Cela devait arriver : voilà bientôt six mois désormais que François Hollande a annoncé ce qu'il a appelé un "pacte de responsabilité" (Retrouvez ici la conférence de presse du 14 janvier). Ce pacte devait être voté en avril par le Parlement. Or, l'été arrive, avec les vacances parlementaires, et le pacte est resté au stade de la promesse, pour ne pas dire, de l'annonce... qui, pour mémoire, a eu lieu quelques semaines avant les élections municipales et européennes, très sévèrement perdues par la majorité parlementaire.
Il y a bien eu quelques commencements de textes votés à l'Assemblée, (la loi de financement rectificative de la Sécurité Sociale arrive par exemple aujourd'hui à l'Assemblée, et devrait faire baisser les charges sociales qui pèsent sur les entreprises) mais la navette parlementaire n'est pas achevée, et surtout, de nombreuses mesures du pacte ont été soit totalement oubliées, soit sévèrement amandées par les parlementaires. Résultat, huit organisations patronales ont pris la plume et publié une tribune libre hier d'abord dans le JDD, désormais reprise dans l'ensemble de la presse (vous trouverez le texte intégral de l'appel au président de la République et au Premier ministre ci-dessous). Le but de cette tribune est bien entendu d'interpeler les deux responsables de l'executif, mais aussi de signifier aux députés frondeurs qu'ils ne laisseront pas détricoter le pacte de responsabilité sans réagir, alors que le chômage explose et que les entreprises n'arrivent plus à avancer dans une économie mondialisée avec le poids des charges excessif qui pèse sur leur dos, et grève leur compétitivité.
Conséquence ? Et bien, il faudra attendre au moins la journée, voire, deux trois jours, pour prendre la température générale, et savoir si cet appel fera bouger les choses dans le bon sens, ou risque au contraire de crisper un peu plus une partie de la majorité tant au parlement qu'au gouvernement...
Appel au Président de la République et au Premier ministre
Les entreprises, de toute taille et de toute catégorie, et les entrepreneurs croient en l’avenir de notre pays : la France est un grand pays qui garde des atouts pour retrouver sa place dans le monde. Ses entreprises, sa capacité entrepreneuriale, son innovation, la qualité de ses services publics, sa créativité font notamment partie de ses atouts.
Pourtant, depuis une décennie, notre pays s’affaiblit, et contrairement à nos voisins européens, aucun signe de reprise ne s’annonce. Au lieu de libérer les énergies, notre réglementation contraint les initiatives, au lieu de reconnaître et de valoriser les succès, nous les dénigrons, au lieu d’encourager les initiatives, nous contrôlons et sanctionnons.
Les semaines qui viennent seront cruciales pour notre avenir collectif. Aujourd’hui, la force et le rayonnement d’un pays passent, qu’on le veuille ou non, par la force et le rayonnement de ses entreprises, des plus petites aux plus grandes. Les solutions aux problèmes de notre pays (emplois, formation, intégration, pouvoir d’achat, …), passent nécessairement par le développement des entreprises.
Or force est de constater que la croissance ne redémarre pas. L'Insee vient d'en apporter la démonstration. L'investissement est à l'arrêt et les derniers chiffres du chômage nous rappellent à une réalité dramatique qui touche tous les Français. Il n’y a pas de fatalité, mais il faut, pour inverser ce lent déclin, une détermination, des mesures résolues, et sans doute plus que tout, le rétablissement de la confiance des entrepreneurs et de toutes les parties prenantes de l'entreprise : salariés, investisseurs, partenaires, clients... Chacun peut et doit y participer.
Monsieur le Président de la République, Monsieur le Premier ministre, vous avez tous deux prononcé des discours qui ont redonné espoir aux entrepreneurs et aux entreprises de notre pays. Vous avez annoncé la mise en œuvre d’un Pacte de responsabilité comme la seule voie possible à la sortie de notre pays de la crise. Mais devant la situation d’urgence qui est la nôtre, il faut agir rapidement, avec détermination et constance.
Or depuis quelques semaines, nous constatons que les actes ne suivent pas toujours les discours.
Il nous faut désormais assumer, dans l’action, une politique en faveur de la croissance et de l’emploi, donc des entreprises et de leurs salariés.
Les entreprises et les entrepreneurs, qui sont les acteurs de la croissance et l’emploi, souhaitent pouvoir investir, embaucher, innover en France. Pour cela elles ont besoin de perspectives et de confiance dans l’amélioration de leur environnement. Elles ne veulent plus d’un taux de chômage qui progresse et pénalise si fortement les jeunes et les séniors.
C’est pourquoi, nous vous demandons solennellement de répondre à notre appel par trois actes concrets qui permettront de redonner la confiance en l’avenir pour notre pays et nos concitoyens :
1. Inclure de manière explicite et rapidement l’ensemble du Pacte de responsabilité dans la loi. Cela signifie des textes qui programment clairement sur les trois prochaines années les trajectoires de baisse du coût du travail et de la fiscalité. Cela signifie aussi savoir prendre des mesures efficaces plutôt que de privilégier la posture, et savoir mettre en place des procédures performantes de collaboration entre les acteurs concernés. Ainsi, les décrets prévus sur la pénibilité n’ont pas été assez travaillés et sont aujourd’hui inapplicables et coûteux, les dispositions relatives au temps partiel doivent être ajustées...
2. Mettre en œuvre avec le Parlement un moratoire sur tout texte législatif et administratif qui viendrait complexifier notre réglementation, mettre des contraintes ou renforcer les contrôles et les sanctions sur les entreprises et les entrepreneurs. Notre environnement fiscal et réglementaire a besoin de simplification et de stabilité. Dans ce chantier majeur, il faut engager un véritable travail partenarial qui aille au-delà des postures. Cessons enfin de surtransposer les directives et textes européens.
3. S’attaquer aux réformes structurelles qui permettront une baisse rapide et durable des dépenses publiques. Il est possible aujourd’hui de mettre en œuvre une baisse des dépenses publiques sans toucher à la qualité des services publics et tout en préservant l’investissement qui permet de préparer le futur. Mais il faut accepter de regarder enfin les blocages structurels, de toucher à des tabous ou des dogmes, de moderniser, de capitaliser sur les fonctionnaires et leur envie de faire... Il faut le gérer en commun, sans cliver, et les entreprises sont prêtes à participer et à accompagner cette mutation. Mais il faut que vous acceptiez de lancer enfin cette dynamique au-delà de premières mesures limitées.
Monsieur le Président de la République, Monsieur le Premier ministre, notre appel solennel est avant tout un cri d’alarme de citoyens français inquiets pour l’avenir de leur pays.
Monsieur le Président de la République, Monsieur le Premier ministre, il y a urgence à agir et vous avez les cartes en main.
Pierre GATTAZ
Jean-François ROUBAUD
Jean-Pierre CROUZET
Président du MEDEF
Président de la CGPME
Président de l’UPA
Xavier BEULIN
Michel CHASSANG
Pierre PRINGUET
Président de la FNSEA
Président de l’UNAPL
Président de l’AFEP
Stanislas de BENTZMANN
Elizabeth DUCOTTET
Philippe d’ORNANO
Président de CroissancePlus
Co-Présidente d’ASMEP-ETI
Co-Président d’ASMEP-ETI