Finalement, toutes les prévisions économiques sont fausses !

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Par Charles Sannat Publié le 18 juin 2014 à 12h29

L'année dernière, je dénonçais avec force ce que j'appelle le grand mensonge des « prévisions » qui sont fausses, ce que tout le monde sait bien mais que l'on publie tout de même et que l'on reprend en boucle dans les médias afin de rassurer le petit peuple sur son avenir qui sera forcément meilleur que son présent.

Imaginez un seul instant que l'on vous dise « brave peuple de France, la situation est dramatique et c'est parti pour durer encore de très nombreuses années, préparez-vous » ! Excusez-moi, oui, je sais, c'est ma femme qui me tape sur les épaules et qui me dit que c'est exactement ce que je vous dis et vous répète à longueur d'article, mais tout le monde sait bien que ce que je dis, moi, n'a aucune importance (hormis de servir de psychothérapie de groupe à toute notre petite communauté de contrariens et de contrariennes, ce qui fait déjà du bien). Non, ce qu'il faut imaginer c'est si notre Premier ministre Manu par exemple arrivait au JT de TF1 pour dire cela, le tout frappé du sceau de la déclaration « officielle ». Là, cela aurait de la valeur, et puis cela mettrait également un beau bazar, les uns se précipitant au supermarché se ruer sur les boîtes de raviolis et les autres se mettant à épargner comme des forcenés et enfin les petits patrons en refusant de recruter qui que ce soit car mieux vaut être prudents.

Imaginez donc si nos dirigeants nous expliquaient véritablement la gravité de la situation ce qu'il se passerait et la panique que cela amènerait. Il est important, non, en fait il est primordial de rappeler ce pont précis car c'est exactement la raison pour laquelle vous n'entendrez jamais un politicien, un ministre ou un officiel quelconque vous expliquer les dangers auxquels nous allons être confrontés dans les mois qui viennent.

Alors comme ceux qui nous dirigent ne peuvent pas nous dire la vérité, ils nous racontent de beaux mensonges, de belles fables et nous faisons semblant d'y croire parce que nous avons envie au fond de nous d'y croire. Nous voulons par-dessus tout que tout redevienne comme avant. C'est normal, c'est l'un des fonctionnements du psychisme humains et cela porte le très juste nom « d'aveuglement volontaire ».

Le grand mensonge des prévisions depuis 7 ans. Promis, l'année prochaine c'est la reprise !!

À moins d'être sur une île déserte, vous avez été soumis depuis 7 ans avec une constance à toute épreuve à cette grande supercherie des prévisions économiques que l'on fait l'année N pour l'année N+1, c'est-à-dire pour l'année prochaine. Je vais donc faire appel à votre mémoire et pour ceux qui n'en ont pas, ce n'est pas grave, « Google », lui, a de la mémoire, alors vous pourrez vous amuser à faire quelques recherches pour vous rafraîchir les esprits si vous ne me croyez pas.

Depuis 7 ans donc (le début de la crise en 2007), on nous a toujours promis que l'année prochaine nous allions voir ce que nous allions voir... et que si cette année c'était encore difficile et compliqué, les perspectives pour l'année prochaine étaient très... prometteuses, la croissance allait enfin revenir, nous serions bénis des dieux et nous nagerions dans une félicité collective tout en nous baignant dans des flots d'argent et de richesses (cela donne envie non ?).

C'est en tout cas le message que l'on vous délivre invariablement vers les mois d'octobre, novembre et décembre. Puis au premier trimestre de l'année suivante, on est légèrement déçu, mais ce n'est pas grave car il reste encore 3 trimestres pour redresser la barre (au cas où, une année se divise en 4 trimestres, comme mes appels de charges de copropriété...).

En général, on trouve toujours une excuse pour justifier les mauvais chiffres du premier trimestre, cette année par exemple ils ont fait fort puisque c'était à cause du froid aux USA, le fait que ce soit en Floride et en Californie (deux États à l'abris de la neige), que la croissance a le plus baissé n'a même pas ému le moindre analyste, puisque si tout le monde ou presque connaît désormais les chercheurs qui ne trouvent pas beaucoup, il y a aussi les analystes qui n'analysent pas grand-chose...

Lorsque les chiffres du deuxième trimestre commencent à être connus (que la tendance est perceptible), c'est le moment où l'on fait la première « révision » des prévisions de croissance de l'année en cours. Puis le trimestre prochain, on fera la même chose (en trouvant une excuse du type il a fait froid cet hiver, chaud cet été, et entre-temps Poutine, le grand méchant loup vilain, eh bien avec ses bêtises il a fait baisser la croissance mondiale, on ne pouvait pas savoir ce n'est pas de notre faute).

Enfin, nous finirons l'année avec une croissance de 0,5 % en France (et encore je suis optimiste) et de 1,5 % aux USA, et encore sans tenir compte ni de l'inflation et encore moins des injections d'argent tout frais de la FED qui, bien qu'elle imprime de moins en moins, imprime quand même encore !

Et comme nous aurons fait des révisions de prévisions tout au long de l'année, nous finirons 2014 sur des communiqués de victoire du type : « Conformément aux prévisions, la croissance en 2014 s'est établie à x % blablablablabla. » Puis l'on recommencera le même cirque en vous expliquant que les perspectives pour l'année prochaine (2015) sont absolument ébouriffantes et que le chômage devrait commencer à reculer enfin et que l'on va tous s'enrichir. Entre-temps, les fêtes de fin d'année occuperont l'esprit de la plèbe que nous sommes.

