Pour la plupart des empires bâtis à partir des années 1980 en Chine, la question de la succession commence à se poser. D’ici cinq à dix ans, leur fondateur vont prendre du champ. Au-delà des enjeux personnels, c’est tout l’avenir du secteur privé qui dépend de la réussite ou de l’échec de cette transition. Le passage de rênes d’une génération à l’autre devient un juteux business en Chine.
Nés aux États-Unis à la fin du XIXe siècle, sous l’impulsion des Rockefeller et des Carnegie, soucieux de gérer leur patrimoine, les family offices n’en sont qu’à leur balbutiement en Chine.
— C’est un secteur très prometteur, comme tous les services financiers destinés aux grandes fortunes, explique William Cham, directeur de Stamford Privé, une structure de family office basée à Singapour.
— On voit de plus en plus de riches familles chinoises désireuses d’optimiser leurs investissements et de mieux superviser l’éducation de leurs enfants se pencher sur la philanthropie et gérer le transfert de fortune entre les générations, explique Charles Lowenhaupt du family office Global Lowenhaupt.
L’intérêt pour les services d’un family office se manifeste surtout parmi la deuxième génération d’entrepreneurs, nés dans les années 1970, qui pour la plupart ont étudié soit en Europe, soit aux États-Unis et se sont frottés aux pratiques occidentales.
— La première génération d’entrepreneurs sait faire des affaires, développer une entreprise, mais étant des self-made men pour la plupart, ils ne se préoccupent pas du management et des questions d’héritage, explique Randel Carlock, professeur à l’Insead et spécialiste des entreprises familiales.
Au-delà des family officers qui convoitent la richesse des Chinois, les universités développent chacune à son tour des MBA ou des programmes exécutifs sur la gestion des entreprises familiales. Au mois d’octobre 2011, l’université d’Harvard s’est même associée à une université chinoise pour proposer une formation de trois jours sur les dynamiques des entreprises familiales, la gouvernance et la transmission. Les banques ne sont pas en reste. Elles proposent des formations spéciales pour les héritiers de leurs riches clients. C’est le cas notamment du Crédit suisse qui proposait durant l’été 2012 une formation de cinq jours à Singapour, intitulée « Programme Legacy », visant à préparer la prochaine génération de clients à reprendre le flambeau de leurs parents. Au menu, les entreprises familiales, l’entrepreneuriat, les family offices et la philanthropie.
« Fu bu guo san dai », dit un adage chinois. En d’autres termes, « la richesse ne dépasse pas la troisième génération ». Le défi aujourd’hui est d’atteindre au moins la deuxième génération.
Extraits de "Chine : Les nouveaux milliardaires rouges" par Laure de Charette et Marion Zipfel. Editions L'Archipel. 19,95 €.