Reserves d’or et banques centrales : les Suisses disent non, les Français disent oui

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Par Jean-François Faure Publié le 15 décembre 2014 à 4h09

Le 30 novembre, l'Union Démocratique du Centre (UDC), parti ultraconservateur suisse, a lancé un référendum national interrogeant les habitants du pays à se prononcer sur la politique à mener concernant leur or. Cette « votation » se déclinait en trois questions principales : le rapatriement sur le territoire suisse de l'or helvète stocké à l'étranger (20% du stock entreposé dans la banque centrale anglaise et 10% dans la banque centrale canadienne), l'arrêt des ventes d'or suisse par la Banque Nationale Suisse (BNS), et l'obligation pour elle de détenir au minimum 20% (contre 7,5% aujourd'hui, avec un délai de 5 ans) de ses actifs en or physique.

En réalité, la question posée aux Suisses répond à une véritable inquiétude face à la situation monétaire du pays. Charles Sannat, économiste pour AuCOFFRE.com (site d'achat en ligne d'or physique avec garde en coffres), explique : « La Suisse imprime des francs suisses à foison pour acheter des euros et éviter ainsi que sa monnaie s'apprécie. Son but est de défendre à tout prix la parité euro/franc suisse, aujourd'hui de 1,20 EUR pour 1 CHF. Or le franc suisse s'apprécie sans cesse, ce qui contraint son pays émetteur à imprimer de la monnaie en grande quantité... Une trajectoire Titanic... »

Les personnes à l'origine du référendum voient donc dans ces trois mesures à la fois un moyen de garantir la stabilité du franc suisse face aux risques croissants liés à l'argent-papier et de s'assurer de l'indépendance de la Suisse en cas de crise aggravée. Alors qu'elle est responsable de la gestion de ses réserves d'or, la BNS est accusée par les instigateurs de la votation d'en avoir bradé une partie : elle a perdu 60% de ses réserves d'or en 14 ans (1040 tonnes d'or au 2ème trimestre 2014 versus 2590 au 1er trimestre 2000).

Mais les Suisses ont dit non...

Si le oui l'avait emporté...

Jean-François Faure, président fondateur d'AuCOFFRE.com, analyse : « Si ce référendum s'était soldé par un oui, cela aurait été un véritable bouleversement financier car cette approbation irait totalement à l'encontre de la politique actuelle de la Suisse qui consiste à acheter d'autres devises pour maintenir le franc suisse à un niveau plancher. Sans oublier que cette politique monétaire est également suivie par l'Europe avec la BCE, le Japon et les Etats-Unis : cela remettrait également en cause le recours systématique à la planche à billets dans la gestion de leur monnaie malgré les limites manifestées en 2008. »

Si les Suisses avaient voté pour que leur pays détienne au minimum 20% de ses actifs en or, cela l'aurait empêché de créer de la monnaie à vau-l'eau car il lui faudrait toujours avoir le pourcentage minimal équivalent en or physique, donc acheter du métal précieux.

Par ailleurs, le marché de l'or est tendu en ce moment car les banques centrales des pays anglophones et émergents en achètent massivement pour le stocker chez eux. Les Suisses devraient en acquérir 1500 à 1800 tonnes, ce qui aurait des conséquences non négligeables sur le marché (à titre de comparaison, la production mondiale d'or en 2012 était de 2700 tonnes) : les cours s'enflammeraient à la hausse face à cette importante demande, et les nombreux spéculateurs à la baisse sur le métal précieux risqueraient de perdre beaucoup, comme les grandes banques d'affaires américaines, JP Morgan ou Goldman Sachs par exemple.

Mais les Suisses ont voté à 78% contre les trois mesures proposées, qu'il s'agisse de la détention d'au moins 20% de ses actifs en or, de l'interdiction de futures ventes d'or suisse par la BNS ou encore du rapatriement de l'or suisse stocké en Angleterre et au Canada.

