Récension : « La France vendue à la découpe »

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Par Jacques Bichot Publié le 28 janvier 2022 à 6h46
Previsions Croissance France 2022 Euler Hermes
@shutter - © Economie Matin
6,8%L'OCDE prévoit 6,8% de croissance pour la France en 2021.

Le livre de Laurent Izard dont le titre a été repris pour cet article destiné à le présenter a été publié en 2019. Il aurait certes mérité une présentation moins tardive, mais il se trouve que c’est seulement en ce début d’année 2022 que j’en prends connaissance.

Estimant qu’il vaut largement d’être lu, fût-ce avec un peu de retard, je vous en donne ci-après un bref aperçu qui, je l’espère, convaincra beaucoup de personnes soucieuses du sort de la France de se plonger dans ce récit précis et détaillé de l’espèce de dépeçage auquel notre pays a été soumis.

Beaucoup de belles entreprises françaises sont cédées à des groupes étrangers

Alcatel, Rhodia, les Chantiers de l’Atlantique, Arcelor, Alstom, ces entreprises ont un point en commun : elles ont été achetées par des groupes étrangers. Nous allons focaliser ce bref compte-rendu de lecture sur les grandes entreprises, mais Laurent Izard explique que l’industrie n’est pas seule visée : il parle aussi de « l’immobilier de prestige parisien racheté par les princes du Golfe » et des « terres agricoles du centre de la France ciblées par les investisseurs chinois ». Et aussi de « la grande foire aux PME », ainsi que des achats d’ETI, les Entreprises de Taille Intermédiaire, dont certaines deviendront des grandes entreprises dans un avenir plus ou moins lointain.

Mais où est le problème ?

Cette interrogation constitue le titre d’un des chapitres du livre. Laurent Izard n’est pas hostile par principe à toute prise de participation d’une société étrangère dans une entreprise française. Il écrit même : « L’afflux d’actionnaires étrangers constitue, pour beaucoup d’entreprises, une bouffée d’oxygène et répond à leur besoin en capitaux à moyen terme ».

Mais il s’inquiète du fait que le recours aux capitaux étrangers soit rendu excessif en raison de la politique économique et sociale des gouvernements français : « Etranglées par le poids de la fiscalité, entravées par les contraintes du droit du travail et des 35 heures, assommées par la concurrence des producteurs à faible coût de main-d’œuvre, des entreprises pourtant florissantes passent chaque jour sous l’autorité de firmes étrangères ». Des firmes qui vont profiter de la technologie mise au point par les PME française, et s’en servir ailleurs qu’en France, là où les contraintes réglementaires sont moins lourdes. La PME française ne disparait pas, mais l’expansion d’activité a lieu hors de notre territoire. L’innovation réalisée en France sert finalement surtout à créer de l’emploi hors de l’Hexagone.

Le succès touristique de la France profite surtout aux capitalistes étrangers

Avec 85 millions de visiteurs étrangers annuels, la France figure parmi les premières destinations touristiques mondiales. Et une société hôtelière comme Accor, avec ses plus de 4 000 hôtels, est une réussite mondiale. Problème : Du point de vue capital, Accor n’est plus une propriété française : « si le siège d’Accor est encore en France, ses dix principaux actionnaires sont étrangers ». Pour ne citer que les trois premiers : Jinjiang International, Qatar Holding LLC et Kingdom Holding Company of Saudi Arabia.

Le Club Med, création française par excellence, est devenu chinois. Certes, le PDG est encore français : c’est Henri Giscard d’Estaing, fils d’un de nos présidents de la République, mais je ne me hasarderai pas à en déduire que cela suffit pour que le Club soit encore économiquement et juridiquement français : les bénéfices vont principalement aux firmes internationales largement majoritaires.

En conclusion, force est de constater que la France n’est plus véritablement propriétaire d’elle-même. Laurent Izard y va sans doute un peu fort en écrivant qu’elle est « vendue à la découpe », mais il est bien vrai que les centres de décision des activités françaises se situent de nos jours autant à New-York qu’à Paris et à Genève ou Zurich qu’à Lyon ou Marseille. Certes, la France est plutôt riche, mais quand même, Pauvre France !

Laurent Izard, La France vendue à la découpe, éditions L'Artilleur, 2019
Pour acheter le livre, rendez-vous ici : https://www.editionsartilleur.fr/produit/france-decoupe-laurent-izard/

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Jacques Bichot est économiste, mathématicien de formation, professeur émérite à l'université Lyon 3. Il a surtout travaillé à renouveler la théorie monétaire et l'économie de la sécurité sociale, conçue comme un producteur de services. Il est l'auteur de "La mort de l'Etat providence ; vive les assurances sociales" avec Arnaud Robinet, de "Le Labyrinthe ; compliquer pour régner" aux Belles Lettres, de "La retraite en liberté" au Cherche Midi et de "Cure de jouvence pour la Sécu" aux éditions L'Harmattan.

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