Q1 : Le gouvernement a annoncé que l’Etat allait commander de nouveaux TGV pour assurer le sauvetage de l’usine Alstom de Belfort. Diriez-vous qu’il s’agit plutôt d’une bonne chose ou plutôt d’une mauvaise chose ?
• Plutôt une bonne chose, ces commandes permettront de sauver les emplois de l’usine : 45 %
• Plutôt une mauvaise chose, ces commandes alourdiront la dette de l’Etat : 53 %
• NSP : 2 %
53% des Français interrogés considèrent que l’intervention du gouvernement pour empêcher la fermeture de l’usine Alstom de Belfort est une mauvaise chose.
L’actualité est construite de différentes temporalités : il y a le temps médiatique, très court, une information chassant l’autre, qui côtoie le temps industriel, très long et cyclique, et le temps politique qui oscille entre les deux, courte ou longue, en fonction du moment. C’est le resserrement des agendas par les échéances électorales ou bien les promesses de réformes - dont l’objectif est de penser le temps long et de projeter le pays dans l’avenir - qui « font le timing ».
La communication politique du gouvernement autour de la situation de l’usine Alstom de Belfort - dont la direction générale avait préalablement annoncé la fermeture - a bousculé le temps industriel sous la pression médiatique. Cela ne lui a pas porté chance.
Le résultat du sondage OpinionWay pour LCI et Tilder de cette semaine montre que les Français ne sont pas dupes des impératifs politiques qui ont dicté la décision du gouvernement de faire appel massivement à la commande publique pour empêcher la fermeture de l’usine Alstom de Belfort. En communication, ce résultat nous permet d’indiquer qui sont les gagnants et les perdants de la décision gouvernementale.
Les grands gagnants sont le député-Maire de Belfort, Damien Meslot qui a défendu sa ville et sa région et obtenu ce qu’il fallait de la part de l’Etat et les collaborateurs locaux d’Alstom qui ont également obtenus gain de cause.
Du coté des perdants, on trouve le gouvernement. C’est un revers pour l’exécutif qui apparaît obnubilé par les échéances électorales et de ce fait ne prendre des décisions en matière économique qu’à travers ce prisme. Or, le court terme des échéances politiques n’est pas toujours compatible avec le long terme que nécessite la vision industrielle.
C’est aussi un coup porté au rôle d’actionnaire de l’Etat, dont la vision industrielle qui a pu exister sur certains dossiers (STX, Renault), est ici dévoyé.
Les dirigeants des entreprises qui veulent réformer, réorganiser leurs entreprises ont compris qu’ils seraient potentiellement entravés jusqu’à juin 2017 dans leur pouvoir de direction et de décision. On peut rappeler à cette occasion, qu’il s’agissait de transférer les 400 postes de Belfort dans une autre unité de production, en Alsace.
Les contribuables qui d’une façon ou d’une autre auront à payer le maintien à Belfort par des commandes de train à grande vitesse qui circuleront sur des lignes classiques dont le passage à la grande vitesse n’est pas certaine. D’ici à ce que les lignes passent à la grande vitesse, les rames nouvelles seront peut-être elle mêmes obsolètes !
Comme nous l’écrivions il y a quelques semaines au moment de la révélation de la volonté de la direction générale d’Alstom de fermer cette unité de production, cela revient à ériger les pratiques du sapeur Camember en action politique : creuser un trou l’après-midi pour pouvoir enfouir la terre du trou creusé le matin… et le lendemain matin creuser un trou pour faire disparaitre la terre du trou de la veille et ainsi de suite. En effet, user de la commande publique pour éviter une fermeture d’usine dont l’Etat est actionnaire revient à creuser de la dette sur de la dette. Finalement, cette action politique ne fait que creuser des trous, c’est-à-dire des déficits et les Français l’ont compris.
Q2 : Diriez-vous que vous êtes favorable ou opposé à une surtaxe des CDD pour financer le déficit de l’Assurance chômage ?
• Sous total « favorable » : 39 %
• Sous total « opposé » : 60 %
• NSP : 1 %
60% des Français sont opposés à la taxation des CDD pour financer le déficit de l’assurance chômage.
Cette mesure, demandée par la majorité des organisations syndicales lors des négociations sur l’assurance chômage (UNEDIC), qui ont achoppé en juin dernier, semble être étudiée très sérieusement par le gouvernement. Dimanche dernier sur l’antenne de LCI, le Premier ministre n’a pas écarté cette possibilité tout en appelant les organisations représentatives, syndicales et patronales à trouver un accord entre elles. Cette annonce, qui avait au préalable été portée par la ministre du Travail au cours des rencontres qu’elle a eue avec les représentants des organisations syndicales la semaine passée, doit être lue à l’aune du calendrier électoral de l’année prochaine.
En effet, en communication, cette annonce doit être comprise de deux façons, qui sont autant d’éléments de tactique politique.
• Elle est d’abord un moyen pour le gouvernement de reprendre l’attache des organisations syndicales, dont la relation avait été abîmée par le très long conflit sur la loi travail en poussant un marqueur de gauche. C’est donc une façon de « dédroitiser » la position du gouvernement sur les questions économiques et sociales.
• Elle est enfin, un moyen de faire entrer le sujet du coût du travail dans le champ politique à quelques jours du premier débat qui va opposer les candidats à la primaire du centre et de la droite.
En effet, pour l’instant, pour tout programme social, les candidats de droite se sont contentés d’attaques directes contre les organisations syndicales. Le fait de devoir sortir de la posture électorale et de rentrer sur le fond du dossier peut également pousser à redynamiser les électeurs de gauche et les organisations syndicales à « tourner leurs canons » en direction des candidats à la primaire. Cela libèrerait peut-être un peu d’espace politique pour un candidat de gauche dont les enquêtes d’opinion qui se succèdent donnent peu d’espoir.
Ainsi, même si l’opinion publique est très opposée à cette mesure (60% contre), ce qui doit être considéré comme une alerte pour le gouvernement, il n’en demeure pas moins que nous pouvons être certains que le gouvernement ne se précipitera pas pour reprendre officiellement la main sur le sujet ! Il a perdu tant de crédit en début d’année avec la loi travail qu’il devrait selon toute vraisemblance envisager d’éventuelles mesures sur l’assurance chômage, comme Montesquieu les Lois : « ne les toucher que d’une main tremblante ».