Russie : le ministre de l’Économie arrêté

Anton Kunin
Par Anton Kunin Modifié le 15 novembre 2016 à 19h29
Moscou
cc/pixabay - © Economie Matin
4,7 millions d'eurosAu centre de l'affaire, une opération de rachat de parts pour 4,7 millions d'euros.

Une fois n’est pas coutume, un haut fonctionnaire russe a été arrêté, accusé de corruption. Cette fois-ci, c’est un gros poisson : il s’agit du ministre de l’Économie en personne.

Le ministre Alexeï Oulioukaïev est soupçonné d’avoir reçu un pot-au-vin, en échange de son influence dans le dossier de rachat par Rosneft de parts d’un autre producteur russe de pétrole, Bashneft. Le Comité d’investigation, équivalent russe du FBI, affirme dans un communiqué que le ministre a reçu le 14 novembre dernier un pot-au-vin de 2 millions de dollars en liquide, et a été arrêté les mains dans le sac.

Au centre du scandale, l’industrie petrolière

Le pot-au-vin au centre de l’affaire aurait permis à Rosneft, un producteur de pétrole dont l'État russe est l'actionnaire majoritaire, de racheter les 50,0755 % du capital social d’un autre producteur de pétrole, Bashneft. Précisons que ces parts appartenaient déjà à l’État russe. Cela vous paraît étonnant ? En septembre dernier, Vladimir Poutine lui-même avouait dans un entretien que l’opération de rachat d’une société publique par une autre société publique n’était pas « la meilleure voie ».

Un ministre aux positions changeantes

Concrètement, le ministre est soupçonné d’avoir reçu l’énorme pot-au-vin en échange de son évaluation positive du projet de rachat, alors que celui-ci n’était pas encore entériné. Alexeï Oulioukaïev a effectivement donné son avis positif le 10 octobre dernier, et deux jours plus tard, l’opération valant l’équivalant de 4,7 millions d’euros était effective.

Initialement, la vente des parts de Bashneft appartenant à l’État était pensée comme un projet qui devait rapporter gros aux finances publiques russes. La vente devait avoir lieu aux enchères ouvertes : neuf sociétés étaient en lice pour devenir le nouveau propriétaire. Rosneft avait déclaré l’été dernier son intention d’y participer, mais le gouvernement s’y était opposé, car l’idée était de trouver un repreneur privé. Alexeï Oulioukaïev, le ministre arrêté, avait lui-même déclaré que la candidature de Rosneft était, selon lui, « non appropriée », et avait adressé un courrier au premier ministre Medvedev préconisant une modification de la législation afin d’écarter la candidature de Rosneft.

Cependant, en septembre dernier, Alexeï Oulioukaïev a changé son position, déclarant que Rosneft avait droit de participer aux enchères, n’étant détenue par l’État qu’indirectement. Au final, les enchères publiques n’ont pas eu lieu, et l’arbitrage s’est fait entre deux sociétés, parmi lesquelles Rosneft a été celle qui a présenté la meilleure offre.

Assigné à résidence et mis à la porte

La Comité d’investigation précise que la détention du ministre ne concernait pas le rachat lu-même, mais le fait qu’il ait accepté un pot-au-vin de la part de Rosneft en échange de son avis positif permettant à Rosneft de se porter candidat au rachat de parts de Rosneft.

Au cours d’une première audience cet après-midi, le ministre a été assigné à résidence. L’usage de tout moyen de communication – téléphone, courrier, mails, lui est également interdit. Un communiqué diffusé à l'instant fait savoir qu'il a été libéré de ses fonctions par Vladimir Poutine, « n'ayant plus la confiance » du président.

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Anton Kunin

Après son Master de journalisme, Anton Kunin a rejoint l'équipe d'ÉconomieMatin, où il écrit sur des sujets liés à la consommation, la banque, l'immobilier, l'e-commerce et les transports.

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