Chaque année, la Fondation Abbé Pierre rend un rapport sur le mal-logement en France. Où l'on redécouvre combien mettre un toit digne et sain sur sa tête et sur celle de sa famille, dans la France du XXIème siècle, s'avère compliqué pour des millions de gens...
Locataires et propriétaires logés à la même enseigne
Cette année, l'association pointe du doigt notamment le problème financier auquel sont confrontés de plus en plus de ménages : chaque mois, ils ont du mal à régler la facture de leur logement. Ils seraient environ 5 millions dans ce cas, locataires ou propriétaires (qui doivent rembourser leur emprunt ainsi que les charges).
Une situation évidemment très préoccupante, car que se passe-t-il si du jour au lendemain, ils n'arrivent plus à payer leur logement ? Le déménagement forcé (potentiellement plus loin de l'école des enfants et du lieu de travail pour trouver un loyer moins cher, avec à la clef des problèmes de cout de transport), la mise à la porte immédiate...
Cette précarité dans le domaine du logement est le corollaire de la précarité croissante en vigueur dans le monde du travail, d'après Patrick Doutreligne, délégué général de la Fondation.
Plus de 13% des salariés français ont désormais un contrat de travail précaire, qu'il s'agisse d'un emploi saisonnier, à mi-temps, en CDD, en indépendant, auto-entrepreneur, etc. Avec des revenus mensuels inégaux, souvent irréguliers, parfois inexistants. Alors que le loyer, lui, doit être payé de manière égale, régulière et bien réelle chaque mois ! D'où un décalage inquiétant.
Evidemment, c'est là où les loyers sont les plus élevés –en Île-de-France, dans les grandes villes- que les problèmes se posent le plus, et pour les populations les plus exposées à la précarité de l'emploi –jeunes, femmes seules, travailleurs non qualifiés, etc.
Les charges ont été multipliées par 27 en 50 ans
Selon un rapport du Centre de Recherche pour l'Etude et l'Observation des Conditions de Vie (CREDOC) en 2010, « depuis une quinzaine d'années, les prix des marchés immobiliers ont été multipliés par 2,5 et, depuis les années 1960, les prix des loyers ont augmenté deux fois plus que l'inflation ».
Sans compter que « le prix des charges du logement (l'eau, les frais d'enlèvement des ordures ménagères, l'assainissement, le ramonage, les frais de gardiennage et l'entretien des ascenseurs) a été multiplié par 27 en cinquante ans ». Les salaires n'ayant évidemment pas connu de telles hausses, se loger est devenu un problème majeur pour les ménages modestes.
Résultat, le taux d'effort des locataires du secteur libre s'est nettement accru depuis une vingtaine d'années, passant de 18% à 23%. Tout comme celui des propriétaires, passé de 17% à 20%.
En avril 2012, on estimait que les Français consacraient en moyenne 616 euros par mois à leur loyer (hors charges) et/ou à leur remboursement d'emprunt (780 euros pour les propriétaires et 520 euros pour les locataires), soit en moyenne 23% de leurs revenus.