« La France a besoin de ses entreprises car ce sont elles qui, en innovant, en risquant les capitaux de leurs actionnaires, en mobilisant leurs salariés, créent de la valeur, génèrent des richesses et créent des emplois (...) Il n'y a pas d'emplois sans employeurs », déclarait Manuel Valls aux Universités d'été du MEDEF.
En assumant clairement l'entreprise, la mondialisation et l'économie de marché, le discours du Premier ministre est certes courageux, mais annonce-t-il une mue idéologique sans précédent du Parti socialiste ? A « Génération entreprise – Entrepreneurs associés » (GEEA), le groupe que nous avons fondé aux côtés de 130 parlementaires, nous ne pouvons que le souhaiter.
Car à l'heure où le chômage n'a jamais été aussi élevé dans notre pays, il est temps pour la Gauche d'enterrer sans état d'âme les derniers oripeaux du vieux socialisme à la française et de faire, enfin, son « Bad-Godesberg », du nom du congrès de 1959 où le Parti social-démocrate allemand (SPD) coupait officiellement tout lien avec le marxisme et abandonnait deux points clés de sa doctrine, l'étatisation des moyens de production et la lutte des classes. Le réalisme doit l'emporter sur l'idéologie et la modernité sur l'archaïsme.
Mais pour que Manuel Valls puisse devenir un Tony Blair ou un Gerhard Schröder, une déclaration d'amour aux entrepreneurs ne suffit pas, ces derniers attendent désormais des actes qui soient concrets, courageux et audacieux. Et si le Premier ministre parvient à bousculer les dogmes, à exploser les tabous et à faire de l'entreprise, et non l'État, le fer de lance d'une stratégie de reconquête économique, alors nous le soutiendrons. C'est la gravité de la crise que traverse notre pays qui l'exige.
Car il y a urgence. « Si la France était une entreprise, elle ne serait pas en dépôt de bilan mais proche de la mise en liquidation », déclarait récemment Pierre GATTAZ, le Président du MEDEF. C'est dire si la situation économique de notre pays est inédite. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : il y a près de 1000 chômeurs de plus chaque jour, plus de 72.000 entreprises ont déposé le bilan l'année dernière, la croissance est nulle et les déficits se creusent.
Mais qu'a fait le gouvernement pour aboutir à un tel échec ? François Hollande a déclaré la guerre à la Finance tout en continuant d'alourdir une dette colossale qui frôle aujourd'hui les 2.000 milliards d'euros... Il a assommé nos entreprises de taxes idéologiques en leur faisant vivre, selon Christian Saint-Etienne, « le choc fiscal le plus violent depuis la Seconde guerre mondiale ». Il a misé sur des emplois aidés, financés par de nouveaux impôts, à destination d'un secteur public dont l'obésité ne cesse de s'aggraver. Résultat : notre économie est à l'arrêt, nos entreprises sont asphyxiées, la confiance est cassée.
Quant à l'attractivité de notre pays, elle est en berne. Les investissements directs étrangers en France ont chuté de 77% en 2013, une baisse historique. Près de 80% des étudiants de Grandes écoles envisagent de quitter la France ! Du jamais vu... Nos enfants ne veulent plus vivre dans un pays qui condamne la réussite, qui stigmatise le succès, qui bride les talents ! Depuis la Révocation de l'édit de Nantes, jamais notre pays n'avait vécu un tel exode de ses forces vives. Quant à la taxe à 75%, unique au monde, elle continue d'envoyer un signal négatif à l'ensemble du monde économique. La délocalisation des sièges sociaux s'accélère et le départ des grands patrons s'intensifie. Avec un tel impôt, c'est « Cuba sans le soleil » avouait même Emmanuel MACRON, le nouveau Ministre de l'Économie. A l'étranger, certains investisseurs surnomment même notre pays « 75-35 », en référence à la taxe à 75% et aux 35 heures... Le sursaut national, que nous appelons de nos vœux, n'est donc pas uniquement une nécessité, c'est une urgence.
Car pendant que la France décroche en Europe, l'Espagne redémarre, l'Allemagne accélère, le Royaume-Uni également. C'est pourquoi, pour sortir de la crise, la France doit oser la thérapie de choc et mettre en œuvre les mesures qu'elle s'est à ce jour interdites et que tous nos voisins appliquent pourtant depuis longtemps, avec pédagogie et pragmatisme.
Ainsi, il est indispensable de s'attaquer en profondeur aux rigidités des 3600 pages de notre code du travail, en supprimant notamment ces fameux seuils sociaux qui empoisonnent la vie de nos entrepreneurs. De 160.000 à 500.000 emplois pourraient être créés ! De même, notre pays doit cesser d'être un enfer fiscal avec des impôts idéologiques uniques au monde. L'ISF continue ainsi d'être un véritable poison pour notre économie : il a déjà fait fuir plus de 600 milliards d'euros d'actifs financiers hors de France, selon l'ancien Commissaire général à l'investissement René RICOL. A cause de cette fiscalité folle, la Fondation Concorde estime que ce sont plus d'1 million d'emplois qui ont été détruits dans notre pays en 20 ans. Enfin, l'État doit réduire son train de vie et mieux accompagner les acteurs économiques, plutôt que de toujours chercher à les contrôler, à les contraindre, à les punir. Un classement international a révélé qu'en matière de complexité administrative, la France se situait entre l'Angola et la Birmanie ! La sphère publique doit se moderniser car c'est aujourd'hui une réalité : pour notre pays, l'État est devenu le problème et nos entreprises la solution.
Toutes ces mesures sont connues, nous les avions détaillées dans notre Livre blanc remis au Président de la République, il y a quelques mois. Mais après les discours, place à l'action ! Alors que Paris a demandé un nouveau délai à ses partenaires européens pour tenter de parvenir aux 3% de déficit, on peut comprendre que cette nouvelle faveur les agace. Car eux se réforment, la France non. Eux ont commencé des politiques d'économies, la France commence à peine. Nos voisins n'ont pas zigzagué avec la réalité depuis 2 ans, ils n'ont pas considéré que la croissance reviendrait un jour comme par miracle, ils n'ont pas inventé d'improbables « boîtes à outils ». Ils ont constaté que la situation était grave et pris les mesures qui s'imposaient.
Avec plus de 5 millions de Français qui pointent chaque mois à Pôle Emploi, il n'est plus temps de tergiverser. La réalité économique a sonné le glas des doux rêves socialistes. A Manuel Valls désormais d'agir vite et fort, mais en aura-t-il le courage ?