Investisseurs, entrepreneurs et ménages sont les otages de leurs dettes et la Fed est l’otage de son idéologie. La Fed peut faire surgir tout l’argent qu’elle veut pour racheter tous les actifs financiers en cas de nouvelle récession mais l’inflation est tapie au coin du bois et le jour où elle en sortira approche.
Se débarrasser des mythes est une tâche périlleuse : les gens tiennent davantage à leurs mythes qu’à la vie. ?Ils tuent peut-être pour de l’argent. Mais ils meurent pour leurs religions, leurs gouvernements, leurs clans… et leurs idées.
Une grande cause ne fait mourir que les autres
Certaines personnes pensent que même une idée aussi abstraite que la “liberté de parole” mérite que l’on meure pour elle. On attribue à Voltaire la citation suivante : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous ayez le droit de le dire ». La plupart des gens embrassent une Grande Cause avec enthousiasme et conviction. Mais beaucoup d’entre eux ont le bon sens d’en sortir discrètement, avant que leur vie ne soit réellement en danger. Nous pensons que M. Voltaire aurait fait de même.
Voilà pourquoi les mythes les plus meurtriers sont ceux qui vous accompagnent sans vous faire prendre de risque à titre personnel. Par exemple, on privilégie toujours les guerres menées à l’étranger. Lorsque Périclès a proclamé que l’honneur d’Athènes était en jeu, que la cité devait affirmer son impérialisme et poursuivre la guerre contre Sparte, il n’a pas proposé d’envahir la Sicile lui-même. Pas plus que George W. Bush n’a proposé d’entrer lui-même dans Mossoul lorsqu’il a proclamé la guerre contre le terrorisme.
Mais lorsque vous agissez en fonction d’un mythe, vous en devenez rapidement l’otage ; si vous ne pouvez gagner, vous perdez. Il se trouve que Périclès est mort dans son lit, qu’Athènes a été détruite, et sa population tuée ou réduite à l’esclavage. La Guerre contre le Terrorisme, quant à elle, a coûté environ 3 600 milliards de dollars, jusqu’à présent (selon les dernières estimations émanant de l’Université Brown), et tué plus de 7 000 soldats américains. Mais George Bush, Dick Cheney, Michael Ledeen, Elliott Abrams, Paul Wolfowitz et John Bolton sont toujours en vie.
En fait, à notre connaissance, aucun des principaux partisans de cette guerre ne figure parmi les morts. Dans l’autre camp, entre 60 000 et 1,2 millions de personnes ont été tuées (elles sont si nombreuses… et c’est si difficile à vérifier… que toute une organisation s’est créée afin de les comptabiliser). Saddam Hussein, qui avait maintenu le couvercle sur le terrorisme islamiste, a été exécuté. A présent, un état terroriste existe dans cette région –l’état islamique – équipé d’armes de fabrication américaine, et avec un chef formé aux Etats-Unis à sa tête.
Alerte à la récession
Mais revenons vers le monde de l’argent (en nous demandant si 3 600 milliards de dollars auraient été dilapidés aussi facilement si cela avait été de l’argent réel). Les marchés sortent de leur torpeur estivale. Il faut être attentif.
La situation est la suivante : L’économie américaine progresse toujours. Mais à peine. Et le schéma est clair. Au lieu de se renforcer, elle s’affaiblit… la croissance du PIB diminuant d’un trimestre sur l’autre. Le PIB « nominal » est désormais de 2,4%, soit le plus faible taux enregistré, hors période de récession, depuis la Deuxième guerre mondiale. On obtient la croissance « réelle » du PIB en retranchant l’inflation (déflateur de PIB)… qui, selon une estimation officielle, est de 2,2%, hors alimentation et énergie. Si ces chiffres sont corrects, cela signifie que l’économie américaine stagne, essentiellement. Elle a calé. Le chiffre officiel de l’inflation est très probablement sous-estimé.
