Oui, l’essence est moins chère aujourd’hui qu’il y a 40 ans

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Par Jean-Yves Archer Modifié le 8 février 2013 à 6h06

Pour des millions de Françaises et de Français dont le pouvoir d'achat est contraint, le prix des carburants n'est pas une question à se poser dans un colloque d'économistes mais une gageure hebdomadaire pour leurs cartes bancaires. Dès lors, certains d'entre eux qui voient le prix du litre au-dessus des 10 Francs d'autrefois (1,5 euros) doivent en déduire que la hausse des carburants est insoutenable d'autant que le président de TOTAL, Monsieur Christophe de Margerie, a clairement laissé entendre que la barre des 2 euros serait prochainement atteinte : événements internationaux obligent.

Alors comment aborder cette question sans tromper quiconque ?

Au jeu du ni oui, ni non, le prix de l'essence est absent. En effet, ce sujet impose de répondre à la fois par oui et par non. On doit répondre un oui très net quant aux prix qui sont moins chers qu'en 1973 à monnaie constante. Ainsi, en 1973 une heure de SMIC permettait d'acheter 3 litres d'essence contre 6 litres aujourd'hui. Oui, les prix ont baissé relativement à la hausse du niveau de vie. Oui, les voitures modernes consomment nettement moins que dans les années 70. Oui, des solutions alternatives existent (Toyota a vendu, dans le monde, plus de 4 millions de véhicules hybrides) et soulagent les budgets des particuliers.

En revanche, il y a des facteurs négatifs à prendre en compte. Pour être minutieux, il faut d'abord constater qu'il y a beaucoup plus d'automobilistes que dans les années 70 : nous sommes passés de 12 à 31 millions de véhicules en France ce qui augmente d'autant le nombre de kilomètres parcourus. Deuxièmement, les heures d'embouteillages – consommatrices de temps et d'énergie – sont en augmentation croissante ce qui oblige à se méfier des calculs du type prix moyen du kilomètre parcouru qui n'intègre pas parfois cette externalité négative. Troisièmement, les coûts des loyers en centre ville ont engendré des migrations de populations (grande banlieue, "rurbains") qui allongent les trajets domicile-travail d'où des surcoûts non négligeables et mal appréhendés. Quatrièmement, l'Europe de la logistique s'est construite depuis l'Acte unique de 1992 et ajoutée au phénomène du e-commerce, cela multiplie la présence et la consommation des poids lourds et des véhicules de messagerie rapide. Or, en tant que consommateurs, nous payons peu ou prou le prix de ces transports.

Ainsi, l'UFIP a raison de rappeler que les carburants ont baissé en prix constant. Ainsi, le Président de Margerie est dans son rôle de vigie des prix internationaux. Ainsi, les consommateurs ont des motifs de trouver l'essence "chère".

En effet, nous ne sommes plus dans les Trente glorieuses et chacun fait attention à son budget. Cette expérience de prix ressentis est bien connue et va trouver à s'appliquer pour plusieurs années tant la crainte du déclassement social est présente et tant l'angoisse est mesurable ne serait-ce que par le taux élevé d'épargne. En temps de crise, il y a toujours épargne de précaution et le niveau actuel, en France, ne conduit pas à l'idée d'une croissance stimulée par la demande intérieure. D'où le tassement de la consommation des produits pétroliers.

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Jean-Yves Archer est énarque ( promotion Léonard de Vinci ), économiste et fondateur de Archer 58 Research : société de recherches économiques et sociales. Depuis octobre 2011, il est membre de l’Institut Français des Administrateurs (IFA).  

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