Rien ne va plus pour Séché Environnement

Photo Jean Baptiste Giraud
Par Jean-Baptiste Giraud Modifié le 3 juin 2012 à 19h11

Lorsqu’en novembre 2006 il accueille au Havre le premier tanker transportant 3000 tonnes de terres contaminées en provenance d’Abidjan, Joël Séché jubile. Quelques mois plus tôt, le cargo Probo Koala de la société Trafigura déchargeait des déchets toxiques dans la capitale ivoirienne. Flairant le bon coup, Joël Séché s’était précipité en Afrique et avait décroché, à la hussarde, le contrat de dépollution auprès du gouvernement. L’affaire est juteuse : pour l’enlèvement des déchets et leur traitement en France, Tredi, filiale du groupe Séché, adresse une facture de plus de 30 millions d’euros à l’Etat Ivoirien. De son côté, Joël Séché préfère parler de « la première intervention humanitaire écologiste d'ampleur dans le monde».

En France, ce contrat arrive à point nommé pour l’entrepreneur mayennais qui cherche à s’emparer de Saur, troisième acteur français de l’eau après Veolia et Suez. L’affaire ivoirienne épaissit non seulement son porte-monnaie mais elle est surtout du pain bénit pour son image. Il ne lui en faut pas plus pour convaincre la Caisse des Dépôts (CDC) qui investit à ses côtés en échange d’une entrée dans le capital de son propre groupe, ce qui lui permet de ravir la Saur à la barbe de fonds étrangers pourtant bien plus solides que lui. En 2007, rien ne semble pouvoir arrêter celui que l’on appelait encore au début de la décennie, le Petit Poucet. Doté d’un charisme de maquignon, à la fois tonitruant et fin manoeuvrier, Joël Séché sait mettre tout le monde dans sa poche, les politiques comme les banquiers.

Pourtant, cinq ans plus tard, la success story bat de l’aile. Ses soutiens politiques de droite ont quitté le pouvoir. Joël Séché ne parvient plus à convaincre ses partenaires du bien fondé de son projet industriel et donc à prendre le contrôle de la Saur. Fin mai 2012, il se fait débarquer de la présidence. Le rêve du provincial qui voulait devenir l’égal des géants de l’eau ne verra pas le jour. Celui qui a construit son empire en forçant la chance semble aujourd’hui avoir perdu la main.
Même dans son fief mayennais des voix s’élèvent pour critiquer l’homme qui fait la pluie et le beau temps dans le département. Le développement exponentiel de sa déchèterie du village de Changé est considéré par certains comme un véritable « aspirateur à déchets » national. A Longuefuye, les associations environnementales se mobilisent contre le manque de transparence de ses projets de plateformes de transit. Des courriers sur les risques de pollution ont été adressés à la Préfecture. Une association, la CNIID a même déposé plainte. D’autres l’accusent d’éco-blanchiment.
En guise de coup de pied de l’âne, ce sont également les Ivoiriens qui se rappellent à son bon souvenir. Les associations de victimes du Probo Koala estiment que la dépollution d’Abidjan n’est pas terminée. L’accusant de corruption, elles demandent l’ouverture d’une enquête officielle sur les conditions d’obtention du contrat et son coût réel.

Pour Joël Séché, le printemps 2012 ressemble au temps des tempêtes. Après l’échec de la Saur, l’avenir du groupe est à redéfinir. Un défi à la mesure du destin de cet entrepreneur qui déclarait en 2007 : «nous travaillons pour l'éternité. L'homme est de passage sur Terre, nous l'aidons à laisser le moins de traces possible !"

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Jean-Baptiste Giraud est le fondateur et directeur de la rédaction d'Economie Matin.  Jean-Baptiste Giraud a commencé sa carrière comme journaliste reporter à Radio France, puis a passé neuf ans à BFM comme reporter, matinalier, chroniqueur et intervieweur. En parallèle, il était également journaliste pour TF1, où il réalisait des reportages et des programmes courts diffusés en prime-time.  En 2004, il fonde Economie Matin, qui devient le premier hebdomadaire économique français. Celui-ci atteint une diffusion de 600.000 exemplaires (OJD) en juin 2006. Un fonds economique espagnol prendra le contrôle de l'hebdomadaire en 2007. Après avoir créé dans la foulée plusieurs entreprises (Versailles Events, Versailles+, Les Editions Digitales), Jean-Baptiste Giraud a participé en 2010/2011 au lancement du pure player Atlantico, dont il est resté rédacteur en chef pendant un an. En 2012, soliicité par un investisseur pour créer un pure-player économique,  il décide de relancer EconomieMatin sur Internet  avec les investisseurs historiques du premier tour de Economie Matin, version papier.  Éditorialiste économique sur Sud Radio de 2016 à 2018, Il a également présenté le « Mag de l’Eco » sur RTL de 2016 à 2019, et « Questions au saut du lit » toujours sur RTL, jusqu’en septembre 2021.  Jean-Baptiste Giraud est également l'auteur de nombreux ouvrages, dont « Dernière crise avant l’Apocalypse », paru chez Ring en 2021, mais aussi de "Combien ça coute, combien ça rapporte" (Eyrolles), "Les grands esprits ont toujours tort", "Pourquoi les rayures ont-elles des zèbres", "Pourquoi les bois ont-ils des cerfs", "Histoires bêtes" (Editions du Moment) ou encore du " Guide des bécébranchés" (L'Archipel).

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