David Stockman, ex-conseiller au budget du président Reagan, l’a recalculé, en retirant une grande partie des chiffres bidon produits par l’État. Il estime que le taux réel de l’augmentation des prix subie par les Américains – son indice des prix à la consommation « Flyover » — s’est élevé en moyenne à 3,3% sur l’intégralité du vingtième siècle. Si l’on se base sur ce chiffre, on constate que l’économie réelle est désormais en récession, avec un taux de croissance de moins 0,9%. La production va très probablement poursuivre sa spirale descendante. Si c’est le cas, vous pouvez vous attendre à une récession avant fin 2017. Et il est très probable que cela provoquera, tôt ou tard, un sell-off soudain sur le marché actions, lorsque le mythe de la « reprise » sera bel et bien mort. Cela provoquera de nouvelles interventions de la part de l’État… et une augmentation du taux d’inflation (prix à la consommation).
La menace d’inflation sur le marché obligataire au plus bas depuis 5 000 ans
Mais attendez… L’inflation hante déjà tout l’édifice financier. Les obligations, par exemple, dépendent désormais des faibles taux d’inflation … jusqu’à perte de vue. Le cours des obligations chute lorsque les taux d’intérêt augmentent. Or les taux d’intérêt augmentent en même temps que l’inflation. Les taux de rendement actuels étant ultra bas, la moindre hausse des taux d’intérêt pénaliserait les détenteurs d’obligations.
Voilà pourquoi les investisseurs sont si attentifs aux sous-entendus de la Fed et à ses gesticulations. Ils savent que les cours élevés affichés actuellement par les obligations, dépendent des taux d’intérêt les plus bas jamais enregistrés depuis 5 000 ans. Si le taux de croissance annuelle de l’indice des prix à la consommation est de 3,3%, comme l’a calculé David Stockman, et que vous placez votre argent dans des bons du Trésor à 10 ans rapportant 1,5%, vous perdez 1,8% par an en termes de pouvoir d’achat. Et si vous placez votre argent dans des actions offrant un dividende de 2%, alors vous perdez 1,3% par an de pouvoir d’achat (voire plus, lorsque vous prenez en compte les taxes).
Le mythe absurde de la Fed nounou de l’économie
Dans le contexte actuel des marchés, avec des rendements aussi faibles de toutes parts, pratiquement tout le monde doit perdre de l’argent ! Si l’inflation des prix à la consommation augmente un tant soit peu, alors tout le monde fuira massivement les actions et les obligations. Cela a peut-être déjà commencé. Depuis mi-juillet, les actions américaines ont augmenté et baissé… sans qu’une tendance nette ne se dégage, que ce soit à la hausse ou à la baisse.
Mais regardez ce qu’il s’est produit sur le marché obligataire. Voici ce qu’écrit Ambrose Evans Pritchard dans le Telegraph : Les rendements des bons du Trésor à 10 ans –coûts d’emprunt de référence pour le secteur financier international – ont bondi de 19 points de base et atteint 1,7% depuis le milieu de la semaine dernière. [Lorsque les rendements obligataires augmentent, les cours chutent]. Le volume des obligations d’État se négociant à des taux au-dessous de zéro a soudainement chuté de 10 000 milliards à 8 300 milliards de dollars, des effets parallèles s’exerçant sur les obligations d’entreprise.
Les investisseurs, les entreprises et les foyers sont désormais prisonniers de leurs dettes. Leurs dettes sont prisonnières des taux d’intérêt. Les taux d’intérêt sont prisonniers de l’inflation. Et la Fed est otage d’un mythe absurde, selon lequel elle serait capable de contrôler et d’améliorer l’économie de marché. La Fed peut émettre de l’argent frais afin d’acheter des actions et des obligations… en faisant grimper le prix des actifs. Mais plus elle crée d’argent, plus la hausse des prix à la consommation se rapproche à grands pas. Et alors, tout le bazar explosera.
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