Nous pourrons donc à nouveau recommencer un tour de manège et, encore une fois, cela fait 7 ans que ça dure. Le pire c'est que cela fonctionne à merveille et que les dirigeants pilotent ainsi le « moral » des peuples à coups de cric, de pompes et de mensonges et qu'encore une fois, nous préférons y croire puisque l'être humain est en réalité fondamentalement « optimiste », génétiquement « optimiste » donc pas ou peu réaliste. Il s'agit là encore une fois d'un ressort de la psychologie humaine qui, pour supporter son présent et ses difficultés, a besoin de pouvoir se projeter dans un futur où cela « ira mieux demain ». L'espoir fait vivre, et si vous êtes pessimiste, on vous range vite dans la catégorie des dépressifs !

On rentre dans la saison des révisions !

Pas celles du Bac bien sûr, il est un peu tard pour se mettre à travailler maintenant, en revanche nous rentrons dans la saison des révisions des prévisions, et aujourd'hui nous avons eu deux perles, mais alors vraiment nous avons été particulièrement gâtés.

Déficit : la Cour des comptes prévoit un nouveau dérapage proche de 4 % en 2014

La Cour des comptes vient de publier un nouveau rapport (que vous trouverez en bas de page) assez sévère sur les finances publiques en pointant du doigt un nouveau risque de dérapage du déficit public et de la dette.

Le déficit pourrait donc dépasser cette année les 4 % et la dette de notre pays franchir le cap des 2 000 milliards d'euros, ce que je dis et répète depuis des mois et des mois.

Il se pourrait même, selon la Cour des comptes, que les prévisions de croissance du gouvernement soient erronées et que l'on n'atteigne pas les 1 % de croissance... Sans blague ! Moi qui croyais que la courbe du chômage allait s'inverser...


En plus, ce n'est pas avec la loi Alur que l'argent issu des « frais de notaires » qui ne sont en réalité que des impôts pris par l'État va se précipiter en courant dans les caisses de notre État dispendieux vu que maintenant pour signer une promesse de vente il faut quelques mois au lieu de quelques jours... Or il s'agit de sommes considérables. Pareil pour la construction neuve, la TVA et tout ce qui s'ensuit. Je ne parle même pas des bénéfices des entreprises qui fondent comme neige au soleil et des déficits accumulés à tous les niveaux.

Alors finalement, on se rendra compte que l'on dépense encore trop, qu'il faut faire encore de la rigueur et de l'austérité et que plus on vous annoncera des baisses d'impôts plus ces derniers vont augmenter parce que, tout simplement, il n'y a pas le choix... Pourtant, il me semble que les prévisions étaient bonnes et que l'État était sur la « bonne trajectoire », que ce qui était important d'ailleurs c'était cette fameuse « trajectoire ». Vous vous souvenez ?

Le FMI moins optimiste sur la croissance US

Traversons l'Atlantique, puisque l'on nous explique depuis deux ans qu'aux États-Unis c'est la reprise, c'est fabuleux, c'est la croissance et le chômage est au plus bas, ce qui n'empêche pas le nombre de pauvres d'être au plus haut et là encore, personne ne se pose de question sur des incohérences statistiques majeures.

Bref (vous pourrez vérifier sur cet article du Figaro qui ne fait que relayer une dépêche d'Agence de Presse), le FMI a revu sa prévision de croissance aux États-Unis en baisse pour 2014 en la passant de 2 % contre 2,8 % prévus jusqu'à présent.

Le FMI découvre aussi qu'il y a plein « d'incertitudes » qui pèsent sur l'économie américaine, que l'emploi ne se porte pas si bien que cela, et que ce serait peut-être une bonne idée que de ne pas relever tout de suite les taux d'intérêts de la FED... sans blague.

En fait, le FMI vient presque de vous dire tout haut ce que je pense tout bas depuis des mois : il n'y a pas de véritable croissance aux USA autre que celle créée artificiellement par la Banque centrale américaine et ses injections massives de monnaie depuis le début de la crise en 2007.

Vous l'aurez donc compris, il faut bien avoir présent à l'esprit que les prévisions économiques ne sont que des supports de « désinformations » et de « manipulations » des masses laborieuses. Il s'agit d'un élément stratégique et c'est la raison pour laquelle, que ce soit dans l'ex-URSS ou dans notre monde « ultralibéral » d'aujourd'hui, les statistiques et les chiffres ont autant d'importance.

Jamais vous n'entendrez la vérité de la bouche d'un dirigeant car il ne peut tout simplement pas la dire, donc ne l'attendez pas.

La conséquence logique est que l'on vous sert donc inévitablement des chiffres faux ou tronqués afin « d'apaiser » les foules. Vous pouvez en avoir la certitude en écoutant bien ce qui se dit tout au long d'une année, en regardant ce que l'on vous annonce, puis comment tout au long de l'année on « corrige » puis comment pour les prévisions de l'année prochaine on vous fera encore un nouveau scénario rose. L'idée est juste de vous emmener par le bout du nez toujours un peu plus loin et, évidemment, trop contents d'être rassurés à peu de frais, l'écrasante majorité de nos concitoyens, aveugles volontaires, plongent à pieds joints dans un piège qui se referme sur eux. Un piège où le rêve est doux.

Je peux donc vous annoncer sans risque de me tromper que les prévisions de croissance pour 2015 s'annoncent enfin de très bon augure... sinon ce sera en 2016, ou promis, juré, en 2017 nous ne saurons plus quoi faire d'un taux de croissance stratosphérique.

Préparez-vous et restez à l'écoute.

À demain... si vous le voulez bien !!

Au coffre Le Contrarien Charles Sannat

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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