La proposition de loi Lagleize et le rapport de l’IGF sur le Pinel ont un point commun, s’ils sont appliqués en l’état, ils vont aider les « oubliés » à revenir habiter dans les grandes métropoles françaises. Pour le plus grand bien des collectivités et pour limiter l’étalement urbain. Mais il faut aller plus loin.
Les classes moyennes, ces oubliées
On les entend de plus en plus à travers les différentes réformes fiscales, les familles moyennes se sentent exclues des coups de pouce et autres incitations financières. Ce sentiment s’applique aussi en matière d’immobilier. Presque coincées entre les dispositifs Malraux et Pinel, le PTZ les concerne rarement car elles ne sont pas forcément des primos accédants.
Les prix du foncier et des loyers leur étant de plus en plus inaccessibles dans les grandes métropoles, elles se dirigent vers les villes moyennes. Si Paris est un cas particulier, avec 30.000 familles parties entre 2011 et 2017, toutes les autres grandes villes connaissent aussi cette érosion.
Projet de loi Lagleize, un bon début
La mesure phare est évidemment la possibilité donnée aux collectivités de créer des Offices Fonciers Libres pour dissocier le foncier du bâti. L’état et les collectivités deviennent propriétaires du terrain, alors seul incombe aux promoteurs et aux constructeurs le coût du bati. Quand on sait que celui-ci représente parfois plus 30% du prix d’un bien immobilier, la différence n’est pas négligeable pour l’acheteur. En effet, même si ces baux fonciers seraient rechargeables, transmissibles et cessibles, et leur prix de cession serait préconisé par un observatoire du foncier, à l’instar du dispositif d'encadrement des loyers. Il ne pourra alors plus faire l’objet de spéculations et limitera donc la surenchère entre promoteurs.
La baisse des prix de l’immobilier qu’elle engendrera facilitera l’accès à la propriété dans des grandes villes pour les classes moyennes qui en était exclues.
Un Pinel tourné vers la qualité
Les municipalités accueillent cette manne avec enthousiasme, mais sont obligées de rogner sur les surfaces agricoles pour disposer d’une offre de logement suffisante. Inquiétant quand on sait que l’équivalent d’un département français en terres agricoles disparaît tous les 10 ans à cause de l’étalement urbain.
Un Pinel mieux maîtrisé et plus en phase avec les réalités régionales, comme le préconise l’IGF, est donc plus que bienvenu. Cela renforcera son attrait et son rendement locatif pour les propriétaires. L’enterrer serait une erreur car c’est un soutien considérable au secteur de la construction, avec 35 % des ventes d’immobilier neuf qui se font en Pinel.
Révision du PLU/PLUI et des honoraires de commercialisation
La période électorale n’est pas propice à des décisions radicales, mais si les élus veulent limiter l’étalement urbain, maintenir les classes moyennes et moyennes supérieures dans les grandes villes et rendre le Pinel plus performant, plusieurs décisions fortes s’imposent.
La plus courageuse avant les élections municipales de 2020 est la révision du Plan Local d’Urbanisme (PLU, bientôt PLUI pour Intercommunal) en imposant non plus des hauteurs maximales, mais plutôt des hauteurs minimum (en nombre d’étages). En effet la pression démographique est telle dans certaines métropoles qu’il n’est pas souhaitable de construire à seulement 3 ou 4 étages. Bien entendu, cette plus grande densité devra être compensée par un investissement dans les espaces verts, afin de ne pas aboutir à une ville invivable. L’idée ne pas de s’étaler mais de construire par-dessus l’existant en augmentant les densités. Pour autant cela doit se faire tout en restant qualitatif, avec des espaces verts et partagés, des commerces et de la mixité.
Le gouvernement a aussi la possibilité de légiférer sur les honoraires dans les transactions immobilières, ceux-ci allant de 3 à 12 % ! Evidemment, plus il y a d’intermédiaires, plus les honoraires augmentent. En plafonnant à 5%, la spéculation sera moindre et l’acheteur gagnant.
Le projet de Loi Lagleize et le rapport de l’IGF sur le Pinel sont des pistes intéressantes pour limiter la fuite des familles des grandes métropoles, mais les décisions les plus efficaces restent encore à prendre.