L'abolition de l'esclavage dans les colonies françaises en 1848, huile sur toile d’Auguste François Biard
Le concept de RSE serait formellement apparu dans les années 1960, voire un peu avant, suite à la publication du livre de Howard Bowen Social Responsibilities of the Businessman (1953), puis de celui de George GoyderThe Responsible Company (1961).
Toutefois, les origines de la RSE demeurent bien plus anciennes, selon le site Rse-pro.com, consacré à cette thématique, situant la préhistoire de la responsabilité sociale des entreprises déjà au XVIIème siècle. Président du très sérieux Observatoire sur la RSE (ORSE), Frédéric Tiberghien explique, se référant à des cas lointains, que « le boycott par des consommateurs anglais du sucre de canne des Caraïbes produit grâce à l'esclavage ou, au XIXème siècle en Europe, l'apparition d'une législation relative à l'amélioration des conditions de travail des ouvriers » sont des initiatives ayant des rapports avec la responsabilité sociale des entreprises.
D'autres estiment que c'est l'Eglise catholique qui aurait jeté les bases de la responsabilité sociale, avec l'encyclique Rerum Novarum (« Des choses nouvelles »), publiée le 15 mai 1891 par le pape Léon. Ce texte, souvent considéré comme l'élément fondateur de la doctrine sociale de l'Eglise, dénonce, comme le note Rse-pro.com, « la concentration des richesses entre les mains de la bourgeoisie, ainsi que les patrons qui versent des salaires insuffisants ».
Plus proche de nous, à la fin du siècle dernier, en 1987, le rapport Brundtland de la Commission mondiale sur l'environnement et le développement des Nations Unies a défini la politique nécessaire pour parvenir à un « développement durable ». Une dizaine d'années auparavant, en 1976, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a fait connaître aux entreprises multinationales ses lignes directrices et, en 1977, l'Organisation internationale du travail (OIT) a publié une déclaration sur les entreprises multinationales et leur politique sociale.
Ces initiatives auraient largement contribué à installer, dans le monde professionnel, le concept de responsabilité sociale des entreprises. Pour l'auteur Bernard Saincy, cependant, la RSE est concrètement née dans le contexte anglo-américain où, précise le site Rse-pro.com, « les pratiques des entreprises se développent dans une situation historique de faiblesse du droit social ». De ce point de vue, des catastrophes comme celle de Bhopal en 1984 (explosion de l'usine chimique américaine d'Union Carbide en Inde, qui a officiellement causé la mort de 3500 personnes, mais entre 20 000 et 25 000 selon les associations de victimes), ou d'Enron en 2001 (faillite retentissante d'une des plus grandes capitalisations boursières de l'époque, du fait de pertes dues à des opérations spéculatives occultes), ont été des jalons décisifs dans l'évolution du concept de responsabilité sociale des entreprises. En dépit ou à cause de leur brutalité, ces événements ont permis une meilleure perception de l'intérêt de la responsabilité sociale des entreprises, non seulement par les acteurs, mais aussi par le grand public. Une responsabilité que certains préfèrent qualifier de « sociétale » – ils parlent alors de responsabilité sociétale des entreprises – afin de mieux faire ressortir les responsabilités face aux sociétés au sein desquelles baignent les entreprises.
RSE et mécénat
Plusieurs définitions de la RSE sont proposées. Pour la Commission européenne, la responsabilité sociale est un « concept dans lequel les entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales et économiques dans leurs activités et dans leurs interactions avec leurs parties prenantes sur une base volontaire ». Le Ministère français en charge du développement durable estime, plus simplement, que c'est « la contribution des entreprises aux enjeux du développement durable ». Quelle que soit la définition, la RSE intègre, de manière implicite ou explicite, les notions de développement durable et de respect de l'environnement, car les entreprises doivent « prendre en compte les impacts sociaux et environnementaux de leur activité pour adopter les meilleures pratiques possibles et contribuer ainsi à l'amélioration de la société et à la protection de l'environnement. La RSE permet d'associer logique économique, responsabilité sociale et écoresponsabilité » (Ministère français de l'écologie et du développement durable).
On a parfois tendance à confondre la responsabilité sociale d'entreprise avec le mécénat, à l'heure où, comme si c'était une mode, beaucoup d'entreprises, notamment des multinationales, créent leur fondation comme leur branche dédiée à leurs œuvres sociales. Mais les deux concepts – responsabilité sociale d'entreprise et mécénat – ne devraient pas être confondus. Alors que le mécénat est une activité totalement séparée des activités quotidiennes de l'entreprise (au travers d'une fondation, par exemple, comme les fondations Orange d'Orange France Télécom, ou la fondation Bill et Melinda Gates du fondateur de Microsoft), la responsabilité sociale d'entreprise est une donnée consubstantielle aux activités essentielles de l'entreprise, à son cœur de métier, car « les entreprises intègrent les problèmes sociaux et environnementaux dans leurs opérations commerciales et dans leur interaction volontaire avec les parties intéressées » (Confédération européenne des syndicats).
Si en France il existe un Observatoire sur la responsabilité sociétale des entreprises (ORSE), en Afrique, un pays comme le Sénégal dispose d'une plateforme (rsesenegal.com) consacrée aux questions du développement durable et de la responsabilité sociale. Initiative du cabinet CFPMI, une plateforme de services d'appui aux entreprises et aux institutions de l'Afrique de l'Ouest spécialisée dans le conseil en responsabilité sociale d'entreprise et en communication, son objectif vise à permettre aux entreprises de mieux diffuser leurs informations sur leurs activités au profit de leurs travailleurs, leurs familles et leurs partenaires extérieurs, à promouvoir le concept de RSE en mettant à la disposition des entreprises des informations sur les bonnes pratiques, au Sénégal et dans le monde, et, enfin, à accompagner les initiatives citoyennes des entreprises par des services d'informations et de conseils utiles et pratiques pour la gestion quotidienne de leurs sociétés.
La RSE semble en tout cas définitivement ancrée dans la gestion quotidienne des entreprises, tout au moins des plus importantes d'entre elles.
Par Alain Just Coly, pour le magazine Réseau Télécom No 56
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