Automobile : Encore une taxe de plus sur les carburants ?

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Par Pierre Chasseray Modifié le 2 mars 2013 à 10h31

Pour les automobilistes, le souvenir du 28 aout 2012 et les promesses du Ministre de l’Economie et des Finances, Pierre Moscovici, se prononçant en faveur d’un dispositif de baisse « pérenne » des prix du carburant n’ont pas disparus. Les attentes sont toujours présentes. Face à 40 millions d’automobilistes étouffés par une surtaxation des carburants, c’est tout leur « pouvoir rouler » qui se voit chaque jour restreint au fur et à mesure de l’augmentation de la courbe des prix à la pompe. TVA et TICPE sont les deux sigles d’imposition qui pèsent pour plus de la moitié dans le prix total des carburants. Et c’est ainsi qu’à chaque plein d’essence nécessaire à notre vie professionnelle comme à notre vie sociale, nous empiétons chaque jour un peu plus sur notre budget et notre pouvoir d’achat.

Dans un contexte où les attentes des automobilistes sont essentiellement concentrées sur les mesures que prendront les pouvoirs publics face l’envolée des prix à la pompe, c’est pourtant une nouvelle taxe qui semble se profiler dans les desseins de Delphine Batho, Ministre de l’Ecologie. En effet, s’appuyant sur un argument de « santé publique » et sur un rapport de la cour des comptes, la Ministre de l’Ecologie entend augmenter la fiscalité sur le diesel, venant ainsi contredire les engagements de Pierre Moscovici.

Pourtant, lorsque nous analysons le rapport de la Cour des Comptes, nous observons que c’est l’argument « écologique » et non « sanitaire » qui semble être mis en avant. Or, cet argument est infiniment contestable puisqu’à véhicule équivalent, le diesel apporte davantage de satisfaction que le véhicule essence en termes d’émissions carbone. Et il est important de noter que les objectifs internationaux portent bel et bien sur les émissions de CO2 et leur réduction. Le système du bonus/malus écologique, mis en place lors du Grenelle de l’Environnement, en est d’ailleurs la preuve accablante. Il avantage majoritairement les véhicules à motorisation diesel. Il y aurait alors une véritable hérésie à vouloir taxer un carburant jugé « non écologique » et pourtant favorisé par un « bonus écologique ».

Concernant l’argument de santé publique avancé par la Ministre de l’Ecologie, il convient de le relativiser sans pour autant venir totalement infirmer les propos de Delphine Batho. Certes, il existe une véritable problématique en termes d’émissions de particules fines sur les véhicules diesels les plus anciens. Mais l’arrivée successive des normes « euro » et de filtres à particules performants ont permis de considérablement améliorer les émissions de substances reconnues cancérigènes et la norme « euro 6 » à venir dans les prochains mois permettra d’aboutir à des niveaux de performances tels que 99,9 % des particules fines seront retenues par les filtres. Il n’est donc pas tout à fait juste de vouloir alourdir la fiscalité d’un carburant sur ce simple argument qui ne trouvera plus de réalité dans les prochains mois. Et il est encore moins juste de faire porter la faute aux automobilistes qui possèdent ces anciens véhicules et qui n’ont sans doute pas les moyens d’en changer. Une chose est certaine, ce n’est pas par la taxation supplémentaire que nous parviendrons à donner suffisamment de pouvoir d’achat aux Français pour renouveler leur véhicule.

La solution se trouve dans le renouvellement du parc automobile. Comment l’accélérer ? Comment permettre aux Français, même les moins aisés, de parvenir à l’acquisition d’un véhicule énergiquement plus sobre ? Nous proposons une mesure simple, évidente… Abandonnons le principe du bonus/malus écologique qui fait tant de mal à notre économie nationale et qui n’a apporté aucune efficacité dans le rajeunissement du parc automobile dont le vieillissement s’amplifie chaque année. Prônons, en remplacement de ce dispositif obsolète, un nouveau mécanisme de prime à l’achat d’un véhicule de remplacement, y compris d’occasion. Une prime pour un véhicule de remplacement plus sobre, plus récent et donc moins polluant. Une prime à la casse ne résoudra rien. Elle ne serait pas suffisamment ambitieuse. Les moins aisés ne disposent sans doute pas les moyens d’accéder à un véhicule neuf. Procédons par pallier. Accélérons le rajeunissement du parc. Un rajeunissement synonyme d’amélioration extrêmement sensible de qualité de l’air et d’émissions carbone. Les filtres à particules qui équiperont nos futurs véhicules diesels seront encadrés par une norme « euro 6 » prenant en considération les émissions de particules fines. La surtaxation ne se justifie donc pas.

Cependant, l’alignement de la fiscalité des carburants constitue une autre problématique abordée par la Cour des Comptes et la Ministre de l’Ecologie. Il est évident que pendant de très nombreuses années, la volonté politique française tendait à privilégier les motorisations diesel. Mais les automobilistes ne doivent pas être les victimes de cette politique. Un alignement « par le haut », c’est-à-dire, une augmentation des taxes pour les détenteurs d’un diesel n’est donc ni souhaitable, ni acceptable.

En revanche, il est tout à fait possible de faire concilier les promesses de Pierre Moscovici et la volonté d’alignement de la fiscalité de Delphine Batho. Il suffirait pour cela de prendre en considération la réalité économique quotidienne des Français et de songer à un soulagement des taxes sur les carburants. Si une baisse de la TVA doit recueillir la majorité au conseil de l’Union Européenne, il n’en est pas de même pour l’autre impôt qui alourdit les « coûts de pompe » au quotidien, la TICPE. En effet, le Gouvernement français a l’opportunité, s’il le souhaite, d’abaisser le montant de cette taxe à condition de respecter des minima imposés par les directives européennes. Et force est de constater qu’à ce jour, la France est bien au-delà de ces mêmes minima sur les deux types de carburants. L’Etat a donc la capacité d’abaisser le montant des taxes de 7 centimes par litre sur le gasoil et de 21 centimes par litre sur le sans plomb.

Il s’agirait alors d’un véritable souffle que l’on rendrait aux automobilistes. Il s’agirait d’un « pouvoir rouler » et d’une mobilité rendue aux plus touchés par une économie en berne. Mais ce serait aussi du « pouvoir d’achat » en plus pour relancer une consommation sous perfusion. Et finalement, ce serait un excellent moyen de concilier les promesses du Ministre des Finances et la volonté de rééquilibrage des taxes souhaitée par la Ministre de l’Ecologie.

Une baisse des prix des carburants associée à une prime à l’achat de véhicules plus sobres, y compris d’occasion pour rajeunir un parc vieillissant. Evidemment ces réformes auront un coût. Mais assurément, ce coût représente la garantie d’une amélioration significative de la qualité de l’air associée à un grand bol d’air pour 40 millions d’automobilistes étouffés par les taxes.

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Pierre Chasseray est délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes. www.40millionsdautomobilistes.com

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