défaut de paiement US ou s’il s’agit d’un nouveau psychodrame comme les politiciens américains savent en faire.
Vous devez néanmoins envisager le scénario noir du défaut ordonné et les mesures à prendre dans un tel cas. J’y reviendrai sans doute dans notre prochaine édition.
À demain… si vous le voulez-bien !!