Pourquoi les Suisses ont voté non

UNE COMMUNICATION OMNIPRESENTE. La Suisse a la particularité de laisser au peuple un vrai pouvoir décisionnaire à travers le système dit de votation. Or le Parlement suisse, les autorités gouvernementales et la BNS sont évidemment contre cette votation qui va à l'encontre de leur politique monétaire expansionniste. Le président de la BNS, Thomas Jordan, ne s'en est jamais caché affirmant qu'une telle initiative « limiterait les activités à long terme de la BNS », qu'elle pourrait attiser l'appétit de spéculateurs sur le métal jaune, ou encore que « ce n'est pas la quantité d'or gardée par la Banque nationale qui détermine la stabilité des prix et celle du franc suisse, mais sa politique monétaire. » Il s'est d'ailleurs réjoui de l'échec du référendum en réaffirmant la poursuite de sa politique monétaire dont le maintien du cours plancher est « l'instrument central », en achetant des devises étrangères. Face à cette forte opposition à la votation de la plupart des autorités politiques et économiques, les média leur ont emboîté le pas. Les Suisses ont été soumis à un important degré de pression pour ne pas céder au oui. On peut facilement supposer que, sans cette pression, nous aurions pu observer les mêmes résultats qu'en France, qui dépendent du bon sens et de fondamentaux économiques. En France, les résultats du sondage IFOP/AuCOFFRE.com* révèlent que 68% des Français sont pour l'obligation que la Banque de France détienne 20% de ses actifs en or physique, et 56% souhaitent interdire toutes ventes futures d'or français détenu par la Banque de France.

Alors que le référendum a été lancé à l'initiative d'un parti ultra-conservateur en Suisse, on constate que ce choix français du oui est unanime tous partis politiques confondus : 70% des sondés de gauche dit oui à l'obligation pour la Banque de France de détenir 20% de ses actifs en or, 69% du Modem et 72% de la droite. Concernant l'interdiction pour la Banque de France de toutes ventes futures d'or français, la proposition emporte le suffrage de 58% des Français de gauche, 54% du Modem et 57% de la droite. Pour rappel, le pays avait vendu un cinquième de son or en 2004 pour limiter le déficit public.

UN REFERENDUM COMPLEXE. Outre cette forte communication auprès des votants, le référendum en lui-même peut être mis en cause. Il demandait aux Suisses de répondre à trois questions dans une seule.

UNE DEPENSE CONSEQUENTE. Pour atteindre cette part de 20% de ses réserves, la banque centrale suisse aurait dû acheter 1500 à 1800 tonnes d'or (70 milliards de francs suisses) et une telle dépense aurait peu de chance de séduire les Suisses.

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Quoi qu'il en soit, il est quand même peu rassurant de savoir que sa banque centrale peut stocker son or hors de ses frontières : comment s'assurer de l'existence réelle de l'or officiellement comptabilisé ? Nous évoluons dans un marché du métal jaune particulièrement contrôlé et manipulé par les pays anglo-saxons et par certains pays émergents acheteurs d'or en quantité. Récemment, l'Allemagne, le Venezuela et le Texas ont souhaité rapatrier leur or sur leur territoire. Ces initiatives de rapatriement, plus ou moins réussies, sont souvent critiquées par les milieux financiers mais il en ressort une incertitude quant à la fiabilité du système monétaire mondial et la sécurité de l'or stocké aux Etats-Unis. N'oublions pas qu'il s'agit du pays du dollar, que le dollar est la monnaie de change de référence internationale, que le poids de l'or physique met en péril la valeur du billet vert. La FED, elle, sait bien quelle valeur représente l'or physique conservé dans des coffres bancaires.

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Jean-François Faure est le président d'AuCOFFRE.com. Il a fondé ce service en ligne de placement en or physique avec garde en coffres car l'or physique est pour lui le meilleur produit d'épargne pour sécuriser son patrimoine. Il a publié un livre intitulé L'or, un placement qui (r)assure pour guider les épargnants. Véritable militant, Jean-François Faure a créé et promeut le label Clean Extraction afin de développer une exploitation aurifère respectueuse de l'environnement et des hommes.

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