Quelle formidable leçon d'autorité tu nous as donnée, François, en limogeant sans ménagement ta ministresse Delphine Batho! J'ai adoré cette mise en scène que tu eusses pu ponctuer d'un «le Roi c'est moi», si ce mot n'était interdit en République. Enfin, tu te laisses aller à ton bon plaisir, et c'est une source de contentement de te voir fort aise à décider ainsi du destin de tes féodaux. Certains t'ont injustement reproché cette décision, et je voudrais donc en prendre la défense aujourd'hui.
François Hollande, soumis aux femmes autoritaires
D'abord, des esprits tortueux t'accusent de mauvaises manières vis-à-vis d'une femme et te reprochent même une forme de masculinisme. Tu serais plus indulgent avec les hommes qui t'entourent qu'avec les femmes.
Je relève d'abord l'inexactitude de cette remarque, puisque tu as démontré plusieurs fois ta soumission à des femmes autoritaires et décidées à te dominer: Ségolène Royal, Valérie Trierweiler, Angela Merkel. Il est donc faux de voir en toi un homme qui ne respecterait pas les femmes. En revanche, tu n'accordes ton respect qu'aux femmes faites pour gouverner le monde et c'est à juste titre que tu écartes celles qui doutent, qui hésitent ou qui ne portent pas elles-mêmes ce que certains sujets pensent qu'il te manque.
Sur le fond, il est bien normal que tu congédies une femme qui te déplaît. La femme est par nature inférieure à l'homme, et c'est la loi naturelle que de les éloigner lorsqu'elles ne sont plus utiles.
Ensuite, certains te reprochent de faire deux poids deux mesures: tu serais fort avec les faibles, et faible avec les forts. Ceux-là invoquent les rodomontades de ton bouillonnant sénéchal Montebourg, les remarques acides de Marisol Touraine, ou les fréquentes contradictions qui te sont portées par Pierre Moscovici. Tu les aurais acceptées ou pardonnées, alors que tu as saisi un prétexte somme toute futile pour punir ta ministre.
Ce Moscovici, ce dimanche encore, a reconnu que les impôts augmenteraient l'an prochain, alors que tu avais déclaré le contraire quelques jours plus tôt. Tes détracteurs arguent de cette contradiction pour montrer que lorsque l'un de tes affidés peut compter sur quelque force politique importante, quelque soutien, tu te montres indulgent avec lui, alors que Delphine Batho était une proie facile car peu encline à se montrer à la cour, et de peu d'influence dans les allées de tes châteaux. Tu l'as donc sanctionnée prestement, puisque tu n'avais rien à craindre de cette décision.
La loi est faite par les grands du royaume pour les grands du royaume
Précisément, voici une belle leçon de gouvernement que tu apportes à tes sujets. Certains d'entre eux, portés par l'insane mouvement de la passion révolutionnaire, croient que la justice n'est pas la loi du plus fort. Grave erreur! Il est tout à fait normal que la loi soit faite par les grands du royaume pour les grands du royaume. Telle est la règle dans une monarchie bien organisée et bien gouvernée. Depuis quand les manants, les va-nu-pied, les hobereaux, les tout petits nobliaux d'obscure extraction, pourraient-ils imposer quelque principe ou quelque décision aux Pairs de France qui font le destin du pays?
Il est évident qu'une monarchie saine et durable repose sur d'autres règles et une toute autre ordonnance: la loi change au gré des humeurs royales, et le pouvoir s'exerce sans complexe, parce que le pouvoir est légitime. Il est le moteur du destin, et lui seul a la faculté de changer le monde.
Tes détracteurs te soupçonnent également d'avoir prémédité ta décision d'évincer Delphine Batho, et d'avoir utilisé le prétexte qu'elle t'a donné pour congédier une personnalité décriée par les manufacturiers du royaume. Certains disent que les producteurs d'énergie nucléaire, d'autres disent que les producteurs de gaz de schiste, sont intervenus auprès de toi, pour obtenir la tête d'une gêneuse.
Là encore, tu donnes ici une belle leçon de gouvernement. Car il est bien normal que le gouvernement qui t'épaule soit aux ordres de ceux qui font la prospérité du pays.
L'effrontée que tu as ôtée de ton gouvernement a d'ailleurs suggéré qu'une conseillère du palais avait cédé aux injonctions de son époux, président d'une manufacture nationale, pour lui nuire. Elle s'est considérée comme la victime d'une machination courtisane.
J'espère bien que cela est vrai: la Cour est la Cour et doit rester la Cour. A la Cour, il est plus important d'être auprès du Roi en toutes choses, même pour ses menus plaisirs, que de connaître les affaires et les solliciteurs qui les portent. La Cour est affaire d'intrigues et de conjurations, de murmures et de cajoleries, d'inimitié, de vengeance et de trahisons. Ainsi va la vie des affaires, et ainsi s'ordonne le pouvoir.
C'est serait une bien terrible manie démocratique que de vouloir échapper à cette règle de gouvernement, et de vouloir en imposer d'autres qui ne se fondassent pas sur la bassesse humaine, sur la faiblesse et la force des passions. En un mot, le pouvoir n'est plus lui-même lorsqu'il s'appuie sur cette horrible invention des francs-maçons: la lumière de la raison.