La santé, en France, est en voie de soviétisation, c’est-à-dire dans une phase de dégradation de la qualité des soins et de leur uniformisation au bénéfice d’une médecine de masse, médiocre et incapable de traiter les cas spéciaux. L’histoire de cette femme obligée de partir aux Etats-Unis pour bénéficier d’une greffe des deux mains… que la Sécu lui a refusée en France en donne une retentissante illustration.
En réalité, ce ne sont pas une mais deux femmes qui sont dans ce cas en France.
Deux victimes… de l’absurdité administrative de la Sécu
La presse a popularisé l’histoire d’une certaine Laura, victime, à 19 ans (en 2007), d’un choc septique qui oblige les médecins à l’amputer des quatre membres. Mais elle dissimule celle de Priscilla, victime d’un streptocoque pyogène de type A qu’elle a contracté lors d’un avortement à l’hôpital de Bordeaux en 2011.
Les deux femmes étaient en attente de greffes. Elles ont un jour reçu un courrier de l’Agence de Biomédecine qui les retire autoritairement de la liste des candidates à la greffe. Entretemps, les hôpitaux n’avaient de toute façon pas reçu l’appel aux greffons qui auraient permis de les opérer.
L’une est donc partie aux Etats-Unis pour bénéficier d’une chirurgie qui leur était refusée en France sans explication. L’autre devrait suivre le même changement avant fin décembre.
Le scandale Priscilla
Plus emblématique encore que l’affaire de Laura, l’affaire de Priscilla en dit long sur l’imposture de la sécurité sociale lorsqu’elle est présentée comme la meilleure couverture à offrir aux assurés.
L’histoire vaut la peine d’être racontée:
Au cours de l’été 2011, Priscilla Dray, une commerçante bordelaise, subit au CHU de sa ville une IVG. L’opération se passe sans problèmes mais le lendemain, un samedi, « sous le coup d’une forte fièvre et prise de douleurs, elle était revenue à la maternité ». L’interne de garde lui avait retiré son stérilet, avait effectué des prélèvements et avait renvoyé la femme chez elle.
Son état n’avait fait qu’empirer par la suite. Le dimanche matin, le médecin de garde avait diagnostiqué une septicémie. Il avait prescrit une antibiothérapie et ordonné à la patiente de retourner à la maternité, où elle était arrivée vers midi.
Une nouvelle fois, son cas n’avait pas inquiété les médecins de l’hôpital. Elle ne sentait alors plus les extrémités de ses membres qui étaient froides. Priscilla Dray raconte à Sud-Ouest : « Un interne m’a accueillie en disant : ‘vous croyez qu’on hospitalise comme cela. Ils sont marrants, ces généralistes. Ils ne vont pas décider pour nous' ». Une infirmière aurait même lancé : « c’est juste une bourgeoise qui veut qu’on lui masse les pieds ». Ce n’est qu’à 17 heures, qu’ un anesthésiste lui avait administré les premiers antibiotiques.
Deux jours après, les premiers résultats d’analyse avaient révélé que Priscilla est porteuse du « streptocoque pyogène de type A », une bactérie qui entame les chairs. Quelques semaines plus tard, Priscilla Dray avait été amputée des deux pieds, de l’avant-bras droit et de la main gauche.
À ce stade, Priscilla n’est toujours pas indemnisée, et l’affaire n’est toujours pas jugée…
La Sécu, ce monstre qui broie les malades
Ce genre d’anecdotes illustre parfaitement le désintérêt que le système français de soins, encadré par la Sécurité Sociale, porte aux malades. Le service public hospitalier, pour reprendre l’invention de Marisol Touraine, est une énorme machine bureaucratique où l’intérêt du patient ne pèse rien face aux logiques bureaucratiques et aux intérêts particuliers des médecins.
Entre scandale du Mediator, de la Depakine, et refus de soin, la machine Sécu n’en finit plus de dysfonctionner.
Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog