Le code du travail, la compétitivité et le plein emploi.

Par Bertrand de Kermel Publié le 4 septembre 2017 à 5h36
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cc/pixabay - © Economie Matin
100%La dette publique de la France est proche des 100% du PIB.

Pour Pierre Gattaz, la Loi Travail « sera le curseur du mandat d’Emmanuel Macrons ».

N’est-ce pas un peu exagéré ?

Voyons la situation économique et financière aux Etats Unis dont le code du travail est réduit à sa plus simple expression.

Dette. Aux Etats Unis, elle se monte à 20.000 milliards de dollars, pour un PIB de l’ordre de 19.500 milliards. A peu de chose près, c’est 100% du PIB. En France, elle se monte à 2.200 milliards d’euros pour un PIB de l’ordre d’environ 2.000 milliards d’euros. A peu de choses près, c’est également 100% du PIB.

Déficit commercial : Aux Etats Unis il est de 500 milliards de dollars pour un PIB de 19.500 milliards environ, soit 2,5 % environ du PIB. En France, il est de 48 milliards d’euros pour un PIB de 2.000 milliards d’euros, soit 2,5 % environ du PIB.

Soit, me direz-vous, mais les Etats Unis sont en plein emploi. Ce sont les chiffres officiels qui le disent, comme ceux que vous avancez. Ah, Ah, Ah, que répondez-vous à ce miracle américain ?

J’aurais tendance à répondre ce qui suit :

Selon les chiffres officiels, effectivement, la France a un taux de chômage énorme et les Etats Unis sont quasiment en plein emploi. Il parait donc logique que nous réformions notre code du travail pour, si possible, être aussi performants que les américains.

Malheureusement, les doutes sur le miracle américain sont permis. Qu’on en juge.

Trump n’a pas cessé de pourfendre les accords de libre échange qui ont fait perdre de très nombreux emplois aux américains. Il veut les remettre en cause pour rapatrier ces emplois aux Etats Unis. Il a été élu, donc une majorité d'américains se retrouve dans cette analyse.

Trump n’a pas cessé de pourfendre les immigrés qui volent les emplois des américains. Il veut donc construire des murs pour mettre un terme à l’immigration. Il avait prévenu, et une majorité d’américains s’est donc retrouvée en tout ou en partie dans cette analyse, puisqu’il a été élu.

Oui, mais… Si les Etats Unis sont vraiment en plein emploi, dès que Trump aura dénoncé les accords de libre-échange, rapatriant ainsi les emplois perdus dans son pays, il n’aura pas suffisamment de personnel pour les pourvoir puisque son pays est en plein emploi. Il devra donc ouvrir les vannes de l’immigration … ???? Pas très logique, tout ça !

D’où ma question : et si le plein emploi US était en réalité un leurre, comme l’a démontré Fabien Pirollo dans économie matin ? https://www.economiematin.fr/news-etats-unis-taux-chomage-travail (vrai chômage = 10,5% ) ?

Et si cela était également vrai du Royaume Uni (dont le droit du travail est proche du droit américain) comme l’a démontré Jacques Martineau dans Economie matin du 25 janvier 2016 ? https://www.economiematin.fr/news-royaume-uni-contrat-zero-heure (vrai chômage = 9,6%) ?

Et si, dans ce cas, la réponse se trouvait ailleurs que dans la précarisation des familles via la réforme du code du travail ?

Par exemple dans la façon dont nous avons géré la mondialisation, qui, selon le Président du Forum de Davos, Klaus Schwab (Les Echos du 20 janvier 2024), est un échec collectif ?

« J'estime que cette situation est le résultat d'un échec collectif face à la façon de gérer les conséquences de la mondialisation. Un échec qui s'est construit pas à pas au cours des dizaines d'années qui viennent de s'écouler. Au fond, le message délivré par les militants antimondialisation au tournant du siècle dernier était juste ». Oups ! Ce n’est pas Mélenchon qui parle, mais Klaus Schwab !

Ou encore dans les défauts du capitalisme dénoncés par le même Klaus Scwhab dans Le Figaro du 16 janvier 2017 : «Il faut une réforme du système capitaliste. Les gens ne s'y identifient pas en raison de trois sortes de défaillances : la corruption, le court- termisme des acteurs, des mécanismes fondés sur la méritocratie qui en tant que tels engendrent des gagnants et des perdants, or les premiers tendent à se désintéresser totalement du sort des seconds !», expliquait-il de façon incisive lors d'un récent passage à Paris.

Son cœur penche pour le capitalisme rhénan, pour l'économie sociale de marché à l'allemande, sa culture d'origine, où tous les «stake holders» (les parties prenantes, dont les salariés) sont pris en compte, et pas seulement les «stock holders» (les actionnaires) ajoute le Figaro.

Klaus Schwab avait également dénoncé cette dénaturation du capitalisme dans le Monde du 14 novembre 2011  : « Dans le système capitaliste d'origine, nous faisions une nette différence entre, d'une part, l'entrepreneur qui assume le risque de ses investissements et qui est rémunéré en conséquence par du profit et, d'autre part, le manager dont l'objectif professionnel est d'assurer l'avenir à long terme de l'entreprise dans l'intérêt de tous les actionnaires.

Le manager a été associé aux intérêts des détenteurs de capitaux par un système de bonus exagéré, ce qui a perverti le système. C'est là que réside la racine du mal, car elle entraîne des rémunérations excessives et mine l'éthique professionnelle du manager. »

Cela nous obligerait à traiter sérieusement le problème de la mondialisation économique, et à remettre le code du travail (qu’il faut certes réformer pour le simplifier) à sa juste place. N'est-ce pas la priorité en cette rentrée 2017 ?

Le curseur du mandat d’Emmanuel Macron est-il vraiment le code du travail, comme l’exige l’Europe ?

L'auteur invite ses lecteurs à lire les articles ci-dessous qu'il considère comme complémentaires au sien :

QUEL EST LE VRAI TAUX DE CHÔMAGE AUX ETATS-UNIS ? de Fabien Pirollo

ROYAUME-UNI : LE CONTRAT "ZÉRO HEURE" de Jacques Martineau

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Ancien directeur général d'un syndicat patronal du secteur agroalimentaire, Bertrand de Kermel est aujourd'hui Président du comité Pauvreté et politique, dont l'objet statutaire est de formuler toutes propositions pour une "politique juste et efficace, mise délibérément au service de l'Homme, à commencer par le plus démuni ". Il est l'auteur de deux livres sur la mondialisation (2000 et 2012)

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