Faisons preuve d'un peu de modestie. Au Moyen-Age, un seigneur craignait trois choses : une mauvaise récolte, une invasion par des barbares ou un belliqueux voisin, et la colère de Dieu - qui pouvait se manifester par une maladie, incurable, pour lui, ou une pandémie ravageuse pour les siens. En dehors de cela, il pouvait raisonnablement planifier des projets à l'échelle de sa vie terrestre. Construire un château-fort ou renforcer celui légué par son père. Bâtir une basilique plus belle et plus grande que celle du voisin. Quand on montait dans les échelons, au niveau du royaume, les problèmes devenaient certes un brin plus corsés, avec les jeux d'alliances et de trahison -ce qui fait le succès de la série Games of Thrones- mais enfin, on pouvait se projeter dans l'avenir en s'appuyant sur un ensemble de paramètres assez stables.
Pour le décideur du XXIe siècle, l'équation est totalement différente. A quoi ressemblera l'humanité dans cinquante ans ?
Le climat ? Il va probablement changer mais quand, comment, avec quelles conséquences ? No lo se.
L'espérance de vie ? Elle a progressé de vingt ans en moins de deux générations. Les scientifiques évoquent le cap des 120 ans, comme l'espérance de vie ultime, quand d'autres prétendent détenir à moyen terme la clef de l'éternité.
La natalité ? Nous avons déjà un pied dans le Meilleur des Mondes d'Aldous Huxley et Bienvenue à Gattaca. Les bébés naitront dans des uterus en plastique, ou pas. D'un père ou d'une mère, ou pas.
Les ressources énergétiques ? Arrivera un jour où le pétrole tirera sa révérence. Soit la fusion nucléaire aura pris le relais. Soit l'hydrogène et l'électricité solaire seront devenus les énergies de tous les jours, abondantes et bon marché. Soit nous serons dans la merde.
Le travail ? C'est Bill Gates qui le dit, pas moi : dans vingt ans grand maximum, les robots auront remplacé les humains dans toutes les tâches répétitives faiblement qualifiées. Nous serons deux milliards d'humains en plus, et déja, plus personne ne croit plus que le plein emploi soit possible, à l'échelle du monde en 2014. Alors, en 2060...
Si vous ajoutez à ces variables, bardées d'inconnues, les risques de guerre, de crises économiques et financières, de virus mutants résistants à toutes les thérapies, et l'impossibilité théorique de pouvoir nourrir neuf milliards d'habitants, se risquer à prédire ce que sera 2060 en France pour les retraités semble au minimum utopique.
L'INSEE, pourtant, affirme dans une étude qui vient de paraître que les retraités de 2060, soit dans un peu moins de cinquante ans, vivront moins bien que les actifs. Leurs revenus équivaudront à une fourchette allant de 70 à 85 % des revenus des actifs, quand en 2010 actifs et retraités avaient des revenus identiques.
Ce genre d'étude prospectiviste est non seulement risible, mais méprisable. Je ne parle pas de ceux qui l'ont commise, mais de ceux qui l'ont imaginée, et commandée.
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